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2eme partie et fin
Publié dans El Watan le 23 - 04 - 2007

b) De prime abord, dans la plupart des cas, les avocats algériens travaillent seuls, avec un personnel inexistant ou limité, et doivent seuls supporter l'obligation de déclaration individuelle, laquelle leur crée de nouveaux coûts et charges administratives sans rapport avec l'activité de base du cabinet. Ceci a des conséquences indirectes sur leur compétitivité, non seulement à l'égard de professions qui n'hésitent pas à fournir des conseils juridiques payants et dont l'activité professionnelle implique déjà l'équipement cité, mais aussi à l'égard de firmes étrangères. La différence des exigences entre la loi algérienne et celles étrangères, de pays européens par exemple, rend les cabinets algériens moins attractifs pour une clientèle idoine et sophistiquée préférant la confidentialité. La compétition est donc faussée avec les cabinets européens, même sujets aux directives de l'UE et davantage encore avec les cabinets suisses, canadiens et américains…
c) Ensuite, il est essentiel de critiquer l'assimilation faite par la loi de février 2005 entre les activités de l'avocat-conseil et celles de l'avocat-mandataire. Représentant et défenseur, tout avocat a également une fonction essentielle d'assistance et de conseil.
Par là, il assure l'accès à la justice et également l'accès au droit. La possibilité pour tout citoyen de pouvoir disposer d'un conseil indépendant aux fins de connaître l'état du droit régissant sa propre situation est une garantie essentielle de l'Etat de droit, où le secret professionnel participe au pacte de confiance.
Mais sur la base d'un contrat de mandat, les activités de l'avocat impliquent – en exagérant un peu – identité des intérêts de l'avocat et ceux de son client, au point de faire perdre au premier son indépendance. Inversement, sur la base d'un contrat d'assistance, les activités de l'avocat-conseil exigent le respect de l'indépendance de l'avocat. L'avocat qui expose au client les implications juridiques d'une opération envisagée n'est pas celui qui conduit une évaluation en vue de choisir la meilleure stratégie dans l'intérêt du client, afin de réaliser une action ou une transaction économique ou commerciale.
Dans la première, l'évaluation a pour but d'aider le client à organiser ses activités dans le respect de la loi. C'est une activité de conseil qui devrait être soustraite à l'obligation de dénoncer, quels que soient son contexte et son objet.
d) Nous suggérons à l'Union nationale des barreaux algériens d'agir en vue d'exempter l'avocat de déclarer ses soupçons à la CTRF et de l'obliger de la faire, au besoin, à son organisation ordinale territorialement compétente, laquelle jugera – après évaluation – si la déclaration doit être adressée à la CTRF ou non. Une telle mesure alignera la loi algérienne sur les standards internationaux. En Europe, l'obligation de dénonciation est assortie de deux sortes de garanties tenant compte de la spécificité de la profession d'avocat. La directive de 2001 permet aux Etats membres (faculté et non obligation) de désigner un organe d'autorégulation approprié de la profession concernée comme l'autorité à informer en cas de déclaration. Cet organe a une fonction de filtre et de contrôle, de telle sorte que l'obligation de discrétion professionnelle qui incombe aux avocats à l'égard de leurs clients puisse être préservée (ceci est accepté par plusieurs pays : France, Danemark, Portugal, Espagne…). La directive européenne autorise à établir un «intermédiaire» en cas exceptionnel de déclaration de soupçon par l'avocat. Cet intermédiaire est destiné à préserver le caractère professionnel particulier de l'avocat, lequel ne s'adresse à aucune autorité en dehors du chef de son ordre. Une déclaration de soupçon sous le sceau de l'ordre serait plus neutrale et exposerait moins la profession. On pourrait aussi permettre une première déclaration à l'ordre, sans nécessairement identifier le client, notamment lorsque l'avocat n'est pas sûr que la transaction soit concernée par la loi ni que le rapport de clientèle soit établi.
e) Dans tout Etat de droit, la relation de loyauté et de confiance avocat/client est vitale à l'exercice de la profession. Elle est «principielle». Or l'interdiction – sous peine de sanction pénale – faite à l'avocat de révéler à ses clients que des informations ont été transmises aux autorités responsables de la lutte contre le blanchiment et le terrorisme viole ce principe. Le législateur algérien est allé trop loin et l'article de la loi devrait comporter une exception pour les avocats. L'article 8 de la directive européenne énonce que les Etats membres ont la faculté de ne pas imposer aux avocats l'interdiction d'informer le client dénoncé en application de la directive. Notre proposition est justifiée afin d'équilibrer les droits individuels et les besoins de la société. L'avocat n'existe pas par lui-même ; sa fonction est d'assurer «dans tous les pays du monde, tant dans leur vie publique que dans leurs pratiques professionnelles (…) l'indépendance de la justice et le respect des droits de l'homme».
Le gouvernement devrait donc comprendre la mission des avocats, mission individuelle et collective d'assurer l'égal accès de tous à la justice. Or la loi algérienne exclut implicitement le droit d'accès à la justice du suspect et porte atteinte à l'intégrité du système judiciaire en violant de nombreuses normes constitutionnelles. La délinquance financière n'impose pas par elle-même un régime unique, «le même habit pour tous», et l'on doit prendre en compte la fonction et le rôle particuliers joués par l'avocat. Cette exception tire sa source des garanties constitutionnelles et des droits fondamentaux des citoyens. On constate que, malgré la perception sociale négative des avocats, les notaires et les experts-comptables ne sont pas sujets à des obligations déontologiques comparables à celles des avocats. Citons un exemple : la loi de 1991 interdit à l'avocat, même pour des montants insignifiants et ne dépassant pas le seuil réglementaire des 50 000 DA, de gérer les fonds de son client hors d'un compte bancaire. Des montants minimes mais réguliers, surtout dépourvus de justification économique, professionnelle, commerciale ou juridique évidente, ou encore portant sur des devises, peuvent tout aussi bien rentrer dans la catégorie des opérations de blanchiment et de financement du terrorisme.
5. Responsabilité sociétale des professions réglementées
Nous plaidons pour que les membres de toutes les professions libérales et réglementées considèrent sérieusement leur responsabilité en s'impliquant davantage dans la société. C'est la seule manière de résoudre sur des bases légitimes la plupart des dilemmes qu'ils peuvent rencontrer dans leur vie professionnelle.
Le rapport du professionnel à la loi doit être revisité. Partons d'exemples concrets : le notaire qui a rédigé le statut d'El Khalifa Bank n'a, à strictement parler, commis aucune infraction ni faute professionnelle. La loi n'exige que la forme de société par actions des banques et un montant de capital égal ou supérieur à un seuil défini, sans que la totalité du capital soit nécessairement libérée. Le code de commerce permet, en effet, que le capital des sociétés par actions soit libérable par tranches. Ce notaire a respecté la lettre de la loi, laquelle a été modifiée bien après le scandale pour y inclure l'exigence d'une libération immédiate de la «totalité» du capital de la banque candidate. Ce notaire est l'un des doyens de la profession. Concernant les avocats, en 1998, l'association des producteurs de produits pharmaceutiques d'Afrique du Sud a initié, avec quatorze multinationales de l'industrie pharmaceutique, une action judiciaire contre le gouvernement pour soutenir la nullité de la nouvelle loi de 1997 sur le contrôle des médicaments, au motif qu'elle viole les obligations internationales de l'Afrique du Sud sur la protection de la propriété intellectuelle. Cette loi autorisait l'importation de produits génériques à moindre coût à partir des pays qui permettent leur production même s'il s'agit de produits patentés. Le motif de la loi est la pandémie exceptionnelle du sida. Nelson Mandela était alors président de la République.
Des ONG ont mené campagne contre ces multinationales, en mettant l'accent sur le contraste entre le droit à la patente et le droit à la santé des victimes du sida. L'action des multinationales s'est faite sur conseil de leurs avocats. Face au dilemme et la chute drastique des actions des multinationales accusées d'apartheid, l'affaire judiciaire a vite été ajournée et les compagnies ont annoncé une substantielle réduction de leurs prix des médicaments utilisés contre le sida.
En 2002, les médias faisaient état de la famine en Afrique. Nestlé réclamait alors 6 millions de dollars US au gouvernement éthiopien pour compensation de la nationalisation, en 1975, d'une entreprise allemande rachetée entre-temps par elle. Son action a eu l'aspect d'une provocation contre l'un des pays les plus pauvres de la planète. Face à la montée de la pression, Nestlé réduit ses exigences, son porte-parole dira que c'est dans l'intérêt du gouvernement d'accepter afin d'«attirer les investissements directs étrangers vers le pays». Là aussi, les avocats de Nestlé n'avaient pas joué leur rôle.
Ces deux exemples montrent que les avocats ont gardé la traditionnelle culture du conflit, pensant «droits», «obligations juridiques», «défense»… Les avocats auraient dû fonder leurs conseils et assistance sur la stratégie du dialogue : l'avocat pense responsabilité (pas seulement juridique) et transparence et a généralement déjà expérimenté ou pratiqué les modes alternatifs de résolution des litiges. Dans son essence, ces procédés focalisent sur l'identification des domaines d'intérêts communs entre les parties. Dans sa publicité parue dans le magazine European Lawyer, un avocat montrait l'alternative en disant : «La relation que vous avez avec vos avocats est fondée sur la confiance. Mais pouvez-vous faire confiance à des avocats qui vous fournissent des conseils basés sur ce que vous désirez entendre plutôt que sur ce que vous devez entendre ? Nous pensons que la réponse est non… Nous refusons de travailler pour des clients inadéquats. Nous sommes capables de dire "non" quand c'est nécessaire. Nous préférons l'objectivité de tous les conseils que nous donnons. Vous pouvez nous faire confiance.» L'apport de l'avocat à la société où il vit et travaille devrait, face au conflit, reposer sur le vieil adage «un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès». Ce qui est demandé à l'avocat n'est pas de trouver les bases juridiques de confortement, à n'importe quel prix, de la cause de son client. L'avocat est un auxiliaire de la justice et non un mercenaire. Au-delà de la loi et/ou de sa critique argumentée, chaque professionnel a des responsabilités à l'égard de son environnement humain et matériel. Les codes algériens de déontologie tentent, lorsqu'ils existent, de répondre à cette exigence éthique, mais ils demeurent bien en deçà du nécessaire. Durant ces deux dernières décennies, l'idée selon laquelle tout acteur du marché doit prendre des initiatives dictées par sa responsabilité sociétale et environnementale a pris des proportions considérables. Mais l'idée s'est presque exclusivement orientée sur les seules entreprises, notamment transnationales, dont beaucoup s'y sont engagées.
Ces initiatives volontaires visent le respect, outre de la législation du pays d'accueil, du contenu des normes internationales portant sur les droits de l'homme, sur la protection de l'environnement et sur la vie économique (lutte contre la corruption et le blanchiment notamment). C'est sous le label du développement durable que les stratégies de responsabilité sociétale se sont développées. Il n'est donc pas superflu de considérer une telle responsabilité pour les professions libérales à l'occasion de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.Sans doute que les tenants de l'expression l'ennemi de l'avocat est son propre client ne seront pas d'accord avec la critique de la loi et de la nécessité pour ce noble métier de changer de stratégie, voire de culture, pour affronter les nouveaux défis de la mondialisation, laquelle n'est pas un processus purement économique ; elle revêt aussi des dimensions sociales, politiques, environnementales, culturelles et juridiques. Inversement, l'avocat ayant une culture de conflit lorsqu'il demande ou défend et même lorsqu'il conseille, arrive souvent à épouser la cause de son client et à faire d'une vache un lapin et inversement. C'est avilir son rôle dans la société et trahir le mandat (licence to operate) que la société lui donne pour opérer dans son intérêt. D'où le besoin vital pour le professionnel d'être socialement responsable.Au lieu de la mort de la profession, c'est sa résurrection que nous proposons par l'adoption de modifications adéquates à la loi critiquée et par l'adoption par la profession d'une attitude et d'une stratégie responsables.


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