C'est la vie dans toute sa beauté et ses revers que chacun traverse dans le calme ou dans le tumulte ; autrement dit, toute existence est caractérisée par ses péripéties faite d'évènements heureux ou malheureux, de tristesse ou de joie, d'échecs malencontreux, de succès stimulants. On peut dire que la vie est un théâtre où malgré soi chacun joue son rôle, mais c'est un théâtre de tous les temps ou sans cesse renouvelé. Les acteurs sont ceux de la vie de tous les jours : des pâtissiers, des cuisiniers, des chômeurs, des voleurs, des bons à rien, des gens des affaires, des fonctionnaires, des retraités ; bref, des individus de toutes catégories représentant toutes les couches sociales et d'une façon ou d'une autre ils peuvent avoir une influence bénéfique ou néfaste sur le devenir d'une personne. Et quoiqu'on fasse, nous subissons, de près ou de loin, les autres au quotidien. Notre passé c'est notre vécu fait de nos années passées en famille, dans notre vie scolaire, nos relations dans notre famille professionnelle et nos rapports bons ou mauvais avec les personnes du quartier où on habite. L'ensemble des influences qui nous marquent à vie constitue notre passé. Et au fur et à mesure que le temps passe, ce passé prend de l'importance et fait apparaitre des marques indélébiles sur notre corps d'abord puis sur notre manière de penser, de travailler. Au fil du temps, tout individu évolue, c'est dans la nature humaine et en évoluant, on découvre normalement de nouvelles astuces pour relever son niveau de compétence au travail, savoir adapter son hygiène de vie par rapport à l'âge, améliorer ses capacités de langage, de raisonnement, et ses relations avec les autres. Donc il faut un long processus pour arriver à un niveau ou à un degré de maturité. Beaucoup se sont retrouvés exclus d'un groupe parce qu'ils n'ont pas su se maintenir dans leur rôle et la société est là-dessus sans pitié. Prenons un exemple de société, l'école où l'enfant est obligé de travailler pour se maintenir dans le circuit. Si tout va bien, il poursuit son cursus jusqu'à l'obtention du diplôme qui sanctionne le premier pallier scolaire mais s'il y a défaillance l'élève est mis dehors, et l'exclusion est irréversible. S'il est de parents bien placés ou qui n'admettent pas facilement l'éviction de leur enfant hors du milieu scolaire, il est remis dans le même établissement ou ailleurs, mais vainement parce qu'il s'agit d'un enfant déconnecté. Au lycée et à l'université, c'est pareil, sauf que là il y a plusieurs metteurs en scène ou plusieurs chefs d'orchestre qui savent détecter le mauvais participant à évincer en cas de récidive. En milieu scolaire, on voit de toutes les couleurs : des élèves qui ne viennent jamais aux cours et qui le jour des examens tentent leur chance par la fraude, les indisciplinés qui font à leur tête, menacent souvent pour passer ou pour réussir et souvent réussissent la tête vide. A côté, il y a ceux qui tiennent à réussir au mérite, ils sont sérieux et cherchent à avoir leur diplôme par le travail, ceux –là ont compris que pour un avenir certain, il vaut mieux se prémunir de diplômes acquis honnêtement pour exercer efficacement un métier et avoir un parcours professionnel normal. Le milieu scolaire nous permet de comprendre que la vie est faite de différence, autrement dit que de différences entre les individus ! Chacun a son histoire personnelle faite de tous les événements heureux ou malheureux qui l'ont marquée, des problèmes vécus au quotidien, des rapports d'amitié ou d'inimitié qu'il a eu l'occasion d'avoir avec les autres, des disputes auxquelles il a pris part ou dont il a été témoin ; bref, de tous les faits dont il a été acteur ou victime. Mais ce passé varie selon les personnes qui elles mêmes n'ont pas le même vécu. On n'a pas la même configuration physique, morale et culturelle lorsqu'on a connu les guerres, les pires dangers ou lorsqu'on passé des examens dans les conditions difficiles par rapport à des individus dont le passé est fait de vie facile. On commencera par l'exemple d'une femme hors du commun, scolarisé en 1962, alors qu'elle arrivait du bled à l'âge de rentrer à l'école, c'était une aubaine pour la fillette ayant la chance d'habiter Alger-centre. Depuis, elle n'a jamais perdu son temps en travaillant avec ardeur, elle passe de classe en classe, subit avec brio l'examen d'entrée en 6ème qui lui donne accès au lycée et là, elle fait des merveilles puisqu' a toujours été la meilleure de sa classe et obtient son bac avec mention, uniquement par les cours du lycée, jamais elle n'a eu besoin de cours de soutien. Fille de parents modestes, le père avait tout juste le niveau du cours moyen qui lui donne la possibilité, à l'indépendance, d'avoir un poste de travail pour faire vivre la famille, quant à la mère, elle est ignorante. La fille est devenue grande mais habillée simplement. La voilà à l'université d'Alger avec le bac scientifique, elle s'oriente en physique et les études ont toujours été fructueuses, elle décroche le PCB, la licence puis le doctorat, et elle n'a jamais doublé une classe. Une fois tous les diplômes acquis honnêtement, elle est l'une des rares, pour ne pas dire l'unique fille à être arrivée au stade de la recherche. Quel bel itinéraire de fille simple mais super intelligente et un passé fructueux au terme duquel cette fillette ayant commencé par la 1ère année primaire a fini par devenir chercheur dans un domaine jusque là réservée aux hommes. Quel passé glorieux qui a fait d'une fillette habillée pauvrement, une grande femme épanouie heureuse d'avoir réussi et de s'être libérée de toutes les contraintes. Ces paroles de Kateb Yacine trouvent en elle leur pleine application : « Chez nous, une fille instruite vaut son pesant d'or ». Toutes les femmes instruites sont assez intelligentes pour vivre dignement et pour exiger le respect de ce qui leur est dû. Un autre cas atypique de passé qui a fait d'une personne une épave. Au départ, c'était un beau garçon qui avait fait de bonnes études qui auraient rendu le jeune homme heureux s'il s'était conduit sérieusement pendant ses années de labeur. Il occupait un grand poste de travail et il gagnait beaucoup d'argent au point de susciter des jalousies. Tout allait bien et il vivait dans l'abondance quand un jour il découvre par les mauvaises fréquentations la boisson qui a fait le malheur de bien des gens. Le monsieur bien habillé et bien nourri s'est mis à boire. Et d'année en année il buvait de plus en plus fréquemment et en plus grosses quantités si bien que l'organisme qui l'employait lui a donné des avertissements qui n'avaient servi à rien. Mais un jour il a été révoqué et il s'est retrouvé dehors comme tous les clochards. Réduit à travailler comme manœuvre ou journalier chez tout le monde, il vivait désormais misérablement allant jusqu'à tendre la main pour se procurer de quoi étancher sa soif et calmer son vice, une bouteille d'alcool. Cet individu a même essayé plusieurs fois de fonder un foyer. Aucune des femmes auxquelles il s'est uni n'a accepté de rester avec lui au-delà de deux mois. Elles l'ont toutes quitté pour de bon et sans regret. Cet individu s'est clochardisé pendant des décennies jusqu'à la fin de sa vie. Lorsqu'on regarde la vie de chacun, on se rend compte de la différence entre les individus et que chaque vie est une histoire dont on est en grande partie responsable puisqu' au fil du temps chacun commet des actes réfléchis ou irréfléchis déterminants pour la suite de la vie. Et incontestablement nous sommes ce que notre passé a fait de nous.