De nombreux bénéficiaires attendent toujours de percevoir cet argent sans que personne soit en mesure de leur expliquer les raisons de ce retard qui ne fait qu'aggraver leur situation déjà bien difficile. Le décret exécutif portant allocation d'une aide financière de 30 000 DA à certains métiers impactés par les effets de la pandémie de Covid-19 a été publié au dernier Journal officiel n°44. Signé le 30 juillet dernier par le Premier ministre Abdelaziz Djerad, ce décret a "pour objet l'allocation d'une aide financière au profit des personnes exerçant certains métiers impactés par les effets de la pandémie de coronavirus". L'aide financière a été fixée à un montant de 30 000 DA par mois. Elle est servie pour une période de trois mois en compensation du manque à gagner, lié à la période du confinement sanitaire. Il se trouve que la plupart des bénéficiaires attendent toujours de percevoir cette somme salvatrice sans comprendre les raisons du retard. L'impact de la pandémie est pourtant facile à évaluer pour la simple et bonne raison que pendant plusieurs mois, les catégories concernées n'ont pas du tout travaillé. Pis encore, rideau baissé, la plupart n'ont pas été en mesure de payer leurs employés qu'ils ont, pour certains, perdus. "N'étant pas en mesure de payer mes deux employés, j'assistais impuissante devant leur départ et leur reconversion", a déploré Hassina M., coiffeuse. Et de poursuivre : "J'ai mis des années à les former pour pouvoir en faire des professionnelles et cela a nécessité un investissement en temps, en effort et en argent. Comment les pouvoirs publics vont quantifier tout ce préjudice aujourd'hui que je me retrouve seule et obligée de repartir à zéro alors que ma santé ne me le permet plus." Un autre artisan témoigne à son tour d'une situation des plus déplorables : "Les choses n'étaient pas faciles même auparavant pour écouler notre marchandise. Avec la pandémie, j'ai dû cesser toute activité en renvoyant mon apprenti que je ne pouvais plus payer. J'étais, pourtant obligé de m'acquitter du loyer et de toutes les autres charges alors que je ne faisais rentrer aucun sou et cela m'a achevé. Aujourd'hui, j'attends encore ces 30 000 DA par mois qui ne vont couvrir qu'une partie de l'argent emprunté à ma famille pendant la période de confinement, mais je ne vois rien venir alors que j'ai fourni le dossier comme il se doit. Je ne comprends rien. Le Président avait pourtant dit ‘avec effet immédiat' ou je me trompe ?" Chauffeur de taxi, Chafik n'en démord pas : "Il y a vraiment anguille sous roche. Ce n'est pas normal qu'on puisse tarder autant pour nous remettre cette aide. Les choses sont pourtant claires. Nous avons enregistré une perte sèche vu que nous étions interdits d'activité." Sollicité à ce propos, Hadj Tahar Boulenouar, président de l'Association nationale des commerçants et artisans (Anca), nous a fait part de son inquiétude quant à l'octroi de cette aide financière qui, selon lui, connaît "un véritable cafouillage". Il explique : "Il est vrai que certaines personnes ont perçu cette aide, mais la plupart patientent encore alors qu'elles sont dans le besoin. Il se trouve que certains responsables locaux, eux-mêmes, n'ont pas compris si l'aide de 30 000 DA est prévue pour un mois ou pour les trois mois réunis." Il poursuit : "L'opération accuse aussi un retard parce qu'ils sont nombreux à s'être manifestés en retard pour s'enregistrer, remplir le formulaire et constituer le dossier." À noter que les bénéficiaires doivent s'adresser aux Chambres de commerce s'ils disposent d'un registre du commerce ou alors aux Chambres de l'artisanat pour les artisans. Ils peuvent aussi s'approcher des organismes professionnels comme l'Anca pour les orienter et les aider à accomplir les démarches. Il se trouve que l'information a très mal circulé et bon nombre de personnes se sont heurtées à des obstacles. "Au début, je ne savais même pas à qui m'adresser, et lorsque j'ai réussi à avoir l'information, qui n'a jamais été claire à ce propos, on m'a dit qu'ils avaient clôturé les listes. C'est tellement injuste...", s'élève le président de l'Anca.