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amorce d'un processus qui en appelle d'autres...
Après le silence d'état, la reconnaissance officielle des massacres du 17 octobre 1961
Publié dans El Watan le 20 - 10 - 2012

Le président Hollande reconnaissait mercredi la responsabilité de la République française dans la répression sanglante de la manifestation pacifique des Algériens le 17 octobre 1961.
«Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d'une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits», peut-on lire dans un communiqué de l'Elysée. C'est la première fois que la responsabilité de la France dans la répression meurtrière de la manifestation du 17 Octobre 1961 est reconnue officiellement par un chef d'Etat français. François Hollande s'était engagé, lors de la campagne présidentielle, à reconnaître officiellement ces massacres, une revendication du Parti socialiste. Et comme il fallait s'y attendre, cette reconnaissance par le président Hollande a suscité une polémique à droite et à l'extrême droite de la classe politique française. C'est dire que le chemin de la reconnaissance et de la réconciliation franco-française et franco-algérienne est encore semé d'obstacles. Les partisans du déni et les nostalgiques de l'Algérie française ne se résolvent toujours pas à admettre les faits. Une déclaration que les militants contre l'oubli et pour la vérité et la justice, réunis dans un collectif associatif du même nom ont, pour leur part, salué positivement tout en la considérant comme une première étape d'un processus à venir. Nous avons recueilli les déclarations de certains d'entre eux, qui étaient mercredi sur le pont Saint-Michel.
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Mehdi Lallaoui. Président de l'association Au nom de la mémoire : «Il y a 20 ans nous étions raillés, insultés»
-C'est le couronnement d'un long combat…
Il y a un an, le Collectif 17 octobre 1961 Vérité et Justice et Médiapart, ont lancé un appel à la reconnaissance et le président Hollande, qui était candidat, a signé cet appel. Ce soir (mercredi 17 octobre) c'est un moment important. Nous sommes sur un pont par-dessus lequel on a jeté des Algériens dans la Seine ; au palais de justice on a torturé des Algériens ; de l'autre côté, à la préfecture, on a assassiné des Algériens. Et nous, qui sommes des citoyens de ce pays, il nous était intolérable de passer par les rues de Paris dans ce silence, dans cet oubli, dans cette occultation. Cette histoire a failli être occultée pendant des années et nous devons sa résurgence aux femmes et aux hommes du mouvement associatif. Pas seulement aux Franco-Algériens, mais à tous ceux qui, pendant des dizaines années, se sont mobilisés pour la justice, la dignité et cette reconnaissance. Les choses n'ont pas été faciles, on a souvent été raillés, insultés, mais pour nous, il était important que les choses puissent être nommées.
-C'est un début de reconnaissance des crimes de la colonisation ?
C'est certainement un premier pas pour la reconnaissance des crimes de la colonisation. Cela ouvre les portes d'une vraie réconciliation. Le président de la République doit faire un voyage en Algérie en décembre prochain.
-Avez-vous une demande à adresser à l'Etat algérien ?
Qu'il tienne compte de la dignité des Franco-Algériens, des gens qui, ici, se sont battus tout seuls pour cette reconnaissance.
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Gilles Manceron. Historien, vice-président de la Ligue des droits de l'homme : «Le signal donné par le président de la République doit être le début d'un processus»
-Comment réagissez-vous à la déclaration de François Hollande ?
La déclaration présidentielle de ce jour est un geste fort et extrêmement important, qui marque le début d'un processus qu'il faut poursuivre pour reconnaître les épisodes qui ont marqué l'époque coloniale et faire en sorte que cette époque soit regardée en face, de manière à ce que l'on dise qu'elle était contradictoire avec tous les principes des droits de l'homme et que la République veut en tourner la page. C'est le début d'un travail qui doit se poursuivre. Comment un tel massacre a-t-il été rendu possible, à quelques mois de la fin de la guerre, alors que l'issue était déjà désignée par le chef de l'Etat sous la forme d'une indépendance de la République algérienne ? Et pour cela, il faut que les historiens continuent à travailler. Il faut que l'on mette en lumière tous les aspects de cette histoire : l'histoire intérieure du FLN, l'histoire de la France dans ses débuts de la Ve République. Ce doit être le cas du côté français et aussi du côté algérien ; le travail des collègues historiens ne doit plus être semé d'embûches, comme beaucoup d'entre eux en rencontrent trop aujourd'hui.
Pendant 20 ans cela a été le déni, le silence. Un silence d'Etat. Seuls quelques militants avaient trouvé utile et nécessaire de se rassembler à cet endroit. Et il n'y avait que quelques dizaines de personnes autour de celui dont le nom a été rappelé tout à l'heure par Mehdi Lallaoui, Mouloud Aounit qui, avec le MRAP, la Ligue des droits de l'homme et d'autres associations voulaient commémorer cet événement. «Vous êtes dans un fantasme», nous disait-on. Il a fallu beaucoup de travail, des livres, le livre de Jean-Luc Einaudi – La Bataille de Paris. 17 Octobre 1961 –, il a fallu des films, des documentaires, celui de Mehdi Lallaoui, le Silence du fleuve ; d'autres ont suivi, le film Octobre à Paris de Jacques Panijel qui n'a été diffusé au cinéma que 50 ans après sa réalisation… Il a fallu la mobilisation des associations pour que la demande de vérité soit exprimée, portée et, chaque année, manifester cette présence sur le pont Saint-Michel. Aujourd'hui, nous avons reçu dans l'après-midi, à 17 h, un communiqué de la Présidence. Ce communiqué est important. Ce communiqué, beaucoup d'entre nous l'attendaient ; d'autres avaient fini par ne plus y croire parce qu'il a fallu qu'une délégation se rende à l'Elysée pour que le rappel soit fait à François Hollande de son engagement de l'année dernière.
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Jean-Luc Einaudi. Auteur de la Bataille de Paris. 17 Octobre 1961 : «François Hollande a tenu parole»
-Que ressentez-vous ?
Je réagis avec beaucoup d'émotion parce que je pense à toutes ces victimes algériennes du 17 Octobre 1961. On est là, sur le pont Saint-Michel, et je pense aux noyés, à ceux qu'on a retrouvés à cette époque-là. C'est une étape très importante que la République française reconnaisse enfin ce crime. François Hollande a tenu sa parole puisqu'il s'était engagé à reconnaître ce crime, l'année dernière.
-Vous dites aujourd'hui que votre travail a porté ses fruits …
Bien sûr, mais j'ai toujours considéré mon travail comme une contribution à d'autres efforts pour que la vérité soit faite. Même si je sais que mon travail a contribué de façon non négligeable à faire avancer la connaissance de ce qui s'était passé et à faire reculer le mensonge d'Etat.
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Olivier Le cour Grandmaison. Universitaire, président de l'association Le 17 octobre 1961 contre l'oubli : «Nous demandons la modification de la législation sur l'accès aux archives»
-Comment réagissez-vous aux déclarations de M. Hollande ?
C'est un premier pas. Il reste que, pour paraphraser Bertold Brecht, selon la formule qu'il avait utilisée en d'autres circonstances, ce crime est un crime sans nom puisqu'il n'est pas directement nommé et qualifié comme crime d'Etat ; ce crime est sans adresse puisque les responsabilités écrasantes de Maurice Papon et du gouvernement que dirigeait Michel Debré ne sont pas clairement nommées. Et donc nous espérons que, dans un avenir proche, un pas supplémentaire sera effectué pour reconnaître effectivement que ce qui a été perpétré le 17 octobre 1961 ne relève pas d'une répression, aussi sanglante soit-elle, mais constitue bien un massacre. Et nous sommes un certain nombre à exiger que cela soit reconnu comme crime d'Etat puisque c'est bien l'Etat qui, ce jour-là, a agi en massacrant des manifestants qui étaient réunis pacifiquement à l'appel du FLN. Nous avons d'autres revendications, la principale étant l'ouverture et le libre accès des archives. Il faut rappeler que sur ce point, la France a l'une des législations les plus restrictives parmi les Etats démocratiques et, de ce point de vue-là, le collectif demande et continuera de demander que la législation relative à l'accès aux archives soit modifiée.
-La mobilisation continue ?
De mon point de vue, la mobilisation doit continuer puisque nous avions d'autres revendications relatives à l'accès aux archives, à l'enseignement. Nous continuerons à nous rassembler tous les ans, le 17 octobre, pour que cela soit effectif et pour que ces paroles soient suivies d'actes. Aux membres du Sénat et de l'Assemblée nationale présents ici, avec leur écharpe tricolore, nous demandons qu'ils déposent dans les plus brefs délais une proposition de loi pour que la reconnaissance du crime d'Etat du 17 octobre 1961 soit effectivement reconnu, pour que le libre accès aux archives soit garanti. Pour ces raisons, nous serons encore là l'année prochaine, pour qu'au-delà des déclarations, des actes précis soient effectués. Enfin, parce qu'il est impossible de détacher le 17 Octobre 1961 des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité qui ont été commis pendant la guerre d'Algérie, nous devons continuer à exiger la reconnaissance de l'ensemble des crimes coloniaux commis par les IIIe, la IVe et Ve Républiques.
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Pierre Mairat. Avocat, coprésident du MRAP : «Une première victoire incontestable»
-Vous dites victoire ?
C'est incontestablement une première victoire, il ne faut pas bouder notre plaisir, c'est immensément important que la République française, à travers la plus haute personnalité au sommet de l'Etat, ait pu reconnaître la répression sanglante du 17 Octobre 1961. Est-ce suffisant ? Non. Il faut désigner précisément les choses et permettre aux historiens de réaliser leur travail et de traduire ce travail dans les livres scolaires. Il faut qu'il y ait effectivement la reconnaissance et l'écriture de cette page d'histoire. Une fois écrite, cette page pourra être tournée pour passer à autre chose, notamment à l'amitié entre les peuples algérien et français et les relations entre les deux pays. Cette reconnaissance a été obtenue grâce à la mobilisation du mouvement associatif mais aussi par deux procès : le premier a été celui de Maurice Papon qui était secrétaire général de la préfecture de la Gironde et qui a été jugé pour sa responsabilité dans la déportation de juifs à Bordeaux et, avec Mouloud Aounit, nous avons fait témoigner Jean-Luc Einaudi ; le second procès a été initié par Maurice Papon lui-même qui voulait faire condamner Jean-Luc Einaudi. Et à la suite de ce second procès en diffamation, qu'il a perdu, la vérité a fait une avancée considérable.
-Quelle serait la prochaine étape pour les militants de la lutte contre l'amnésie ?
La prochaine étape, c'est réclamer une station de métro, pourquoi pas, au nom du 17 Octobre 1961.
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Edwy Plenel. Directeur de Médiapart : «Vérité et réconciliation pour construire une nouvelle fraternité franco-algérienne»
-Etes-vous satisfait du rôle joué par l'Appel impulsé par Médiapart ?
Nous sommes satisfaits de la déclaration du président Hollande, il a fallu aller lui rappeler sa promesse puisqu'il avait signé cet appel que Médiapart avait lancé avec Au nom de la mémoire. Et donc cela paie toujours de porter son exigence. Mais ce n'est qu'une étape sur le chemin. Ce n'est pas seulement la reconnaissance du 17 Octobre 1961 qu'il faut faire, il faut, et c'était le sens de notre appel avec Au nom de la mémoire, à la fois faire la vérité de l'histoire – c'est en chemin –, il y a eu des expositions, sauf certaines qui ont été interdites comme le travail que voulait faire Benjamin Stora, assumer la vérité de l'histoire, ne pas avoir de honte à reconnaître ses fautes. Ce qui permettra la réconciliation des mémoires. Vérité et réconciliation, nous employons ce terme issu de l'Afrique du Sud pour construire une nouvelle fraternité franco algérienne. C'est ce que nous appelons de nos vœux et il y a du chemin à faire car nous avons des adversaires, y compris dans le pouvoir actuel ; il y a ceux qui pointent les musulmans, les Arabes, l'islam ; ceux qui grossissent les faits de terrorisme au lieu d'essayer d'apaiser les choses ; ceux qui désignent un ennemi intérieur qui serait lié à nos compatriotes de culture, de foi ou d'origine musulmane.
-Et le rôle de Médiapart pour ce faire ?
Médiapart est un journal fondé sur la relation, sur la mise en relation. Nous sommes sur internet, internet n'a pas de frontière, internet n'a pas de papier, pas de passeport, pas de carte d'identité. Nous sommes sur un pont (Saint-Michel) ce soir, et pour moi le rôle de Médiapart c'est d'être un pont.


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