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Ali Kafi la «famille révolutionnaire» au pouvoir
Publié dans El Watan le 17 - 07 - 2013

C'est peu dire que le nouveau locataire d'El Mouradia héritait du pouvoir au plus mauvais moment. A la crise politique induite par l'arrêt du processus électoral s'ajoutait l'affaire Boudiaf. Ali Kafi avait, décidément, beaucoup de pain sur la planche. Dans sa livraison du mois d'août 1992, Le Monde Diplomatique résume on ne peut mieux les termes de l'équation politico-économico-sécuritaire que doit résoudre le successeur de Boudiaf et son équipe : «L'élection à Alger de Ali Kafi à la présidence du Haut-Comité d'Etat et la nomination de Belaïd Abdesselam à la tête du gouvernement permettront-elles à l'oligarchie politico-militaire, qui contrôle le pays depuis trente ans, de se maintenir au pouvoir ? Eviteront-elles au régime de sombrer dans le chaos ? Avec le général Khaled Nezzar, ministre de la Défense et homme fort du pays, ces dirigeants constituent désormais un triumvirat de choc qui n'a pas droit à l'erreur et devra très vite réussir un triple pari : moraliser la vie publique, relancer l'économie et en finir avec le terrorisme des islamistes radicaux.»
Grand échalas au physique imposant, à la voix éraillée et au tempérament jovial, réputé pour ses penchants épicuriens, Ali Kafi avait-il les épaules assez larges pour assumer une telle mission dans une conjoncture aussi délicate ? Ce qui est certain, c'est qu'il n'a jamais brigué la magistrature suprême. Lui qui a fait l'essentiel de sa carrière dans la diplomatie, il n'a jamais été un homme de pouvoir. Il semblerait que ce qui a joué en sa faveur fut surtout son statut d'ancien chef de la Wilaya II historique.
Un point de son long CV qui a dû, en effet, peser dans la balance. S'il a été coopté, c'est surtout pour conférer un soupçon de légitimité historique à cet OVNI institutionnel qu'est le HCE, à défaut de légitimation par les urnes. En tant qu'ex-secrétaire général de la puissante Organisation nationale des moudjahidine, il incarnait, à lui seul, la caution apportée par la «famille révolutionnaire» au coup de force du 11 janvier 1992. Son collègue Khaled Nezzar citera, en outre, deux autres raisons qui ont motivé ce casting : selon lui, Ali Kafi a été choisi «d'abord parce qu'il parlait parfaitement l'arabe, c'est un ancien moudjahid et aussi le plus âgé de tous»(1).
Dans ses Mémoires, le général Nezzar explique, par ailleurs, pourquoi il n'a pas postulé à la fonction suprême à la mort de Boudiaf, alors qu'il était le véritable chef d'orchestre de toute cette «révolution de palais» sciemment provoquée pour faire barrage au FIS.
«Je ne pouvais, écrit-il, accepter de prendre les rênes de l'Etat, ni après la mort de Boudiaf ni après la fin du mandat du président Chadli, pour la simple raison que le président Boudiaf a été assassiné pendant l'exercice de ses fonctions par un militaire alors que j'étais ministre de la Défense. Occuper une telle fonction aurait conforté l'hypothèse du complot»(2)
Un président «symbolique» ?
Ali Kafi a ainsi la lourde tâche de remettre le «bateau Algérie» à flot, alors que le pays est pris dans une tornade. La liquidation physique de Boudiaf, en direct à la télévision, inaugurait symboliquement la «décennie rouge» (ou «décennie noire», même si cette formule, à l'origine, était usitée pour désigner les années Chadli). Dès le mois d'août, un terrible acte terroriste confirme la tendance qui se dessinait depuis le début des années 1990 (attaque de Guemmar, attentat de l'Amirauté, entre autres) : c'est le fameux attentat de l'aéroport du 26 août 1992 qui fera 9 morts et 128 blessés, selon le bilan officiel. La série noire des premiers assassinats ciblés (Djillali Liabès, Hafid Senhadri, Laâdi Flici, Tahar Djaout, Mahfoud Boucebci, M'hamed Boukhobza, pour ne citer qu'eux) achève de plonger le pays dans la terreur et le chaos.
Outre cette déferlante meurtrière, le pays est confronté à une crise économique des plus aiguës. Les caisses de l'Etat sont vides, si bien que l'Algérie finit par tomber dans l'escarcelle du FMI et son impitoyable PAS (Plan d'ajustement structurel, 1994-1998). Mais quelle était réellement la marge de manœuvre du président Ali Kafi ? Force est de constater qu'au regard de l'architecture du HCE, ses pouvoirs étaient forcément limités. Techniquement, il était davantage dans la posture d'un chef d'Etat par intérim chargé essentiellement de mener le mandat interrompu du président Chadli à son terme.
Celui-ci courait officiellement jusqu'au 22 décembre 1993. De là à dire qu'il n'avait qu'une fonction symbolique, il n'y a qu'un pas. Il y a fort à parier en tout cas que les grandes décisions se prenaient ailleurs, avant d'être entérinées par la présidence collégiale. Vu la conjoncture sécuritaire, la prééminence de l'establishment militaire n'a jamais été aussi prégnante. Le poids du «pouvoir réel», détenu par les généraux dits «janviéristes», écrasait fatalement le pouvoir civil. «Tout le monde savait que, depuis la disparition du président Boudiaf, ce HCE n'était plus qu'une chambre d'enregistrement et un organisme de promulgation formelle de décisions prises ailleurs», atteste l'ancien chef de gouvernement Bélaïd Abdesselam(3), nommé en remplacement de Sidi-Ahmed Ghozali quelques jours seulement après l'investiture de Ali Kafi.
Et d'ajouter : «Bien des fois au cours de nos rencontres, le président Ali Kafi lui-même me disait que, lui comme moi, n'avions pas plus de valeur que des dessus de cheminée, du point de vue de la détention et de l'exercice du pouvoir réel, mais que, aussi, lui comme moi, nous travaillions à aider l'ANP dans l'accomplissement de la lourde tâche qu'elle s'était assignée, pour le salut de l'Etat et le redressement du pays.»(4)
Dans La Mafia des généraux, Hichem Aboud abonde dans le même sens : «Ali Kafi s'est trouvé à la tête de l'Etat par ‘accident'. Il a terminé le mandat du Haut-Comité d'Etat, totalement effacé par la mafia qui se méfiait beaucoup de cet ancien colonel, chef de la Wilaya II (…) Il était interdit d'assemblée publique. Ses rares apparitions à la télévision étaient censurées sans ménagement.»(5)
Négociations secrètes avec le FIS
Il est pourtant au moins un dossier où Ali Kafi donnera toute la mesure de son habileté à imposer ses vues quand les circonstances l'exigent. C'est l'épisode des négociations secrètes avec les chouyoukh du FIS détenus à la prison militaire de Blida. Peu après sa nomination à la tête du ministère de la Défense à la place de Nezzar, Liamine Zeroual s'est rendu en décembre 1993 à Blida pour faire une offre de dialogue à Abassi Madani et Ali Benhadj et obtenir d'eux, en contrepartie, leur appui pour l'arrêt de l'effusion de sang. Ali Kafi révèlera par la suite qu'il était le véritable instigateur de ces tractations. «Du temps de Zeroual, j'étais partisan du dialogue, y compris avec des éléments du FIS. Il fallait ôter la couverture politique aux terroristes», avouera-t-il des années plus tard(6).
Une initiative qui mettra Nezzar en rogne. «Quelle fut ma surprise d'apprendre que l'ex-président du Haut-Comité d'Etat admet être celui qui fut l'initiateur des contacts avec les responsables de l'ex-FIS emprisonnés à Blida par l'entremise du ministre de la Défense de l'époque», fulmine Nezzar dans une interview accordée à Al Charq Al Awsat en mars 2000 et largement reprise par la presse nationale. Et de confier, dans la foulée, qu'il avait toujours vu en Ali Kafi un baâthiste. Autre sujet de polémique : Ali Kafi a toujours clamé que c'est lui qui avait incité, en sa qualité d'ex-SG de l'ONM, les anciens moudjahidine à reprendre les armes pour faire la guerre au terrorisme.
Ce que Nezzar dément formellement en déclarant : «C'est faux. C'est le général Mohamed Lamari qui a donné instruction aux chefs de région pour qu'ils sensibilisent les moudjahidine sur cette question. L'opération a été lancée par le général Djouadi, dès l'affaire de Guemmar.»(7) Parallèlement à la bataille sécuritaire qui prend des allures de guerre totale contre le terrorisme, avec son lot de bavures et de dépassements, entre exécutions sommaires, disparitions forcées et autres déportations vers les camps du Sud, le régime lance une vaste opération de marketing politique sous le slogan : «Dialogue sans exclusive». Il s'agissait de construire un large consensus autour d'une feuille de route pour sortir le pays de la crise. Pour cela, une Commission dite «du dialogue national» (CDN) est instituée le 14 octobre 1993. Elle est présidée par Youcef Khatib, l'ancien chef de la Wilaya IV. Abdelkader Bensalah, l'actuel président du Sénat, en est le porte-parole.
Première passation de pouvoirs dans l'histoire
La CDN est chargée de mener des consultations avec l'ensemble des partis politiques, y compris ceux de la mouvance islamiste favorables au dialogue, et de rédiger un avant-projet de plateforme sur la gestion de la période transitoire. Ce texte sera ensuite soumis à débat lors de la Conférence du dialogue national. En sous-texte, le but de cette opération est de sortir les islamistes, FIS en tête, du terrain de la violence, et de les ramener sur le terrain politique. «Le général-major Mohamed Touati, représentant l'armée au sein de la Commission du dialogue national, se déclarait favorable à une participation de ‘‘personnalités du FIS respectueuses de la loi et de l'État'' aux travaux de cette commission», souligne, à ce propos, le politologue Fawzi Rouzeïk(8).
La Conférence du dialogue national s'ouvre le 25 janvier 1994 au Palais des nations, au Club des Pins. Cette grand-messe politico-médiatique, qui était censée réconcilier toutes les sensibilités politiques, sera un fiasco dans la mesure où elle est boudée par tous les grands partis d'opposition, FLN inclus.
Deuxième revers : Bouteflika, attendu comme le messie, déclare forfait à la dernière minute et décline l'offre de l'institution militaire de prendre les commandes de l'Etat. La conférence clôt ses travaux avec, pour seul acquis, l'adoption de la «plateforme portant consensus national sur la période transitoire» après de légers amendements. Celle-ci est officiellement promulguée le 29 janvier 1994. Ce décret n°94-40 sera le dernier paraphé par Ali Kafi. Le 30 janvier 1994, le Haut Conseil de sécurité met fin au mandat de Ali Kafi et l'ensemble du HCE et désigne Liamine Zeroual président de l'Etat. Dans ses Mémoires, Ali Kafi se félicite, avec une pointe de fierté, d'être «le premier chef d'Etat en Algérie à remettre ses pouvoirs à son successeur.»
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(1) Voir l'article intitulé : «Khaled Nezzar révolté par les accusations de Ali Kafi» In: El Watan du 20 mars 2000.
(2) Mémoires du général Khaled Nezzar. Editions Chihab, 1998, P 261.
(3)&(4) Voir son livre : Pour rétablir certaines vérités sur treize mois passés à la tête du gouvernement (juillet 1992-août 1993). Le livre est accessible sur son site internet : www.belaidabdesselam.com
(5) Hichem Aboud. La Mafia des généraux JC Lattès, 2002, P 236.
(6) Voir l'article : «Ali Kafi sort de sa réserve: Je regrette d'avoir été président du HCE». In : El Watan du 9 mars 2000.
(7) In : El Watan du 20 mars 2000.
(8) Fawzi Rouzeik. Algérie, chronique intérieure in : annuaire de l'Afrique du Nord. Lien : aan.mmsh.univ-aix.fr/Pdf/AAN-1994-33_13.pdf


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