Ce nouveau passage à l'acte confirme la situation de grande précarité dans laquelle se trouvent beaucoup de jeunes compatriotes inscrits dans les universités françaises. Un étudiant algérien de 25 ans, originaire de Béjaïa, s'est donné la mort le week-end dernier en se défenestrant dans une résidence universitaire du campus de la Rochelle, dans le sud-ouest de la France. Son corps a été retrouvé lundi matin par un employé du Crous (Centres régionaux des œuvres universitaires) au pied d'un des bâtiments où il occupait une chambre. Un communiqué publié mardi soir par la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP) révèle que la victime avait auparavant fait parvenir un message à l'un de ses proches pour annoncer son geste. La police dit aussi avoir ouvert une enquête pour élucider les raisons du drame. Selon des sources proches du dossier, l'étudiant algérien venait de terminer un master 1 en informatique et était bien noté. Mais il ne parvenait pas à trouver un stage qui lui aurait permis de valider son cursus. "Il y a eu beaucoup de stages annulés à cause du Covid-19", a expliqué Jean-Marc Ogier, président de l'université de la Rochelle. Ce responsable a, par ailleurs, indiqué que la victime avait fait une demande de dérogation pour passer directement en master 2. Ce qui allait être accepté, d'après lui. Réagissant au drame, Fouad Miloudi, président de l'association Ecaf (Etudiants et cadres algériens en France), évoque une épreuve terrible. Même s'il ne connaît pas encore les raisons qui ont poussé son compatriote au suicide, il estime qu'il est nécessaire de prévenir des fins aussi tragiques en mettant en place des dispositifs de soutien et d'accompagnement au profit des étudiants algériens en France. En 2015, deux jeunes autres compatriotes, qui poursuivaient leurs études en France, avaient mis fin à leurs jours. Des organisations de la diaspora se sont alors mobilisées pour alerter sur les conditions de vie très difficiles d'un certain nombre d'étudiants qui, parfois, n'arrivent plus à se nourrir et à régler leurs loyers. "La plupart des inscrits rallient la France sans avoir conscience des difficultés qui les attendent. Ils ramènent des sommes d'argent qu'ils consomment très rapidement et doivent souvent se débrouiller pour trouver un logement après avoir été hébergés pendant une courte période par des proches", explique le président de l'Ecaf. Les nouveaux arrivants sont également très peu informés du déroulement des démarches administratives qui s'avèrent souvent très compliquées. En cause, des conditions de séjour particulières, régies par les accords algéro-francais de 1968 sur la circulation des personnes. Ces accords sont décriés par les organisations étudiantes algériennes de France car ils sont considérés comme très discriminatoires. Pour pouvoir accepter une offre d'emploi par exemple, nos jeunes compatriotes doivent d'abord obtenir une autorisation de la préfecture. La procédure qui peut prendre des mois entrave naturellement l'accès des étudiants au marché du travail. Les Algériens sont également beaucoup moins privilégiés pour ce qui concerne le temps de travail autorisé. En outre, leur accès aux services sociaux et aux logements universitaires est très limité. La crise sanitaire du coronavirus a rendu encore plus difficiles les conditions de vie de nos étudiants en France. Les offres d'emploi et de stages se sont raréfiées. Pour soutenir les individus en grande précarité, l'Ecaf, l'UEAF ou encore l'Adra (Association des Algériens des deux rives et leurs amis) ont organisé, ces derniers mois, des opérations de solidarité, incluant la distribution de colis alimentaires et la création de cagnottes en ligne. Il est à rappeler que 31 196 étudiants algériens ont été inscrits dans l'enseignement supérieur en France en 2019. Outre les autorités algériennes, l'Adra accuse Campus France de valider les inscriptions sans informer leurs titulaires sur les conditions d'accueil et les difficultés qui les attendent. "Les étudiants algériens doivent être informés de leurs droits et sensibilisés aux conditions de vie en France", demande un responsable de l'organisation.