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"CETTE PANDEMIE NOUS IMPOSE DE VIVRE DES SITUATIONS TRÈS PARTICULIÈRES"
FATIMA-ZOHRA SEBAÂ-DELLADJ, PROFESSEUR EN PSYCHOLOGIE
Publié dans Liberté le 22 - 08 - 2021

L'Humanité doit se préparer à affronter non seulement d'autres vagues, mais aussi d'autres virus, d'autres maladies, ainsi que des catastrophes naturelles. Tout cela générera beaucoup d'angoisse, d'anxiété et impactera négativement notre désir de vivre et de nous projeter dans l'avenir", prévoit le professeur Sebaâ-Delladj.
Liberté : L'Algérie est confrontée aux affres de la pandémie depuis 18 mois. Quelles sont les séquelles que la peur et l'angoisse peuvent générer sur les personnes ?
Fatima-Zohra Sebaâ-Delladj : Pendant presque deux ans, cette pandémie, qui touche la planète dans son ensemble, nous impose de vivre des situations sociales, économiques et psychologiques très particulières. Et comme on peut le constater, on ne s'y habitue pas. Chaque pays, chaque population et chaque individu va essayer de trouver les moyens d'affronter cette crise sanitaire en fonction de ses compétences et de sa capacité de résilience. Je pense sérieusement que l'humanité doit se préparer à affronter non seulement d'autres vagues, mais aussi d'autres virus, d'autres maladies, ainsi que des catastrophes naturelles. Tout cela générera beaucoup d'angoisse, d'anxiété et impactera négativement notre désir de vivre et de nous projeter dans l'avenir. Nous verrons l'apparition de tableaux dépressifs de plus en plus nombreux chez les adultes, mais aussi chez les enfants et les adolescents.
Notre quotidien, étant profondément modifié par les gestes barrières faits de distanciation physique et donc d'absence de gestes affectueux, ne peut plus être rassurant et sécurisant. L'absence ou la modification de pratiques sociales, rites et traditions qui régulaient et canalisaient nos angoisses, va demander à l'individu des efforts supplémentaires pour faire face aux angoisses multiples, au deuil et à l'absence.

Comment traverser cette pandémie avec le moins de dégâts possibles sur la santé mentale ?
Des répercussions négatives de cette pandémie sur la santé mentale, il y en aura certainement. Il y en a déjà et le mieux que nous puissions faire est de prévenir. Cela peut aller des troubles mineurs du comportement, comme la manie de la propreté, les tocs (troubles obsessionnels compulsifs), la déprime, etc., jusqu'aux dépressions graves, aux tentatives de suicide, aux bouffées délirantes... La prévention qui consisterait à reconnaître ces troubles, à les dépister et à les prendre en charge avant leur aggravation est un travail à mener auprès des enfants dans les écoles, auprès des parents, des jeunes et des personnes âgées.
Il est impératif que dans toutes les unités Covid à travers le pays, les psychologues puissent faire un travail de dépistage et de soutien des personnes qui en ont le plus besoin, afin que ne se développent pas de troubles psychologiques graves et durables. Il s'agit, dès à présent, de mettre en place des mécanismes d'orientation et de suivi des personnes vulnérables. À titre d'exemple, les unités de dépistage et de suivi de santé scolaire doivent pleinement jouer leur rôle, qui consiste à améliorer la santé des enfants scolarisés tout en détectant et en prenant en charge ceux qui sont atteints de maladies ou de troubles psychologiques, afin de les orienter pour un suivi régulier vers des centres spécialisés.

Qu'en est-il des enfants justement ?
Malheureusement, les enfants et les adolescents sont les grands oubliés dans ce genre de situation. Ils sont face à des parents désemparés, inquiets et leur quotidien est bouleversé.
On pense souvent, à tort, qu'ils sont bien chez eux, qu'ils jouent, mangent et dorment sans trop se poser de questions... C'est faux ! Un enfant (de moins de 18 ans) réfléchit à ce qu'il vit, se pose des questions et est fortement impacté par ce que ses parents ou les adultes qui l'entourent vont vivre. Il sera en état de stress permanent et d'inquiétude si on ne communique pas avec lui, si on ne lui permet pas d'une manière ou d'une autre de verbaliser... Et ce, quel que soit son âge, avec des modes d'expression différents, mais que nous devons entendre pour y répondre de manière appropriée et éviter le "nœud" qui empêchera le développement harmonieux de ses capacités intellectuelles et affectives.
De plus, comment favoriser le passage à une socialisation "réussie" si, à l'extérieur, les autres sont perçus comme porteurs de danger ? Comment continuer à transmettre aux enfants les valeurs de solidarité ou d'entraide tout en leur demandant de se méfier des autres, de ne pas s'en approcher, etc. Il faudra pour tous les éducateurs (parents, enseignants, imams) de faire preuve d'imagination pour revisiter certains principes éducatifs et ne pas contribuer à accroître ou à transmettre leur malaise aux enfants/adolescents.

Quel regard portez-vous sur le rôle joué par les pouvoirs publics dans la gestion de la pandémie, notamment dans son volet soutien psychologique aux malades et à leurs familles ?
La réponse à la crise sanitaire de la part des pouvoirs publics relève d'un paradoxe. D'un côté, elle implique un rôle central du gouvernement qui consiste à coordonner la lutte contre le virus, à fixer la stratégie et à mobiliser toutes les ressources nécessaires. Mais la notion de crise sanitaire est l'indice qui montre que l'Etat ne peut pas tout, ou du moins pas tout seul.
D'abord, parce que l'Etat ne sait pas tout face à un virus encore très méconnu et qu'il doit se tourner vers une expertise scientifique qui devrait être indépendante par rapport aux injonctions politiques de quelque nature qu'elles soient. Il a également besoin de la mobilisation et de l'engagement de l'ensemble des acteurs sociaux dont le comportement et l'engagement conditionnent le succès ou l'échec de toute stratégie. Par conséquent, la confiance des citoyens dans leur système politique (et pas uniquement le secteur de la santé) est un facteur déterminant, car c'est précisément cette confiance qui va permettre les réponses sanitaires attendues à travers des comportements adéquats, tels le respect des gestes barrières et la vaccination.
Avec les défis qui se présentent à nous à l'avenir (crise sanitaire, crise climatique), il s'agit impérativement de rompre avec certains codes et pratiques culturels néfastes, de lever les barrières hiérarchiques et géographiques, et ce, afin de mobiliser au mieux toutes les ressources nécessaires.

Existe-t-il en Algérie des mécanismes, des structures d'accompagnement des personnes en détresse ?
Les structures d'accompagnement existent, mais en nombre réduit et malheureusement de manière inégale dans tout le pays. Lors d'une stratégie précédente de lutte contre la drogue et la toxicomanie initiée par le ministère de la Justice, il était prévu la réalisation d'une cinquantaine de centres de prise en charge à travers tout le territoire. Pour des raisons multiples et variées, seule une dizaine a pu être réalisée dont très peu sont fonctionnels. Il ne suffit pas de construire des infrastructures. Encore faut-il penser un projet dans son ensemble : projet thérapeutique, formation du personnel, suivi multiple, etc.

Vous avez préconisé la réactivation et la redynamisation des Centres intermédiaires de santé mentale et des Centres d'intervention et de suivi du toxicomane. Quel sera précisément leur rôle dans ce contexte sanitaire ?
J'avais effectivement soulevé le problème de ces centres qui sont pour la plupart inactifs ou réduits au minimum sans véritable apport et soutien à la population. La mission de ces centres (instruction ministérielle du 5 mai 2002) est, entre autres, de constituer un relais entre les différentes structures de soins (unités de santé scolaire, hôpitaux psychiatriques, associations concernées, parents de malades, etc.) et d'assurer des activités de soins et de prévention. Pourquoi un bilan sans complaisance ne se fait-il pas pour comprendre les raisons de cet échec ? Pourquoi à chaque fois, à chaque crise, penser à la mise en place d'autres structures nouvelles, demandant des moyens financiers et humains que nous abandonnerons au bout de quelques années ? Ces centres seraient très utiles à la société actuellement si on leur en donnait les moyens, en formation, en recrutant du personnel qualifié et, surtout, en y croyant fermement. Militer pour une société plus juste, plus équilibrée, c'est aussi cela : croire à ce qu'on fait et travailler en créant des passerelles, et non en se fermant aux autres et à ce qu'ils peuvent apporter.
Vous appelez les pouvoirs publics à analyser la situation, afin de prévoir les potentielles incidences négatives sur la société et pouvoir limiter les dégâts. Comment mettre en place pareil dispositif ?
Nous sommes condamnés à travailler ensemble, chacun à son niveau et selon sa compétence et ses moyens. En ce qui concerne les associations par exemple, organisons-nous en réseau, sortons des grands centres urbains, mobilisons les adhérents autour de projets et, surtout, évaluons nos actions, afin d'évoluer et d'apporter efficacement notre pierre à l'édifice. Pour les différents secteurs ministériels, il s'agit de sortir de ce cloisonnement où chaque secteur défend son territoire. Combien de stratégies et de politiques publiques ont échoué ou sont tuées dans l'œuf car toutes les ressources n'ont pas été utilisées. Souvent, les partenariats ne sont que des relations de forme et non pas autour de projets montés ensemble. Je pense d'ailleurs qu'un des problèmes du dysfonctionnement des UDS (santé scolaire) vient de l'inexistence de véritable coordination (sinon de forme) entre le ministère de la Santé et le ministère de l'Education nationale. Dans l'exemple cité plus haut sur la stratégie contre la drogue et la toxicomanie (à laquelle nous avons participé en tant qu'experts), l'évaluation a bien montré que l'intersectorialité n'existait pas vraiment. Chacun défend son pré carré.

Entretien réalisé par : SAMIR OULD ALI


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