Pas moins de 3 400 migrants de plusieurs nationalités ont été "expulsés" depuis le mois de septembre par les autorités algériennes, renvoyés au Niger dans des conditions "illégales", a dénoncé, vendredi, l'ONG de défense des droits de l'homme, Human Rights Watch (HRW) dans un rapport publié sur son site. "Depuis le début du mois de septembre, l'Algérie a expulsé plus de 3 400 migrants d'au moins 20 nationalités différentes vers le Niger, dont 430 enfants et 240 femmes", lit-on dans le document de cette ONG qui a recueilli des témoignages de migrants qui auraient été "violentés", "délestés de leurs biens", "poussés à marcher dans le désert" ou encore "arbitrairement placés en détention". Selon cette organisation, plusieurs rafles contre les migrants à Tlemcen, Oran, Alger, Blida, Boumerdès, Tipasa, Zéralda, Sétif ou encore à Annaba ont eu lieu ces dernières semaines, et à chaque fois, constate le rapport, les forces de sécurité "ont séparé des enfants de leurs familles" ou encore "dépouillé les adultes de leurs biens". "L'Algérie a, certes, le droit de protéger ses frontières, mais pas de placer en détention arbitraire et d'expulser collectivement des migrants, dont des enfants et des demandeurs d'asile, en l'absence de procédure régulière", a déclaré Lauren Seibert, chercheuse auprès de la division Droits des réfugiés et migrants de l'organisation. Ces "expulsions", constate encore HRW, marquent la plus forte hausse de ce type d'opérations depuis le début de la pandémie de Covid-19 en mars. Elles portent ainsi le nombre de personnes expulsées "sommairement" vers le Niger cette année à plus de "16 000", dont un peu plus de la moitié sont des Nigériens. Signataire des conventions internationales sur les migrants ou encore sur les réfugiés, l'Algérie, rappelle l'ONG, est tenue de respecter le principe de non-refoulement. Contacté par Liberté, l'expert en flux migratoire et spécialiste de la sécurité au Sahel, Hacène Kacimi, rejette le mot "expulsion", puisqu'il s'agit, selon lui, d'une "reconduction aux frontières". "L'Algérie est dans son droit de réguler la migration comme cela se fait d'ordinaire dans le monde entier, en Europe notamment", soutient-il. Pour lui, il s'agit d'une procédure tout à fait légale, mais particulièrement motivée par la situation sanitaire dans le pays, après la découverte, récemment, de plusieurs cas de malaria. "Nous sommes sûrs aujourd'hui que ces cas de malaria, maladie éradiquée dans notre pays, nous ont été importés à travers les flux migratoires", explique-t-il en indiquant, par ailleurs, que "50 000" migrants se trouvent aujourd'hui sur le sol algérien de manière irrégulière. "C'est un chiffre préoccupant. Aucun pays européen n'accueille autant de migrants ! L'Algérie doit réguler sa migration comme cela se fait ailleurs", a-t-il ajouté, en dénonçant les conclusions de rapports pas "innocents" des différentes ONG qui "accablent à chaque occasion l'Algérie".