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La recherche d'une vérité sur certains épisodes de la colonisation (XIV)
Lettre à René
Publié dans La Nouvelle République le 25 - 10 - 2021

À son ami René, mais en fait aux générations montantes, Kamel Bouchama rappelle ce qu'entraîna l'acte odieux adopté par le parlement français en janvier 1830. Hélas, cinq mois après, les hordes colonialistes, commandées par de Bourmont, débarquaient sur la presqu'île de Sidi Fredj, amenant ainsi l'Algérie à engager une lutte incessante pour son indépendance... L'avenir, dit l'auteur de « Lettre à René » en filigrane, appartient aux peuples qui le construisent ensemble, une fois soustraites les lourdeurs du passé. Là, où notre vieille garde militante n'a pas cru bon devoir consigner son témoignage, ce livre vient au bon moment. Il devrait de ce fait, être mis entre les mains de tous les jeunes.
Continuons avec d'autres éminences, sans trop nous appesantir sur leur passé et leurs œuvres, parce que ce n'est qu'une simple rétrospective du monde de la culture que je te livre pour te convaincre de l'extrême richesse et de la grande diversité de notre patrimoine. J'aurai peut-être l'occasion d'y revenir un jour, dans d'autres ouvrages, quand les circonstances seront plus favorables. Alors là, nous pourrions communiquer aisément et aller dans le sens des échanges intéressants et fructueux qui feront connaître à nos jeunesses, des deux pays, les trésors de science enfouis dans les deux rives de la «Mare nostrum». Oui, citons Ahmed Ibn Zekri Et-Tilimçani, spécialiste dans la scolastique, qui rédigea un chef-d'œuvre de 1500 vers intitulé «El Maraçid». Citons également Ahmed Ibn Abdallah El-Djazaïri qui en fit autant, dans une autre poésie intitulée «El Djazaïria» et qui fut commentée par cheikh Es-Senoussi, un grand savant du XVe siècle, Cheikh El Hadj Belkacem Ibn El-Husseïn, un érudit du Touat dont la généalogie remonterait au troisième calife de l'Islam, Othmane Ibn Affane, et qui laissa au XVIe siècle de nombreux ouvrages dont un sur «Et-Tewhid », un autre intitulé «Min-hej Es-Salikine», un troisième sur «Les prodiges du Prophète», un quatrième sur «Les rites du pèlerinage» et des dizaines d'autres sur les sciences religieuses et la pratique, la plus juste, de l'Islam. El-Hadj Ahmed Ibn Youcef, un autre savant de la même région, venu un siècle plus tard, se distingua par sa forte production en œuvres utiles conservées jusqu'à nos jours. Nous retrouverons après ces deux grands savants du Touat qui ont laissé, à l'instar de nombreux autres, une solide ambiance de culture dans cette région traditionnellement connue pour son érudition. Il ne faudrait pas le confondre avec Sid Ahmed Ben-youcef, le saint patron de Miliana qui, lui, vient du sud. Certains disent du Gourara, d'autres de la région de Mascara, quelques-uns prétendent qu'il est Andalou. Cet érudit servait Dieu, dispensait un enseignement moral et théologique et contribuait à l'amélioration du sort du Maghreb musulman où la désagrégation du pouvoir politique encourageait les ambitions expansionnistes des Portugais et des Espagnols qui prenaient pied sur ses rivages. Effectivement, de Miliana, il n'y a que son nom qu'on retient, alors que d'éminents savants originaires de cette ville ont eu à se distinguer, bien avant lui, dans les domaines de l'ascétisme, du droit musulman, de la philosophie et de la langue arabe. Nous citerons Abou El Abbes Ahmed Othmane Ibn Abdeldjebbar El Miliani (décédé en 1246 apr. J.-C.) qui a séjourné au Moyen-Orient et pris des contacts avec tous les savants de cette région. A son retour, il a enseigné la jurisprudence, la langue arabe et les fondements de l'ascétisme à l'université de Béjaïa. Il a été ensuite convié par Abou Zakaria Yahia, fondateur de la Dynastie des Hafçides pour être membre de son cabinet à Tunis. Il est enterré à Miliana. Nous l'avons cité à titre d'exemple pour dire que toutes les régions d'Algérie foisonnaient d'Hommes de lettres et de culture et que nous n'étions pas, avant la venue des colonialistes, un peuple rude et farouche qui ne pouvait concevoir le progrès et l'élévation, comme moyen de développement. Nous n'omettrons pas d'évoquer Abou Errouh Aïssa El-Melkaoui Ezzouaoui, maître de la «Fetwa» à El-Azhar, ensuite cadi de Naplouse et de Damas, Ibrahim Ibn Ykhlef El-Matmati Et-Tensi qualifié de maître de la «Fetwa» dans tout le Maghreb, Abou Ishaq Ibrahim, maître de conférences à la grande Mosquée de Tlemcen du temps du roi Yaghmoracen, Sidi M'hamed El-Kettani, un savant émérite, qui a créé l'Université d'Alger et dont un grand quartier de la capitale porte aujourd'hui le nom et autres Sidi Yahia El-Adli, Mohamed Cherif Ezzahar, Abou Abdallah Mohamed Ibn Mohamed El Djazaïri et Omar Ibn Mohamed El-Menguellati. Le XVIIIe siècle fut aussi resplendissant en culture à l'image des autres siècles. Les sciences islamiques, la philosophie, la grammaire, la poésie et la littérature furent au centre de toutes les disciplines dans les écoles et les grands instituts. De grands savants animèrent ce siècle qui fut aussi une période florissante où notre région devait connaître des incidences négatives dues aux grands bouleversements de l'Europe et à sa politique expansionniste. Mais restons cependant dans notre domaine, celui de la foi et de la culture et évoquons ceux qui brillèrent par leurs vastes connaissances. Nous avons à l'esprit Ahmed Ibn Kacem Ibn Mohamed Sassi El-Bouni qui produisit des œuvres remarquables, Ali Ibn Mohamed El-Djazaïri, compagnon du pacha d'Egypte l'Emir Ahmed et cheikh Mohamed Ibn El-Mabrouk El-Djaâfri El-Bidaoui, le savant du Touat que Abdelkader Ben Amar, l'historien de l'époque, évoquait en ces termes : «Ce fut un saint vénéré et un brillant savant qui fit ses études chez les doctes Sidi M'hamed El-Ouangali, Sidi Aoumeur Ibn Abdelkader et Sidi Abderrahmane Et-Tenlani».
Avant de quitter ce siècle aussi riche que les précédents dans le domaine de la culture, mais également mouvementé au niveau de la lutte pour la souveraineté nationale, nous n'allons pas omettre de citer deux grands savants qu'a connus le pays. Nous les prenons uniquement à titre d'exemple, seulement, pour confirmer que ce que nous disions sur ces hommes de foi et de culture n'était pas simplement une vue de l'esprit, mais que ces personnes illustres étaient effectivement des dignitaires dans leur domaine. Nous citerons Abou Ras de Mascara et Hamdan Khodja d'Alger. Peut-être aurons-nous l'occasion, plus tard, de parler de ces deux personnages avec plus de détails ?
Je m'arrête là, puisqu'il s'agit de ne citer que ceux qui ont vécu avant la période coloniale. Mais les autres, ceux qui viennent après, et qui sont aussi nombreux, eh bien, j'en parlerai, dans d'autres circonstances, peut-être meilleures, pour dire que malgré l'oppression et l'avilissement de notre peuple par les forces du mal, il existait une floraison de penseurs qui eurent le courage de braver le danger et de s'imposer pendant les moments les plus difficiles. Ce survol d'un domaine aussi vaste nous fait croire que la culture en général était le souci permanent des Algériens, et ce pendant les différentes époques. Elle représentait pour eux le noyau pur de la connaissance et de la perfection. Mon respecté professeur, le docteur Moulay Belhamissi, qui a beaucoup écrit dans ce qui relève de la science et de la culture dans notre pays, soulignait dans «la Revue des Médersiens», rapportant une déclaration de Abdel Basset Ibn Khalil El-Malti, lors de son passage à Alger en 1464 (ap. J.-C.) : « (...) Et lorsqu'il y a eu évolution dans le contexte politique, la population a augmenté dans la capitale Alger Beni Mezghenna, les mosquées et les lieux de prière se sont multipliés et les zaouïas ont pris beaucoup d'ampleur. De ce fait, sa réputation s'est grandement soignée et a dépassé les frontières du pays ; les poètes et les littérateurs se concurrencent et la langue arabe ne connaît pas de désagrément et n'est pas soumise à des contrôles. Il y a dans Alger une rue entière, spécialement réservée aux livres. On y trouve des exemplaires du Coran, des livres de hadiths, des ouvrages de théologie et de jurisprudence. Les nombreuses études de copistes, de traducteurs et de transcripteurs qui sont remplies de recueils et de commentaires, sont visitées par de nombreux étudiants et professeurs». Mohamed El-Fassi, ancien ministre marocain, du temps de Hassan II, disait de Béjaïa, à l'occasion du séminaire sur la pensée islamique tenu en avril 1974:
«A l'époque des Almohades, Béjaïa est l'une des capitales du grand Maghreb arabe par ses académies scientifiques fréquentées par des étudiants originaires de toutes les contrées du royaume almohade, andalou, marocains, tunisiens. Tous ceux qui partaient accomplir le pèlerinage et étudier en Orient transitaient par Béjaïa et y demeuraient, selon les circonstances, une petite ou une longue période. Aucune œuvre des savants bougiotes ne demeura lettre morte. Béjaïa a joué un grand rôle dans le transfert de la civilisation arabo-maghrébine en Europe par la Sicile et l'Italie...».
«Qalaât Beni Hammad ressemblait à Antioche», selon Ya-coute, dans son livre Mou'djem El Bouldane». Elle devint, juste après la chute de Kairouan, la capitale du royaume et Hammad en fit une base scientifique et économique.
Mahdia abritait la fameuse Maison de la science que Tamime, le fils du roi de Sanhadja, El-Mûïz Ibn Badis, eut l'initiative de reconstituer. Les Fatimides l'avaient transférée au Caire, bien avant sa venue. «De Mahdia, de nombreux ouvrages scientifiques furent traduits et prirent le chemin vers l'Europe», disait l'historien El-Mehdi Bouabdelli.
Quant à Georges Marçais, il écrivait dans l'encyclopédie islamique :
«De grandes relations commerciales et culturelles avec les riverains méditerranéens furent nouées grâce à Béjaïa. C'est d'ici que partit la civilisation du Maghreb oriental et ses arts vers l'Europe chrétienne par le truchement de la Sicile et de l'Italie. Nul doute que les palais de Palerme ont été inspirés, sur le plan architectural, des palais de Bejaia.» Enfin, un grand nombre d'auteurs ont célébré Tlemcen. Je ne peux les citer tous. Ce que je peux retenir de leurs témoignages c'est que cette ville florissante, où Dieu semble avoir répandu à profusion le bonheur de vivre, était alors élevée au rang de ville royale du temps des Béni Abd El-Wad et a connu un rayonnement intellectuel faisant d'elle une des cités où la vie culturelle était la plus intense dans tout le Maghreb central.
Il faut dire en outre que l'Islam a connu véritablement une apothéose grâce au développement de la culture, de l'éducation et des sciences sous la houlette de savants prestigieux. L'Algérie était le carrefour où abondaient de grands hommes qui brillèrent dans les sciences religieuses, la philosophie, la grammaire, la médecine, la physique et la métaphysique, à une époque où le pays connaissait une symbiose entre la culture africaine et andalouse. De grands saints ont légué à la société algérienne des repères culturels et spirituels évidents qui ont contribué avec le temps à mieux asseoir les fondations d'une nation jalouse de son identité. Abdelhak Ech-Bili, traitant de cette magnifique époque, montrait dans ses poèmes «une sanctification de la science à un point où il a dénié à l'ignorant toute attache avec l'Humanité». Cependant, cette activité culturelle et religieuse, qui devait se perpétuer encore pendant des siècles, finit par connaître un grand relâchement ouvrant la voie à l'effondrement et à l'occupation. Mais malgré cette ambiance de dégradation caractérisée quelque peu par la dissolution des mœurs et la dilution des valeurs, causée essentiellement par cette effroyable indifférence affichée par les nouveaux maîtres du pays, les Algériens manifestaient une grande déférence pour les institutions sacrées, héritées du passé lointain et glorieux de l'Islam. Les intellectuels, plus au fait de la situation politique, voyaient les choses autrement, avec plus de nuances et de circonspection. Maître Mokhtar Hadj Saïd, avocat à Constantine, l'a si bien traduit, des années plus tard, quand il devait répondre à certaines accusations des tenants du régime colonial.
(A suivre)


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