La perspective d'une dévaluation plus soutenue du dinar, désormais clairement assumée par le gouvernement, a suscité l'hostilité des membres de la Chambre basse du Parlement. Hier, à l'Assemblée, les députés ont, à l'unanimité, critiqué le projet de loi de finances pour 2021. Outre la perspective de l'érosion du pouvoir d'achat de la monnaie nationale, contenue dans le projet de budget pour 2021, les membres de la Chambre basse du Parlement étaient vent debout contre la passivité du gouvernement face au creusement des déficits, alors que les moyens à même d'y faire face sont insuffisants. Quand tout va mal et que cela semble être occulté par les statistiques officielles, la critique finira par provenir même de ceux qui étaient jusqu'ici acquis aux politiques du gouvernement. C'est-à-dire qu'en l'absence, hier, des partis de l'opposition à l'Assemblée, le gouvernement n'était pas pour autant en terrain conquis, puisque les députés de la majorité n'ont pas hésité à le descendre en flammes, allant jusqu'à lui faire porter l'échec des stratégies de parade contre le double choc coronavirus-chute des prix du pétrole. Meriem Messaoudani, députée du MSP, pointe la "détérioration ininterrompue des indicateurs macroéconomiques du pays", accusant le gouvernement de passivité, tant il est vrai que son projet de loi de finances 2021 "est complètement dépourvu de mesures à même de remédier à la double crise qui secoue le pays", voire "porteur de statistiques ne reflétant point la gravité de la situation, ce qui témoigne du déficit de courage politique, voire de responsabilité chez le gouvernement". Les députés ont évoqué à l'unanimité une forme de tromperie sur la marchandise en évoquant le projet de budget pour 2021. C'est-à-dire qu'il y a absence totale de mesures anti-crise et de visibilité quant à la manière par laquelle l'économie nationale pourrait réagir à l'état de tarissement des ressources et au creusement des déficits. "Nous invitons ce gouvernement à s'expliquer sur les moyens par lesquels il entend couvrir les déficits du prochain exercice, alors qu'il ne cesse de crier sur tous les toits son refus de recours à la planche à billets", s'interroge Salah-Eddine Dekhini, encarté RND, soulignant "l'absence de transparence dans l'action du gouvernement face à la crise". La même interrogation taraudait l'esprit d'Abdelghani Ouicher, député sans appartenance politique, qui a relevé l'insoutenabilité du déficit budgétaire qui caracole, selon lui, à près de 22 milliards de dollars, tout comme le déficit du Trésor qui était couvert, jusqu'ici, en partie par les apports de la planche à billets. Le même député n'a pas omis de relever les risques de conséquences néfastes de la dévaluation du dinar, rapportée dans le projet de loi de finances 2021, aussi bien sur les ménages que sur les entreprises. "La dévaluation du dinar n'est pas dans l'intérêt du citoyen", estime, de son côté, Kheira Bounaâdja du Front de libération nationale (FLN). Le projet de loi de finances 2021 prévoit, faut-il le rappeler, un glissement progressif de la valeur du dinar ; celle-ci devrait atteindre 156,78 DA/1 dollar en 2023. "Le recours du gouvernement à de pareils artifices et son éternel pari sur une improbable reprise des cours du pétrole renseignent sur son incapacité à concevoir une économie hors hydrocarbures", estime Chabane Ouaer, député sans couleur politique.