Les praticiens se joignent aux parents d'enfants malades pour lancer un appel pressant aux autorités, leur demandant de venir en aide à cette catégorie fragile et parfois traumatisée, qui fait face à l'indifférence de l'administration et de la société. Des parents d'enfants autistes, des médecins, des psychologues, des orthophonistes, des psychopédagogues et des spécialistes intervenant dans le domaine se sont rencontrés lors d'une journée d'étude, organisée récemment à Bordj Bou-Arréridj. Dans cette wilaya à forte densité de population touchée, la pénurie de places et de moyens concerne aussi bien le secteur public que le secteur privé. La rencontre, organisée par l'Association nationale de l'autisme algérien (Anaa), bureau de la wilaya de Bordj Bou-Arréridj, a été l'occasion de soulever les contraintes afin de venir en aide aux parents d'enfants atteints d'autisme. Les intervenants ont été unanimes à dire que les difficultés sont nombreuses pour parvenir à une complète intégration sociale et professionnelle des personnes autistes. Mais la meilleure façon de résoudre un problème est de le poser et de chercher ensemble des solutions. Les participants à cette journée d'étude ont mis l'accent sur l'importance de connaître et de reconnaître ce handicap. Il est également impératif d'informer l'opinion publique, les parents, le personnel soignant, le personnel éducatif, les associations et toutes les structures concernées sur les méthodes de prise en charge des enfants autistes. L'attention a été attirée sur l'importance d'un accompagnement éducatif, pédagogique, individualisé et adapté en milieu ordinaire, hors du domaine de la psychiatrie vers lequel ils sont malheureusement trop souvent orientés. "Depuis la rentrée scolaire, notre association lutte pour l'intégration des enfants souffrant de troubles du spectre de l'autisme en milieu scolaire ordinaire. Il faut arrêter de penser que scolariser l'enfant ayant des troubles du spectre de l'autisme n'est pas rentable", lance avec rage une maman, membre de l'association locale. En effet, cette idée a longtemps faussé le protocole de prise en charge des handicapés de manière générale. Pour Salah Ameur, représentant de l'Anaa dans la wilaya de Bordj Bou-Arréridj, cette journée d'étude a pour objectif d'attirer l'attention du public et des professionnels intervenant sur la situation des personnes autistes ou présentant des troubles du spectre de l'autisme (TSA) et, surtout, de participer à leur inclusion en milieu ordinaire et scolaire. Le Dr Houda Boudaoui, orthophoniste, a affirmé que cette journée est une occasion d'aider à dépasser les préjugés et de changer le regard de la société sur les personnes souffrant de ce trouble incompris. Elle a estimé que c'est une maladie mal connue, appelant à la conjugaison des efforts pour aider les parents d'enfants autistes. "Le citoyen en général et la majorité des professionnels ont peu de connaissances objectives sur ce handicap qui altère les capacités de reconnaissance des expressions, des codes sociaux et affectifs et qui génère une hypersensibilité émotionnelle et des troubles du comportement", a-t-elle expliqué, rappelant l'importance de la communication pour faire face à cette maladie. "Isoler ces enfants est une erreur. Les méthodes pédagogiques destinées aux enfants autistes servent aussi aux autres enfants", a ajouté cette spécialiste en orthophonie, confirmant à l'occasion que parmi ces enfants certains sont en mesure de lire couramment, de parler et d'accomplir certaines tâches. Profitant de cette occasion, l'Anaa a appelé à ce que le versement de la pension de 10 000 DA que l'autiste perçoit à ses 18 ans soit avancée. "Les parents et l'autiste ont besoin de cette somme dès sa naissance. Ils ont besoin de cette pension pour les soins, pour les séances d'orthophonie et autres", dira la maman d'un enfant autiste. Et d'ajouter : "S'ils trouvent les ressources pour payer la formation de leurs enfants, ils n'arrivent pas à résoudre le problème du transport qui se pose avec gravité. Pour en venir à bout, l'un des parents sacrifie son travail, et c'est généralement la maman qui se porte volontaire." "Le rôle de la famille, et en particulier de la mère, dans la gestion de la santé et de l'éducation des enfants a été illustré à maintes reprises. Dans le cas de l'autisme, cet engagement dans l'accompagnement des enfants est encore plus flagrant. Elever un enfant autiste peut avoir un impact considérable sur la vie familiale en termes de stress, d'activité professionnelle, d'isolement et de conséquences financières. Aux difficultés quotidiennes partagées par l'ensemble des parents viennent s'ajouter des disparités d'ordre socioéconomique", a déclaré Salah Ameur, président de l'association des autistes de la wilaya de Bordj Bou-Arréridj. "L'éducation nationale et le secteur de la santé doivent reconnaître qu'ils ne peuvent pas régler les problèmes seuls. Mon fils de 7 ans est suivi par un psychologue cognitiviste. Le bénéfice qu'il en retire est évident, mais impossible pour le psychologue d'entrer à l'école car il n'y a pas d'autorisation ni de convention signée avec l'éducation", dénonce Slimane, le parent d'un enfant, qui ajoute : "Nous demandons simplement à l'éducation nationale de s'informer sur ce qui se fait ailleurs et d'être plus à l'écoute des parents." Les participants lancent un appel aux autorités pour leur responsabilité envers cette catégorie fragile et parfois traumatisée face à l'indifférence de l'administration et de la société. "La tutelle est appelée à les prendre en considération en les intégrant socialement, ce qu'ils estiment comme primordial pour leur développement, leur avenir, car les troubles autistiques cachent souvent une intelligence et un génie qui pourraient être exploités au lieu d'être étouffés", ont-ils conclu.