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«L'Arabie Saoudite et le Qatar, pays pourvoyeurs de fonds au terrorisme»
Badra Gaâloul. Présidente du Centre International des Etudes Stratégiques Sécuritaires et Militaires (CIESSM).
Publié dans El Watan le 23 - 11 - 2015

Dans cet entretien qu'elle a bien voulu nous accorder lors de son passage à Annaba dans le cadre d'une conférence internationale sur la sécurité en Méditerranée, organisée à la faculté de droit (université Badji Mokhtar), Mme Gaâloul, experte tunisienne, présidente du CIESSM, basé au Bardo, dont le musée a été le théâtre, le 18 mars dernier, d'un attentat terroriste ayant coûté la vie à une vingtaine de personnes, apporte, en tant que spécialiste dans la science de la sociologie sécuritaire et militaire, un éclairage inédit sur les mécanismes de financement mis en place par Daech pour développer sa propre économie de guerre.
Au lendemain des attentats du vendredi 13 novembre à Paris, la brûlante question du financement du terrorisme est revenue avec force sur le devant de la scène internationale. D'où puise l'Etat islamique (EI) tout l'argent dont il dispose ?
Beaucoup d'interrogations sur l'origine des ressources dont dispose Daech, ou l'Etat soi-disant islamique. D'où puise-t-il l'argent pour acheter les armes et financer ses opérations ?
Cette organisation, comment est-elle devenue si riche, la plus forte que l'histoire ait connue ? Personne n'ignore que Daech a un budget qui dépasse les deux milliards de dollars avec un excédent estimé à 250 millions de dollars.
Cet argent est-il le fruit de la seule exploitation des puits pétroliers dont il s'est emparé en Irak et en Syrie ? Ce qui est sûr, d'après nombre de rapports et enquêtes concordants, les sources de financement sont multiples.
Elles varient selon les zones sous le contrôle de l'organisation, comme Dir El Zour et Raqqa. La vente en contrebande du pétrole constitue la plus importante source de financement.
Daech a entre les mains les 2/3 de la production des hydrocarbures syriens avec une moyenne de 250 000 barils/j, l'équivalent de 2 à 4 millions de dollars/j engrangés.
Il y a ensuite l'argent issu des rançons exigées en contrepartie de la libération d'otages étrangers, lorsqu'on sait que plusieurs ressortissants étrangers, des fonctionnaires internationaux, journalistes occidentaux et arabes sont régulièrement enlevés par l'organisation.
Certains rapports évaluent ces revenus à plus de 25 millions de dollars/an. Viennent ensuite le pillage des ressources, des biens particuliers, des fournitures des hôpitaux, des centres commerciaux, des restaurants et des structures de gestion de l'eau et l'électricité dans les zones qu'il maîtrise. Tout cela lui rapporte plusieurs millions de dollars.
Il faut également ajouter les revenus de la contrebande constitués du commerce du pétrole qui est vendu à un prix en deçà des cours mondiaux, et ce, sans parler des armes, objets d'art et biens culturels et traite d'êtres humains.
Certains parlent même de donations privées dont bénéficie Daech auprès de «bienfaiteurs» locaux qui soutiennent le djihadisme…
A ce propos, différentes enquêtes internationales ont fait ressortir que des particuliers, fidèles de la pensée djihadiste, lèguent tous leurs biens à Daech, car persuadés de la noble cause qui l'anime.
On estime à plus d'un million dollars/mois ces donations privées versées à l'organisation. Il faut également ajouter d'autres types de donations, mais cette fois-ci en provenance de l'étranger, à l'image de pick-up 4x4 et camions, tous types confondus, et ce, en plus de grosses sommes d'argent. Il s'est récemment avéré que l'origine de ces véhicules et de l'argent était l'Arabie Saoudite et le Qatar.
L'extorsion de fonds est, en outre, une source de revenus pour l'EI. Des paysans, des agriculteurs et de petits fonctionnaires sont tenus de s'acquitter de dîmes s'ils tiennent à leur vie et à celle de leur famille. Aussi, des entreprises locales doivent payer des taxes mensuelles évaluées à 8 millions de dollars.
Daech engrange aussi de grosses sommes grâce aux taxes foncières mensuelles qu'il extorque aux propriétaires de commerces et habitations, et ce, sans oublier la location, à des prix exorbitants, de terres agricoles et patrimoines fonciers relevant des domaines public et privé dont il s'est emparés. Le vol en règle auquel se livre Daech lui rapporte gros.
A ce sujet, plusieurs sources parlent du pillage de villages entiers après le retrait de l'armée irakienne d'un grand nombre de villes. Des témoins locaux ont fait état de racket dont ont fait l'objet des maisons, des commerces, auxquels s'ajoute le braquage de la banque centrale de Mossoul.
Des dizaines de millions de dollars y ont été volés, de même que plusieurs autres millions issus des cambriolages dont furent victimes plusieurs grandes entreprises privées irakiennes. Il y a enfin la zakat : parmi les plus importantes sources de revenus non négligeables, les produits agricoles issus d'exploitations agricoles privées, syriennes et irakiennes.
Ces produits subtilisés sont revendus par Daech sur les marchés des pays voisins via des intermédiaires territoriaux et internationaux à des prix défiant toute concurrence.
Ce qui lui génère des plus-values inouïes. D'ailleurs, un haut responsable du ministère de l'Agriculture irakien a révélé que l'organisation terroriste contrôle actuellement environ 1/3 de la production irakienne de blé, soit 4% du commerce global de céréales et autres produits agricoles.
Dans l'une de vos déclarations publiques, vous disiez que la montée en flèche du crime organisé aurait contribué au renforcement des capacités matérielles, humaines et surtout financières des organisations terroristes. Pourriez-vous nous en dire davantage ?
Nous considérons que les organisations terroristes puisent leur force du soutien moral de pays très influents qui cherchent à faire de Daech ce cancer endémique et ravageur qui doit affecter la région.
Pour cela, ils lui fournissent la plateforme et le soutien logistique, surtout financier. Ainsi, le blanchiment d'argent ainsi que le rachat par ces mêmes pays du pétrole sur le marché noir, dont le prix du baril a atteint 25 dollars, alors que les cours mondiaux étaient, en conditions extrêmes, de l'ordre de 60 dollars, a servi à grossir à coup sûr les caisses de l'EI.
La traite de personnes est un autre phénomène de Daech sur lequel ces pays fermaient l'œil. Et ce, au même titre que le trafic illicite d'antiquités et le commerce de blockbusters dans lesquels s'est spécialisée l'organisation après la vente du pétrole. Ainsi, la corrélation entre la mafia de la grande contrebande et le terrorisme est aujourd'hui établie.
Ce que nous appelons chez nous le mariage coutumier (orfi) entre la mafia de la contrebande et le terrorisme. Cette union facilite la voie aux transactions et les affaires transnationales, notamment en termes de trafic d'armes, de drogue et la traite d'êtres humains.
Votre pays a été frappé par deux attentats spectaculaires qui ont coûté la vie à des dizaines de personnes entre nationaux et étrangers. Peut-on parler de financements externes des deux opérations ?
Pour les armes, selon des rapports et des sources officielles, il y a beaucoup de magasins d'armes disséminés dans les villes et dans les lieux à l'intérieur du pays.
Ces armes ont été introduites dans notre pays suite à l'anarchie provoquée par la révolution. Aussi, un important arsenal d'armes a été fourni par le Qatar à la Libye via la Tunisie du temps du président actuel Essebsi. Il s'agit de grandes quantités et l'endroit qui les abrite n'a toujours pas été révélé.
En ce qui concerne le trafic et le commerce illicite d'armes et de munitions, ils sont en pleine expansion dans le sud du pays. L'origine étant la Libye où règnent l'instabilité et le chaos et où la présence d'armes est présente dans de très grandes proportions.
Certaines monarchies du Golfe, notamment l'Arabie Saoudite et le Qatar, sont, encore une fois, pointés du doigt par les puissances occidentales. EIles sont accusées d'être les pourvoyeuses d'argent, d'agitatrices et de propagandistes du djihadisme. Qu'en pensez-vous ?
Effectivement, l'Arabie Saoudite et le Qatar sont considérés comme étant fortement impliqués dans le bourbier syrien.
Ces deux monarchies font partie du groupe qui a soutenu l'armement de l'opposition syrienne. Mieux, elles se sont engagées à la fournir en logistique ainsi qu'à la soutenir avec de l'argent, de l'équipement et des armes.
La dernière déclaration du ministre saoudien des Affaires étrangères est édifiante lors du sommet de Vienne, elle était franche et sans équivoque : les Saoudiens ont exprimé leur opposition aux frappes anti-Daech. Ils désapprouvent la coalition qui a déclaré la guerre à l'EI.
Pour eux, seul le départ du pouvoir de Bachar Al Assad peut rétablir la stabilité dans la région. Aussi, lors du sommet du G20, le président Poutine avait laissé entendre qu'il existe des pays pourvoyeurs de fonds et de logistique à destination de Daech. Sans les citer nommément, le chef d'Etat russe avait fait allusion à l'Arabie Saoudite et au Qatar.
On imagine aussi que Daech est une extension du wahhabisme que l'Arabie Saoudite veut répandre. Pour toutes ces raisons nous considérons que ces deux monarchies sont très impliquées dans le soutien de Daech, et ce, à tous les niveaux.
La traque aux avoirs suspects en rapport avec le financement du terrorisme s'avère être, aujourd'hui, l'une des priorités absolues à l'échelle mondiale. Quels sont, selon vous, les mécanismes et les garde-fous à mettre en place pour un meilleur contrôle des mouvements de capitaux douteux dont se nourrit Daech ?
Tarir les sources de financement du terrorisme commence essentiellement par la nécessité de couper les soutiens de tous bords. La proposition formulée par le président Poutine lors du Conseil de sécurité de l'ONU est une revendication légitime.
Tous les Etats doivent travailler et se mobiliser pour frapper Daech en coupant tout approvisionnement matériel que nous considérons comme premier mécanisme.
Aussi, il faut que tous les pays s'engagent à interdire à leurs populations et à leurs capitaux respectifs de traiter ou de conclure toute transaction commerciale avec l'organisation et les milieux qui lui sont affiliés.
Devraient être passibles de poursuites pénales internes et internationales tous ceux qui enfreindront ces règles, y compris les pays qui ferment les yeux sur de telles pratiques. Aussi, il faut couper la route aux mafias et aux réseaux de contrebande aux fins d'éradiquer les échanges commerciaux entre eux.
En outre, tous les pays doivent renforcer la sécurité de leurs frontières respectives pour contrecarrer l'expansion des capacités de financement des groupes terroristes qui agissent dans l'anonymat ainsi que celles des cellules dormantes.
La place financière suisse, où se cache une bonne partie des avoirs suspects, n'a pas échappé aux critiques acerbes de certaines puissances occidentales consécutives aux derniers attentats de Paris, d'autant que l'interconnexion entre les phénomènes de blanchiment d'argent et terrorisme est aujourd'hui avérée. Votre point de vue ?
Il est vrai qu'il existe une relation étroite et solide entre le blanchiment et le terrorisme majeur. Il est impératif de travailler sur l'activation et la réactivation de toutes les lois et dispositifs répressifs nationaux et internationaux de ces deux phénomènes extrêmement dangereux, car contribuant de manière directe à la promotion de l'économie du sang (guerre) ainsi qu'à l'épanouissement des «multinationales» terroristes.


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