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"Les techniciens ont été sous la pression des politiciens"
Azzeddine Madani, docteur en aménagement du territoire
Publié dans Liberté le 04 - 01 - 2021

Dans cet entretien, le professeur Azzeddine Madani évoque l'origine des malfaçons, des retards et des surcoûts qui ont marqué la réalisation du projet de l'autoroute Est-Ouest. Selon lui, l'autoroute a été ouverte à la circulation, alors que beaucoup de choses manquaient du point de vue des normes de sécurité, notamment la signalisation routière, la visibilité durant la nuit et les stations-service et de repos.
Liberté : L'autoroute Est-Ouest subit de nombreux sinistres qui engendrent d'énormes dégâts et sont un véritable calvaire pour les usagers. Quelle est l'origine de ces malfaçons qui induisent des surcoûts d'entretien exorbitants ?
Azzeddine Madani : L'autoroute Est-Ouest a été réalisée d'une manière rapide et le tracé a été modifié dans plusieurs tronçons à cause de la topographie du terrain et du temps que peuvent prendre les travaux de réalisation, ce qui montre que les études initiales manquaient de maturation. Il ne faut pas oublier aussi que les entreprises, sous la pression des délais de réception et des changements qui s'opèrent dans les études, réalisent vite ce qui cause parfois des anomalies apparaissant après un certain temps.
La qualification des entreprises est aussi à prendre en compte, puisqu'elle joue un rôle important dans la qualité des travaux. Cette autoroute a été ouverte à la circulation, alors que beaucoup de choses manquaient sur le plan des normes de sécurité, en particulier la signalisation routière, la visibilité durant la nuit, ainsi que les stations-service et de repos.
Le problème est qu'il y a eu un conflit des prérogatives influant négativement sur le volet politique et technique. Les spécialistes techniques ont été sous pression des politiciens qui cherchaient à mettre en service très rapidement cette autoroute. D'ailleurs, ce conflit des prérogatives qui existe aussi dans d'autres secteurs doit cesser pour laisser les techniciens faire leur travail selon les normes et loin des pressions.
La réalisation de ce projet a connu des retards flagrants qui ont engendré plusieurs réévaluations financières. Avec l'achèvement prévu du dernier tronçon, le coût global de cet investissement avoisinerait les 20 milliards de dollars. Quelle appréciation faites-vous quant aux immenses fonds publics engloutis dans ce projet ?
Le coût global de ce projet est considérable et cela est essentiellement lié à la topographie très accidentée dans une partie du centre et à l'est du pays et aux sous-estimations dans les études de départ. Le coût du kilomètre d'autoroute grimpe à travers les années et la comparaison entre les pays est difficile à faire puisque des critères techniques et la qualité de l'infrastructure (ouvrages d'art...) sont à prendre en compte, en particulier les normes de classification des sites faciles, difficiles et très difficiles.
Aussi, il ne faut pas oublier, comme je l'ai précédemment mentionné, le conflit des prérogatives lorsqu'un politicien ou un responsable impose sa vision et propose de faire d'autres travaux, comme par exemple prévoir une pénétrante ou suggérer des modifications, ce qui engendre une nouvelle enveloppe financière.Cette autoroute a été réalisée assez loin du concept d'acceptabilité en matière de pénétrantes vers les villes et autres services, alors que les grands projets doivent suivre ce concept.
Ces irrégularités mettent surtout en cause la stratégie des pouvoirs publics dans la planification, la maturation et le lancement de ce projet. Comment analysez-vous cet état de fait ?
Il faut reconnaître que les deux secteurs des travaux publics et des transports n'arrivent pas encore à bien cadrer le territoire national quant à la stratégie et à la planification selon les orientations du schéma national d'aménagement du territoire et des autres outils de planification, ainsi qu'en matière d'adaptation aux imprévus qui peuvent survenir. Il y a aussi d'autres paramètres qui ont influé négativement sur la mission de suivi et de contrôle de l'Etat sur les grands projets.
Il s'agit de cette grande migration du personnel technique qualifié vers le secteur privé pour une meilleure rémunération. Un ingénieur très qualifié ne peut pas accepter un salaire ordinaire, lui qui contrôle des projets à plusieurs millions d'euros, alors que ses confrères dans le secteur privé perçoivent de 5 à 10 fois plus que son salaire. En revanche, les nouvelles recrues manquent d'expérience et de formation continue pour se mettre à niveau avec les nouvelles techniques et garantir une bonne mission de contrôle des travaux.
La forme des plaques de signalisation dans cette autoroute Est-Ouest, différentes d'une wilaya à une autre, est un indice de l'absence d'une stratégie nationale de sécurité routière efficace et d'une signalisation uniforme. Le problème ne se pose pas uniquement pour l'autoroute Est-Ouest, mais aussi pour tout le réseau routier qui connaît également des dégradations sur plusieurs tronçons.
En outre, les zones frontalières entre les wilayas éprouvent des difficultés pour entretenir les routes communes à cause d'un manque de coordination et de gestion collective. Je pense qu'il reste beaucoup à faire dans les deux secteurs des travaux publics et des transports pour rattraper un retard énorme par rapport aux nouvelles orientations mondiales concernant le transport durable.
Des experts s'accordent à dire que l'autoroute Est-Ouest ne répond pas aux normes universelles de sécurité et de commodité. Cela n'a pas empêché les pouvoirs publics de prévoir l'ouverture de stations de péage avant fin 2021. Pensez-vous que cette décision est opportune ?
Le système de péage dans les autoroutes varie d'un pays à un autre. Certains pays utilisent le paiement par vignette sous forme d'abonnement annuel, d'autres optent pour le paiement par kilomètre à parcourir.Les prix à appliquer varient selon le tronçon à traverser, suivant la politique du secteur du transport.
Les tarifs sont également liés à la qualité et à la sécurité qu'offre l'autoroute à ses usagers. Pour l'autoroute Est-Ouest, le péage peut être symbolique et des plus bas, puisque déjà les usagers paient une vignette annuelle. Cela peut se faire par un petit ajout dans le prix de la vignette actuelle qui offre aux usagers le droit de circuler dans un cadre forfaitaire. Donc, un choix entre la vignette ordinaire et la vignette avec accès à l'autoroute.
Pour les usagers qui circulent rarement sur l'autoroute, ils prennent la vignette ordinaire et paient uniquement la distance à parcourir. Je pense que ces stations de péage très coûteuses dans leur réalisation, en plus du personnel qu'elles exigent pour leur fonctionnement, auraient pu être évitées et remplacées par un petit forfait à ajouter au montant de la vignette actuelle.
En Algérie, le mode de transport par route domine, et ce n'est pas un choix pour les voyageurs ou les transporteurs de marchandises, puisque les autres modes de transport ferroviaire et aérien sont encore loin de répondre aux exigences requises.
Ainsi, cet engouement pour la route ne doit pas constituer une raison pour instaurer le péage dans le but de glaner des sommes d'argent nécessaires pour l'entretien et la maintenance du réseau autoroutier. Si c'est cela l'objectif, il faut penser sérieusement et rapidement à développer les deux autres modes de transport (ferroviaire et aérien) pour offrir plus de choix à la population et réduire la charge sur l'autoroute.
Ce qui réduirait aussi les frais d'entretien. Cette question de péage nécessite une étude bien détaillée qui prend en compte le contexte du pays et plusieurs autres paramètres. L'autoroute Est-Ouest est marquée par des dégradations qui rendent la circulation très dangereuse et moins fluide dans certains endroits.
En plus, les usagers perdent beaucoup de temps dans les embouteillages à la suite des travaux d'entretien, des accidents de la circulation et à des points de contrôle, lesquels peuvent prendre d'autres formes d'aménagement pour donner plus de fluidité à la circulation.
Vu l'état actuel de l'autoroute, je pense qu'il serait préférable de retarder le péage encore pour un certain temps, et ce, jusqu'à l'amélioration et l'entretien des tronçons dégradés, afin d'offrir plus de fluidité, plus de sécurité et de services adéquats aux usagers.

Entretien réalisé par : BADREDDINE KHRIS
Une autoroute de corruption
Sept fonctionnaires et hommes d'affaires sont interpellés, en 2008, par les services de sécurité dans le cadre d'une enquête d'information sur des faits de corruption avérés autour de l'autoroute Est-Ouest. L'enquête concerne également Amar Ghoul, ministre des Travaux publics, et son ancien collègue des Affaires étrangères Mohamed Bedjaoui, tous deux proches de l'ancien chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika.
Des peines de prison allant d'un an avec sursis à 20 ans de réclusion, ainsi que trois acquittements ont été prononcés en mai 2015 contre 23 personnes morales et physiques impliquées dans cette affaire de corruption, dont le procès s'est déroulé au tribunal criminel d'Alger. Quinze personnes et 7 entreprises étrangères étaient impliquées dans cette affaire. Une amende de 5 millions de dinars a été infligée à chacune des 7 entreprises étrangères impliquées dans cette affaire : Citic CRCC (Chine), Cojaal (Japon), Pizarroti et Caraventa (Suisse), Isolux Corsan (Espagne), Smin (Canada) et Coba du Portugal.
Une peine de 20 ans de réclusion a été prononcée par contumace à l'encontre de Kouidri Tayeb, un consultant financier en fuite à la fin du procès. Une peine de 10 ans assortie d'une amende de 3 millions de dinars a été prononcée respectivement contre le principal accusé, Chani Medjdoub (conseiller de Citic CRCC), et Khelladi Mohamed (directeur des nouveaux programmes de l'Agence nationale des autoroutes). Le premier pour corruption et blanchiment d'argent, le second pour trafic d'influence, corruption et dilapidation de deniers publics.

B. K.


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