La pandémie actuelle serait en passe de bouleverser les cultures au point de dénaturer les vocables. La société française vient de se rendre compte qu'il ne fallait plus parler de confinement ni de distanciation des personnes mais de couvre-feu. Soumise à une véritable guerre contre un invisible ennemi, elle s'approfondit dans les interprétations pour trifouiller les sens des mots et les fortes imaginations vont jusqu'à entrevoir des tanks en faction dans les rues. L'infernale situation a transformé l'incroyable démêlé en une bataille sans armes d'une société contre elle-même. Le Covid a réussi à ébranler un des fondements d'une civilisation en interdisant désormais la chaleur de la vie nocturne summum d'une allégresse et d'une échappée humaines. Les Français des grandes agglomérations devront s'éloigner d'un rituel qui faisait partie de leurs gènes. Aller vers les autres pour fuir son soi est révélé comme une profession de foi et les prières d'un genre particulier à visage caché dans les cafés et les restaurants sont invitées à disparaître pour on ne sait combien de temps. Se développeront alors de nouvelles us et de nouvelles habitudes pour prouver que les cultures ne sont jamais figées et que la nature a toujours le dernier mot. Il est certain que les mouvements humains s'articuleront d'une autre façon et que le confinement ordonné ne sera qu'un vain mot. Ils inverseront leurs itinéraires pour que les cafés et les restaurants se fixent au cœur des maisons. De ce fait, ce pourquoi le couvre-feu a été instauré s'avérera à l'opposé des gains escomptés par un couvre-feu. Le coronavirus semble disposer de l'éternité devant lui. Les calculs et les ordonnancements de toutes les autorités confondues démontrent chaque jour que les efforts conçus ne sont que le témoignage d'une prise en charge tatillonne d'un phénomène mortel qui ne s'avouera pas vaincu. Sauver les meubles est devenu une parade pour justifier en même temps une bonne conscience et l'aveu d'un désemparement des gouvernements. En attendant, les couvre-feux se succéderont aux confinements et aux déconfinements pour avouer que la lutte menée tantôt pour et tantôt contre la nature ne serait qu'un coup d'épée dans l'eau.
