Le gouvernement commence à rouvrir progressivement les espaces et les lieux interdits durant la période du confinement, à l'instar des plages, des restaurants et des mosquées, mais quid des infrastructures sportives ? Est-il urgent de reprendre les entraînements ? "Oui", dira l'entraîneur Abdelkader Yaïche. "La vie doit reprendre et nous devons apprendre à vivre avec ce virus en appliquant toutes les mesures sanitaires, notamment les gestes barrières. C'est une crise qui a fait énormément de dégâts. Cette pandémie menace sérieusement l'avenir de notre football et les clubs algériens contraints de reprendre les entraînements dans les plus brefs délais", préconise le technicien et ex-entraîneur de l'USMBA. "Vous savez, cela fait cinq mois que les compétitions sont à l'arrêt. Sur le plan méthodologique, une semaine d'entraînement perdue représente un mois de travail à rattraper. Alors, je vous laisse imaginer le temps qu'il faudra pour que les joueurs retrouvent leurs sensations d'avant. Ce n'est pas une mince affaire. Au début du confinement, on aurait pu aspirer à une reprise normale après quelques semaines d'inactivité. Mais là, ce n'est plus possible. Et je me demande dans quel état allons-nous récupérer les joueurs dont la plupart s'entraînent juste pour s'entretenir et tenter de préserver leur forme. Ils sont logés dans des appartements où il est difficile de faire du sport au sens propre du terme. Certains ne s'entraînent plus. C'est pour vous dire que l'urgence est de reprendre les entraînements immédiatement", espère Yaïche, qui aurait aimé que "des essais soient effectués sur deux, voire trois clubs. Sincèrement, il fallait une concertation à tous les niveaux et par la même occasion effectuer des essais en permettant à certains clubs de reprendre les entraînements de façon progressive et étudiée à la fois. Je ne dirais pas que nous n'allons pas rencontrer des difficultés, mais au moins qu'on s'habitue à certains gestes, un protocole à suivre pour préserver les vies humaines et par la même occasion permettre aux équipes de suivre leurs entraînements le plus normalement du monde. Je pense que si nous avions fait cela avant, il n'y aurait pas de problème actuellement. Nous aurions pu généraliser le processus à tous les clubs, à toutes les divisions", fait-il savoir. Et d'ajouter : "Même si nous avons tracé des programmes d'entraînement individuel, je suis sûr que les joueurs les plus assidus ne réaliseront que 50% de ce programme, d'autant plus qu'avec la fermeture des enceintes sportives il est difficile de réaliser tout le programme établi. De toute façon, ces entraînements individuels ne remplaceront jamais les séances collectives où les entraîneurs ont le contrôle sur tout." Yaïche préconise du reste une reprise progressive sans brûler les étapes. "Des joueurs ont même vendu leur voiture..." "Maintenant, le minimum pour reprendre la compétition est de deux mois. Par conséquent, il appartiendra aux entraîneurs et aux préparateurs physiques de s'adapter à la situation en fonction de la forme et du niveau de préparation de chaque joueur pour confectionner le plan de reprise des entraînements collectifs. Déjà, il faudra 15 jours pour faire un diagnostic global avec une période dédiée spécialement à la remise en forme, suivie d'une évaluation individuelle, sans parler des tests VMA pour connaître le niveau de chacun en vue de composer des groupes de travail homogènes, car n'oubliez pas que les joueurs se trouvent en situation de désentraînement. Une période d'inactivité sportive engendre une réelle désadaptation à l'effort. Le désentraînement provoque une remise à zéro des adaptations spécifiques à l'effort. C'est-à-dire que la manière dont se comportent les muscles va être modifiée. L'ensemble des critères d'adaptation s'amenuisent. Ce sont des exemples parmi tant d'autres", souligne Yaïche, qui insiste aussi sur le volet psychologique. "Je me demande comment nous allons récupérer des joueurs qui ne sont pas payés depuis dix, voire onze mois, comme c'est le cas des éléments de l'USMBA. Psychologiquement parlant, ils ne sont même pas prêts à reprendre le travail, car je connais même des joueurs qui se trouvent dans des situations précaires. Certains ont même vendu leur voiture pour subvenir à leurs besoins, mais aussi passer les fêtes de l'Aïd auprès de leur famille. Comment voulez-vous qu'un joueur soit prêt alors que les dirigeants du club ne l'ont pas appelé depuis cinq mois. En même temps, j'apprends d'un ami qu'un club amateur a convoqué ses joueurs pour procéder à leur paiement. C'est à ne rien comprendre. Donc, il faut un tout pour réussir une saison footballistique", conclut notre interlocuteur.