La cité hors du commun qu'est la localité de Kharaza, dans la commune de El Bouni dans la wilaya de Annaba est faite de bric et de broc. Si certains ne voient qu'un bidonville et de la misère, Kharaza est surtout un lieu de vie, depuis quarante ans. Un espace qui s'est développé avec pour mot d'ordre : la solidarité. Ce qui permet à ses habitants de vivre quotidiennement au contact d'établissements scolaires à l'état de ruine nantis d'équipements brinquebalants, conséquences de leur surutilisation depuis les années post-indépendance, des habitations faites de tôle et de zinc bâties sur un sol boueux au point de les rendre inaccessibles en période hivernale. Cette solidarité est également mise en relief par une alimentation électrique domestique très dangereuse réalisée grâce à des piquages clandestins, un éclairage public inexistant tout autant que l'eau potable, telle est l'image que présente la localité de «Kharaza». Elle est implantée dans la commune El Bouni, laquelle compte plus de 300.000 habitants. Il faut croire qu'en décidant ce dernier dimanche d'y effectuer une visite d'inspection et de travail, le wali Tewfik Mezhoud a fait le bon choix. Il était accompagné du président de l'Assemblée Populaire de wilaya, Abdelatif Beddiar. Cette visite lui a permis de découvrir les facteurs de la misère, pauvreté, chômage, malvie, délinquance, criminalité et bien d'autres aspects sociaux. Au fur et à mesure de ses contacts directs avec la population de ce bidonville enfoui au creux de la commune El Bouni, il découvrait des vérités telles que celle d'un cimetière squatté par des vivants composants des familles. Au fil de ses contacts avec les citoyens, le wali a pris note des aspirations de la population. Elles ont dépassé le stade de la demande sociale. Le logement décent et l'emploi y occupent une place prépondérante. Ce qui n'a pas empêché certains citoyens de parler de crime économique. A en croire les citoyens, le site de Kharaza et celui dans la commune de Sidi Amar, des terrains propriétés de l'État ont été spoliés et des entreprises publiques bradées. Les dénonciations ont été faites à haute voix par des jeunes et des pères de famille. Tous affirment disposer de preuves matérielles portant sur des faits de corruption et détournements. Ceux-ci se font sous diverses formes et techniques rodées, tant les auteurs sévissent dans le marigot de l'impunité. Au titre des autres méfaits cités par les citoyens, il y a des surfacturations des services ou commandes au bénéfice des institutions de l'Etat, des montages de documents administratifs pour des services fictifs et, pire encore, des détournements de fonds à coups de perdiem sous couvert de missions professionnelles. Une faille de la morale beaucoup plus qu'un simple défaut de management. Le wali a pris note, y compris celle de la réfection de l'établissement scolaire du moyen atteint de décrépitude et des tables pour élèves datant de l'après-guerre. Kharaza est devenue le point de repère pour tous ceux à la recherche d'un espace pour ériger une baraque pour créer une famille. Longtemps menacés d'expulsion, les habitants de cette localité ont résisté aux hommes et aux temps. «La solidarité nous permet de vivre en paix et sans véritable accroc. Il reste que le chômage et la malvie forment les deux fléaux qui incitent nos jeunes à chercher un moyen de vivre ou à souhaiter prendre le large. En cas de coup dure, notamment celle de prendre en charge un malade ou quelqu'un confronté à des difficultés, nous cotisons pour lui venir en aide», a affirmé Issam, le président du comité de quartier, s'adressant au wali et au P/APW en présence du chef de daïra, P/APC El Bouni et tous les membres de l'exécutif de la wilaya. Sur sa lancée, le même intervenant a dénoncé la dégradation sur 14 km de la seule route qui leur sert de liaison pour sortir ou rejoindre leur localité. Il a été également question de trafic du foncier impliquant des individus connus contre lesquels l'État semble être impuissant. La suite de la visite l'a confirmé. Avec le sentiment d'impunité mis en relief par l'absence sur le site des responsables de Batimétal en charge de la réalisation de la gare maritime qui traîne depuis des années. Il y a également cette multitude de reports de réception des travaux d'extension de la piste de l'aéroport Rabah Bitat, de la route touristique longeant la côte Cap de Garde/Oued Bakarat et ceux du pont « X ». Tant de projet pour lesquels une enveloppe financière de 8 milliards DA a été dégagée depuis des années qui n'a servi à rien.