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Mohand Issad. Avocat et professeur en droit international
« Le droit s'arrête là où commence la politique »
Publié dans El Watan le 20 - 09 - 2005

Mohand Issad est un éminent juriste et professeur en droit international. Il a été chargé par le président de la République, en juillet 2001, de diriger la Commission nationale d'enquête sur les événements de Kabylie. Dans cet entretien, Il s'exprime notamment sur le projet de la charte pour la paix et la réconciliation nationale et la crise de Kabylie.
Certains estiment que la charte pour la paix et la réconciliation tend à sacrifier la vérité et la justice. Quel est votre commentaire ? Cette charte consacre-t-elle l'impunité ?
Il faut bien « sacrifier » quelque chose lorsqu'on ne peut ni atteindre la vérité ni rendre la justice. On peut appeler cela « impunité », tandis que d'autres, dans notre pays et ailleurs, peuvent appeler cela « amnistie », « grâce », « concorde civile » ou, aujourd'hui, « charte pour la paix et la réconciliation ». Ces notions sont proches les unes des autres quand on en analyse le contenu. De fait, les mots « extinction des poursuites » et « grâce » reviennent dès les premiers articles. Mais on remarque aussi que ces textes font une distinction entre les « individus » impliqués dans ce que le texte appelle la « tragédie nationale ».
Ne faut-il pas assainir l'environnement juridique avant d'aller à tout projet de réconciliation nationale ?
Personne ne détient la recette pour ce que vous appelez « assainir l'environnement juridique », depuis quinze ans que nous traînons cela. Tous les efforts déployés ont été vains. Avec le temps qui passe et le dépérissement des preuves, la chose est rendue encore plus difficile.
Le projet proposé par le Président est-il en harmonie avec le droit international ? Les mesures contenues dans la charte ne sont-elles pas en contradiction avec les conventions ratifiées par l'Algérie ?
Le droit, interne ou international, s'arrête là où commence la politique. Je vous signale que, par définition, les notions d'amnistie et de grâce constituent précisément des dérogations au droit et ne sont pas nées chez nous. Ce sont des prérogatives dérogatoires, l'une reconnue au Parlement, l'autre au chef de l'Etat. Le problème n'est pas donc de savoir si le contenu de la charte n'est ou n'est pas contraire aux engagements de l'Algérie, mais comment de telles mesures sont conçues par l'opinion publique, interne et internationale. C'est une évaluation politique (...). Contrairement à l'idée répandue, il n'y a pas de juridictions internationales ouvertes aux individus. La Cour pénale internationale n'est pas encore opératoire et sa compétence n'est pas rétroactive.
Pourquoi, selon vous, les dispositions énoncées dans le projet ne sont pas limitées dans le temps ?
C'est sans doute un choix politique, nourri par l'expérience. La loi sur la concorde civile arrête ses effets au 13 janvier 2000. On sait qu'à cette date les actes terroristes n'ont pas pris fin et tous ceux qui ont pris les armes contre l'Etat ne se sont pas « repentis ». Alors, sans doute qu'avec la charte le pouvoir politique a-t-il voulu éviter le piège du temps. Le projet contient des dispositions visant l'exonération des forces de sécurité. Quel est votre commentaire ? La loi est générale et s'applique à tous. C'est un principe constitutionnel. Si donc il y a extinction des poursuites, grâce, commutation ou remise de peine, tous ceux qui sont impliqués dans ce conflit, de quelque côté qu'ils se situent, doivent en bénéficier.
D'aucuns estiment que la charte porte une amnistie déguisée. Une telle mesure sera-t-elle introduite ?
L'amnistie et la grâce. Elles ne sont pas déguisées. L'extinction des poursuites judiciaires, la grâce et des notions voisines sont énoncées en toutes lettres dans le texte.
Cela reviendrait à dire qu'on se dirige vers une amnistie générale...
Oui. Sauf les exceptions prévues dans le texte. L'extinction des poursuites ne s'applique pas aux individus impliqués dans les massacres collectifs, les viols et les attentats à l'explosif dans les lieux publics. Néanmoins, quand on parle de massacres collectifs, je pense également aux massacres individuels. Qu'en est-il de celui qui a tué une personne ? Et à partir de quand commence le massacre collectif ? Est-ce que le fait d'assassiner deux ou trois personnes est un massacre collectif ou non ? D'autre part, quand on parle des explosions dans les lieux publics, pourquoi on ne parle pas des explosions dans les lieux privés ? Il doit y avoir une explication, mais que je n'ai pas.
Comment pourrait-on identifier les auteurs des crimes individuels et les auteurs des crimes collectifs ? Autrement dit, comment peut-on savoir qui a fait quoi ?
Je ne dirai pas que tous ceux qui se sont rendus coupables des massacres collectifs, de viols... sont inconnus des services de sécurité. Je pense qu'il y a des noms et des dossiers. Autrement, on ne s'expliquerait pas cette situation. Cela fait quinze ans qu'ils assassinent, qu'il violent, qu'ils posent des bombes et qu'ils enlèvent. Je pense qu'il y a des noms et des fiches quelque part. Après l'adoption de la charte, les juristes vont se pencher sur les dispositions réglementaires à même de donner un sens à la paix et la réconciliation nationale. Ne pensez-vous pas que cela pourrait engendrer d'autres crises ? On n'est jamais à l'abri de crises, surtout dans un pays aussi déstabilisé que le nôtre. Ce n'est pas le fait de donner un sens à la charte qui pose problème, car le sens est très clair et très précis. C'est son application qui peut retenir l'attention des juristes, des politique, de la société civile...
A votre avis, y a-t-il des failles dans la Constitution actuelle ?
Dans notre Constitution, comme dans celles des autres pays, on ne peut pas parler de « failles ». Les constitutions contiennent ce que l'on veut bien y mettre. Ceci dit, elles peuvent évoluer, au gré de l'évolution de la société et de la politique. Il s'agit alors d'adapter plutôt que de combler des « failles ».
Ne pensez-vous pas qu'il y a une sorte d'abus dans le recours aux consultations référendaires ? Pourquoi, à votre avis, les pouvoirs politiques ont eu souvent recours aux référendums populaires ?
C'est pour donner plus de légitimité à leurs démarches. La charte est un titre ou un acte autour duquel vont se faire un certain nombre d'actions. La charte aura valeur juridique après le référendum. Autrement dit, c'est un mandat donné au président de la République qui évitera par la suite que chaque question soit soumise à référendum ou à l'Assemblée nationale.
Que pensez-vous du traitement réservé à votre rapport d'enquête sur les événements de Kabylie ?
Bien sûr qu'il y a une impunité. Il y a quand bien même 126 personnes qui ont été tuées. A ma connaissance, on a jugé le gendarme Mestari, mais il y a 125 auteurs d'autres meurtres qui restent à juger.
La crise de Kabylie est-elle concernée par les dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation nationale ?
Le dossier des événements de Kabylie est clos. Il reste à punir et à sanctionner les auteurs des crimes commis si, bien entendu, le pouvoir politique estime cela opportun. Il faut, par contre, parler de l'avenir. C'est-à-dire des revendications des archs et de la plateforme d'El Kseur. Il y a des phrases très nettes dans la charte qui parlent de la préservation de l'identité du pays et de ses repères culturels et linguistiques. Il faut donc souligner que le texte ne concerne pas uniquement le terrorisme. Il évoque aussi le problème posé par les archs depuis maintenant quatre ans. Les phrases contenues dans cette charte sont annonciatrices de grandes concessions faites par l'Etat aux revendications formulées par les archs.
En êtes-vous convaincu ?
Ce n'est pas une question de conviction, mais tout simplement de lecture. Il suffit de lire l'avant-dernier paragraphe du texte pour s'en apercevoir. Il est noté ceci : « Convaincu de l'importance de cette œuvre qui mettra les générations futures à l'abri des dangers d'un éloignement de leurs racines et de leur culture, il (le peuple algérien, ndlr) charge les institutions de l'Etat de prendre toutes les mesures de nature à préserver et à promouvoir la personnalité et l'identité nationale, à travers la valorisation de l'histoire nationale ainsi que dans les domaines religieux, culturel et linguistique. » Plus loin, il est ajouté que « le peuple algérien mandate le président de la République ».
Que veut dire, selon vous, la phrase « le peuple algérien mandate le Président pour prendre toutes les mesures visant à en concrétiser les dispositions » ?
Si elle est votée par le peuple, cette charte aura valeur de Constitution pour une valeur constitutionnelle. Tout comme la Constitution, la charte est votée par voie réferendaire. Elles ont donc la même valeur. Et si le peuple, lors du référendum, mandate le Président de régler les problèmes du terrorisme islamiste, d'une part, et les problèmes liés aux revendications identitaires et linguistiques, d'autres part, ce sera une véritable loi de valeur constitutionnelle par laquelle le peuple mandate le président de la République. A ce moment, le chef de l'Etat va intervenir, aux moyens des instruments juridiques qui sont traditionnellement à son service, c'est-à-dire le décret.


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