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Chants d'agonie
Publié dans El Watan le 13 - 06 - 2015

Le romancier a passé une semaine chez le journaliste Mohamed Zaoui en France après son hospitalisation en 2010. La caméra filme l'homme de lettres allongé sur un divan blanc et fredonnant des chants aurésiens comme Ma tabkich ya Djamila et Wech dak leloued ya Zaazoura.
Tahar Ouettar parle de Salah Labidi, de Cheikh Bouregâa, de Beggar Hadda et de Aissa Djermouni. «Sans ces chanteurs, mon âme artistique aurait été sèche, vide», confie-t-il. Il écoute les chants dans son téléphone portable aussi. «La mort pour moi est une expérience, une situation artistique, que je veux tenter. Je me suis déplacé dans des zones dangereuses pour justement dépasser cette muraille qui nous sépare de la mort», dit-il. «Je vis une tension permanente. Je suis révolté de l'intérieur.
C'est ce qui crée le désir d'écrire chez moi», ajoute-t-il. Il s'est rappelé la mort de son frère aîné et de son père : «Je n'ai senti une douleur intense que des jours plus tard». Mohamed Zaoui raconte la relation de sa fille Yasmine avec l'écrivain et sa canne, surnommée Obama. «Ouettar s'adresse à sa canne, lui parle, lui raconte des histoires. Sa canne est devenue un personnage. Yasmine s'est adaptée à cette situation et a commencé à s'adresser elle aussi à la canne», raconte Mohamed Zaoui qui s'est déplacé ensuite à M'daourouch, ville natale de Tahar Ouettar, à Souk Ahras, dans l'Est algérien.
Le romancier a refusé d'y revenir pour un hommage à la fin de sa vie de peur d'être exploité politiquement par les potentats locaux. Il a envoyé une lettre d'excuses dans laquelle il a rappelé qu'il a consacré au moins quatre de ses livres à la guerre de Libération nationale. Mohamed Zaoui a rappelé comment Tahar Ouettar a été forcé à la retraite à l'âge de 47 ans et comment il s'est installé dans une petite maison en bord de mer pour écrire.
«Cette maison est devenue un temple dans lequel le romancier cachait ses rêves impossibles», note-t-il. Il a évoqué la relation de Tahar Ouettar avec sa famille et surtout avec son grand-père. Sa sœur est revenue sur le voyage vers Alger et l'installation de l'écrivain au niveau de la capitale.
Le documentaire a donné la parole à des auteurs tels que Sonallah Ibrahim, Waciny Laaredj, Djamel El Ghitani, Ahmed Cheniki, Azzedine Mihoubi, Mohamed Sari, Djamel Foughali et d'autres. Tous ont raconté des anecdotes sur l'écrivain et sur son univers littéraire. Tahar Ouettar a confié dans le documentaire que Le pêcheur et le palais est son roman préféré. Ecrit en 1974, ce roman narre l'histoire de Ali le pêcheur qui traverse sept cités pour offrir du poisson au roi. Il doit surmonter des pièges pour y parvenir, mais également la trahison et la peur. Une belle métaphore sur le pouvoir et ses travées.
Yasmine Zaoui a lu des extraits de ce roman durant plusieurs moments du documentaire. «L'homme est fait de sentiments. Et les sentiments qui se développent avec l'âge sont comme de la cire pour la bougie ou l'huile pour la mèche. La création est liée à ces sentiments», confie Tahar Ouettar. Sonallah Ibrahim a estimé que l'auteur de L'As possédait une profondeur de réflexion qui n'existait ni chez Nadjib Mahfoud ni chez Tewfik El Hakim.
Le documentaire Akher kalam a survolé la polémique soulevée par Tahar Ouettar dans les années 1990 lorsqu'il avait dit que les intellectuels francophones se suicidaient après l'assassinat de Tahar Djaout.
Plusieurs intervenants ont estimé que Tahar Ouettar n'était pas hostile à la langue française, ni aux écrivains francophones. Waciny Laaredj a appelé à dépasser la polémique. «Ouettar a trouvé dans la langue arabe une alternative au socialisme. Il est resté socialiste jusqu'à la fin de sa vie», a estimé, pour sa part, Mohamed Sari. Tahar Ouettar a expliqué la manière avec laquelle il s'était soulevé, à l'âge de 16 ans, contre les méthodes d'enseignement dans les écoles coraniques à l'époque. «A la Zeïtouna (Ndlr : académie religieuse de Tunis), on nous apprenait à égorger un mouton, faire une circoncision ou se laver. Des choses que même les grands-mères connaissent.
Le problème des musulmans est qu'ils continuent à s'intéresser à ce qui est déjà connu. Cela dit, je suis fier d'avoir eu mon premier enseignement dans une école religieuse. Des phrases de mes romans sont inspirées du Coran», dit-il révélant son grand attachement au patrimoine, à l'héritage soufi, à la civilisation arabe et à l'identité amazighe.
Il a comparé son écriture à celle du romancier libyen Brahim El Kouni. «Le socialisme ou le marxisme est pour moi un rêve. Le rêve de Jésus, de Mohamed, de Abou dher Al Ghifari, de Ali Ibn Abi Taleb, des Zounoudj… C'est le rêve de l'homme qui veut voir la vie sans arbitraire et sans injustices. J'ai cru à ce rêve. Je ne peux m'en débarasser parce que des bureaucrates à Moscou ont échoué à le réaliser», souligne Tahar Ouettar.
Malheureusement, la parole n'a pas été donnée suffisamment dans le documentaire Akher kalam à l'auteur de La bougie et les corridors. «Je ne voulais pas m'étaler sur la polémique idéologique autour de Tahar Djaout, mais m'intéresser à la personnalité de Tahar Ouettar, connaître mieux sa vie… J'ai surtout travaillé sur l'être humain.
J'ai tenté de répondre aux questions relatives aux origines du romancier. Son père voulait qu'il devienne un homme de religion ; or, il a choisi la voie de l'écriture littéraire. Il a dit des choses sur son oncle danseur dans les fêtes de mariage. A la fin de sa vie, Tahar Ouettar voulait plus écouter les gens que parler. A l'hôpital, il se sentait seul parfois», estime Mohamed Zaoui qui a qualifié la polémique sur Tahar Djaout de malheureuse. «Car, je sais que Tahar Ouettar et Tahar Djaout étaient des amis», appuie-t-il.
Mohamed Zaoui a pris sa caméra au moment où Tahar Ouettar commençait à chanter Beggar Hadda. «C'était un moment nostalgique. Tahar Ouettar n'était pas méchant. Il était un homme fragile, portait des blessures liées à son enfance», relève
Mohamed Zaoui.
Tahar Ouettar est décédé le 12 août 2010 à Alger.
Il est l'auteur d'une dizaine de romans et de deux pièces de théâtre. Il a également écrit des nouvelles qui demeurent peu connues du public, mis à part Les martyrs reviennent cette semaine publiée en Irak en 1974, avant d'être rééditée en Algérie six ans plus tard et dont la renommée populaire doit beaucoup à son adaptation théâtrale par Ziani Cherif Ayad en 1987.


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