Après l'échec de la médiation américaine en mars dernier, rejetée par la partie éthiopienne, l'Union africaine a pris le train des discussions en qualité de médiateur, à la demande d'Addis-Abeba. Mais pour le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, les problèmes des Africains devraient être réglés en Afrique et par les Africains eux-mêmes. Et c'est un rôle que voulait se donner l'UA depuis des années déjà et une doctrine qui motive son activisme dans la gestion des conflits récents en Libye et dans le Sahel, pour ne citer que ces deux dossiers. "Le privilège accordé par l'Ethiopie à la médiation africaine est tout à fait justifié et qui s'explique par le fait que les pays africains se méfient de l'Egypte", explique le chercheur Marc Lavergne. "C'est pour cela que l'Egypte aimerait bien avoir une position forte au sein de l'Union africaine. Mais pour avoir une position-clé dans l'UA, il faut avoir des alliés en Afrique, ce que Le Caire n'a pas." Pour Luc Descroix, "l'Ethiopie, c'est le pays roi en Afrique. C'est là-bas que se trouve le siège de l'Union africaine. Les Ethiopiens ont beaucoup plus confiance en leurs pairs africains qu'aux Etats-Unis ou aux autres intervenants extérieurs. À mon avis, ils ont tout intérêt à ce que ce soit une médiation africaine, parce qu'ils savent que les Africains sont plus objectifs en termes de souveraineté nationale et de partage de l'eau". S'exprimant sur le rejet de la médiation internationale en général et américaine en particulier, le chercheur affirme : "Comme on le sait, au temps de la guerre froide, il y a eu beaucoup de tensions entre les deux blocs (Russie et Etats-Unis) pour la construction du barrage d'Assouan, l'un et l'autre sont suspects et ne peuvent pas être considérés comme de bons médiateurs."
