"La révision de la politique des subventions de l'Etat en vue de cibler les catégories sociales qui en ont le plus besoin interviendra au plus tard le deuxième semestre de 2021", avait annoncé, en janvier dernier, le ministre des Finances, Ayman Benabderrahmane. Le ministre a révélé que l'enveloppe destinée au soutien social au titre du budget 2021 avait été portée à 17 milliards de dollars, soit 1 960 milliards de dinars. "Il n'est pas normal que les catégories aisées acquièrent les produits subventionnés au même prix que les citoyens à faible revenu", a-t-il estimé, relevant "une injustice" dans la répartition de ce soutien. La manne pétrolière et gazière aidant, la redistribution de la rente est devenue l'élément-clé des politiques publiques. L'Etat, de manière volontariste, a consacré, et continue de le faire, une part substantielle des ressources publiques aux subventions des prix des produits alimentaires (céréales, lait, huile, sucre...), des carburants, de l'eau, des médicaments, des logements, etc. La chute du prix du pétrole, depuis le début du deuxième semestre de l'année 2014, a remis au goût du jour la question des subventions et de la nécessité de les revoir. L'inconvénient des subventions actuelles, outre leur poids démesuré dans le budget de l'Etat, est leur inefficacité et les distorsions qu'elles engendrent. Elles sont généralisées. C'est-à-dire qu'elles ne profitent pas spécifiquement aux ménages les plus défavorisés. Les subventions actuelles génèrent également des externalités négatives. Mais de nombreuses voix se sont élevées pour s'interroger sur la volonté réelle du gouvernement algérien de prendre les mesures qu'impose l'état des finances publiques. Pourtant, les pouvoirs publics ont sollicité en 2018 une aide technique de la Banque mondiale dans le but de mettre en œuvre un outil de ciblage des familles à revenu modeste, afin de rationaliser les dépenses publiques. L'alibi du besoin préalable d'une base d'information de ciblage ne tient pas la route, avait estimé le think tank Nabni, qui avait soumis au débat deux solutions alternatives "permettant de couvrir bien plus largement la population, plus rapidement, avec des risques d'exclusion beaucoup plus faibles des plus démunis". Mais pour certains observateurs, le gouvernement en mal de légitimité ne souhaite pas, dans les conditions actuelles, aggraver le mécontentement social. L'Algérie aurait pu tirer le meilleur parti de son épargne consistante pour opérer, graduellement, la révision de sa politique de soutien. L'expérience ayant démontré que les réformes structurelles sont plus acceptées socialement et moins coûteuses politiquement lorsque le pays dispose d'une marge de manœuvre budgétaire. Aujourd'hui, l'Algérie n'a plus cette marge de manœuvre. Cependant, retarder davantage la réforme des subventions exposerait l'Algérie au risque de devoir l'engager plus tard de manière abrupte et coûteuse socialement. Une telle réforme exige de meilleurs filets de protection sociale, un système de transferts monétaires qui sert ceux qui sont dans le besoin et une stratégie de communication de grande envergure.