Un élu de l'APC, membre de la commission des marchés, Mohamed Benallal, magistrat à la retraite, a saisi par courrier le wali pour dénoncer des «anomalies portant sur le marché de prestations de fournitures». D'autres faits similaires reprochés à l'exécutif communal par trois élus n'ont trouvé aucun écho auprès de ce dernier malgré nos sollicitations pour rendre compte de son point de vue. Cette fois-ci encore, demandant délai sur délai pour nous communiquer ses objections ou clarifications, l'exécutif s'est résolu au silence. Pourtant, il est contesté le fait que «le registre de délibération de la commission des marchés ne reflète pas (…) la réalité de ce qui se fait et ce qui se dit dans la dite commission». Ce procédé aurait été dénoncé par plusieurs plis recommandés envoyés par le pétitionnaire. Pour ce qui est des anomalies constatées, ce dernier note que, pour ce qui est des conventions de fournitures obligatoires, les prix conclus avec un fournisseur résidant hors wilaya sont de très loin supérieurs à ceux du marché local au détail. Ainsi, à titre d'exemple: «la lampe 125 qui, chez le marchand le plus cher à Béni-Saf, de 180 DA/unité, est facturée dans la convention signée avec le fournisseur pour un prix 980 DA/unité soit 545% plus chère». De même, l'accusateur relève que le tube néon 0.60 à 70 DA au prix marché est tarifé à 220 DA soit 314%, la coupe câble l'est à 166%, le balai avec manche à plus de 307%, le frottoir à 320%, le fil électrique à 750%. Dans son réquisitoire, l'élu s'interroge pourquoi il n'a pas été fait de même qu'avec la convention avec un fournisseur de peinture, résiliée pour cause «d'exagération de prix». «Pis, précise-t-il, d'autres conventions portant sur les fournitures diverses présentent des prix d'articles inimaginables, à titre d'exemple, un climatiseur sans aucune référence est taxé avec un prix de 78000DA/unité alors qu'au marché local il est cédé pour moins de 30.000DA avec référence de qualité». M. Benallal qui mène une bataille contre l'exécutif depuis quelque temps, rejette l'argumentation du S/G de la commune et de certains membres de l'APC qui mettent en cause les potentiels fournisseurs locaux dont les prix sont raisonnables et qui refuseraient de soumissionner à chaque publication d'un appel d'offres. En conclusion de sa missive, l'élu demande à la tutelle communale «d'ouvrir une enquête générale allant de la procédure d'acquisition des matières et fournitures jusqu'à la sortie du stock pour une utilisation effective» tout en signalant que «l'inventaire du patrimoine de la commune n'aurait jamais été établit à ce jour». En fait, et sans vouloir dédouaner qui que ce soit, ni accuser spécialement quiconque, la situation dénoncée par l'élu contestataire n'est pas spécifique à Béni-Saf. Elle est entrée dans les mœurs dans la gestion des communes depuis plusieurs décennies, à une époque où la concurrence entre fournisseurs et prestataires de services a cessé d'exister. Pour rappel, les collectivités locales étaient devenues insolvables du fait qu'elles vivaient jusqu'à ces dernières années avec des budgets très largement déficitaires. Ces derniers ont été équilibrés grâce à un soutien consenti par le budget de l'Etat du fait de l'embellie financière procurée par la hausse du prix du pétrole depuis le début des années 2000. Les communes souffraient alors de chiches crédits de paiement, ce qui allongeait exagérément les délais de règlement des factures déposées par les fournisseurs et prestataires de services. Cette situation pénalisante pour les soumissionnaires a entrainé le recours à la surfacturation autant pour limiter les pertes que pour en tirer des surprofits, ce qui n'a pas manqué d'attiser les convoitises tapies dans le circuit de la passation des marchés que du bureaucratique mode de paiement administratif. C‘est dire donc que la situation est bien plus complexe qu'il n'y parait à première vue.