Alexandre Alekhine est né le 31 octobre 1892 à Moscou, dans une famille aisée de l'empire russe. Alexandre a un frère aîné Alexeï, contre lequel il joua des parties, et une sœur, Varvara. Il apprend à jouer aux échecs à 7 ans. Alekhine fait ensuite de brillantes études et apprend le français et l'allemand au lycée. Après quelques tournois par correspondance, il dispute son premier tournoi important à Düsseldorf en 1908 et termine quatrième. En 1909, il entre dans l'Ecole de droit de Saint-Pétersbourg. Il obtient ses premiers succès au championnat de Russie amateur disputé à Saint-Pétersbourg en 1909, puis aux tournois internationaux de Stockholm en 1912 et de Scheveningen en 1913. En 1914, il remporte le championnat de Russie, ex æquo avec Aaron Nimzowitsch, et la même année, termine troisième du très fort tournoi international de Saint-Pétersbourg remporté par le champion du monde Emanuel Lasker devant son futur successeur José Raoul Capablanca. Il participe au tournoi de Manheim lorsque la Première Guerre mondiale éclate et interrompt le tournoi. Alekhine est arrêté par les autorités allemandes. Il parvient cependant à rentrer en Russie. Il est blessé deux fois à la guerre et est ensuite plusieurs fois médaillé comme collaborateur de la Croix-Rouge. Après la guerre et la Révolution russe, Alekhine remporte le championnat de Moscou et le premier championnat de la République de Russie en 1919-1920. En mai 1921, à l'occasion de son mariage, il obtient l'autorisation d'un voyage en Lettonie, il quitte définitivement la Russie d'abord pour l'Allemagne, puis pour la France, où il arrive en janvier 1922. En 1921, il remporte les trois tournois auxquels il participe. Par la suite, Alekhine refusera toujours de revenir en Union soviétique. RECORD DE PARTIES SIMULTANEES à L'AVEUGLE En 1924, Alekhine termine troisième du tournoi de New York, derrière les champions du monde Emanuel Lasker et Capablanca. Le 1er février 1925, à Paris, où il réside, Alekhine dispute une partie simultanée sur 28 échiquiers à l'aveugle avec un score de (+22 -3 =3). Le lendemain, il reconstitue précisément, de mémoire, les vingt-huit parties disputées. L'année précédente, Alekhine avait déjà disputé une autre séance record à l'aveugle, sur 26 échiquiers, à l'issue du tournoi de New York 1924. Son record fut porté à 32 parties lors d'une simultanée à l'aveugle disputée à Chicago en 1933. CHAMPION DU MONDE EN 1927 En 1927, Alekhine termine deuxième du tournoi de New York derrière le nouveau champion du monde Capablanca (Lasker ayant refusé de participer au tournoi). Avec ce résultat, Alekhine devient le challenger naturel du champion du monde qu'il rencontre à Buenos Aires en 1927. La Fédération française des échecs intervient en avril 1927 pour qu'Alekhine puisse participer à la tête de l'équipe française au premier « Tournoi des Nations » qui doit avoir lieu en juillet 1927 à Londres, et la naturalisation d'Alekhine est signée le 5 novembre 1926 Alekhine devint champion du monde en 1927 en battant à Buenos Aires le tenant du titre, le Cubain José Raoul Capablanca, sur le score de 18,5 à 15,5 (+6, -3, =25), au terme d'un match marathon de plus de deux mois et trente-quatre parties. En dépit de multiples négociations, le match revanche promis au Cubain ne fut jamais organisé. A l'époque, c'était encore les champions qui choisissaient les challengers. Alekhine domina le monde des échecs pendant toute la période entre 1929 et 1933 : il réalisa l'exploit de se classer premier sans interruption dans les quinze tournois auxquels il participa, cette série étant arrêtée par une deuxième place au tournoi d'Hastings, derrière Salo Flohr. Au lieu de défier Capablanca comme il l'avait pourtant promis, il choisit comme challenger son ancien compatriote Bogoljubov, moins redoutable. Alekhine conserva facilement son titre face à Efim Bogoljubov en 1929 (15,5 à 9,5 ; +11, -5, =9), puis en 1934 (15,5 à 10,5 ; +8, -3, =15). A la surprise générale, Alekhine perdit son titre en 1935 face au Néerlandais Max Euwe (14,5 à 15,5 ; +8, -9, =13) . A la suite de sa défaite, il reprit le titre de champion du monde deux ans plus tard, en 1937, lors du match revanche (15,5 à 9,5 ; +10, -4, =11). En 1938, le tournoi « Avro », joué dans neuf villes différentes aux Pays-Bas, fut organisé pour départager les candidats éventuels à un match de championnat du monde contre Alekhine qui conserva néanmoins la possibilité de désigner son challenger. Le tournoi fut remporté par l'Estonien Paul Keres et l'Américain Reuben Fine, mais Alekhine entreprit des négociations avec le troisième du tournoi Mikhaïl Botvinnik. Les pourparlers furent interrompus par la Seconde Guerre mondiale et sa disparition en 1946. Réputé pour son style de jeu combinatoire, et sa vivacité d'esprit, Alekhine a légué une série de parties mémorables. Partie n° 1 Blancs : Rodzinski Noirs : Alekhine Alexander Paris 1913 1.e4 e5 2.Cf3 d6 3.Fc4 Cc6 3...Fe6 4.Fxe6 fxe6 5.d4 exd4 6.Cxd4 e5 (6...Df6 7.Dh5+ g6 (7...Df7 8.Dh3 Rd7 9.0–0±) 8.Db5+ Cd7 9.Dxb7 Tb8 10.Dxa7 Ce7 11.c3± ) 7.Ce6 De7 8.Dh5+ g6 9.Dh3 Cf6 10.Cc3 c6 11.0–0 Ca6 12.f4 ; 3...Cf6 ? 4. Cg5 d5 5.exd5 Cxd5 6.Df3 Dxg5 7.Fxd5± ; 3...c6 4.d4 d5 5.exd5 ! e4 6.Ce5 cxd5 7.Dh5 g6 8.Cxg6 fxg6 9.De5+ De7 10.Dxh8± ; 3...f5 4.d4 fxe4 5.Cxe5 d5 (5...dxe5 6.Dh5+ Rd7 7.Df5+ Rc6 8.Dxe5 a6 9.d5+ Rb6 10.Fe3++-) 6.Dh5+ g6 7.Cxg6 Cf6 8.De5+ Fe7 9.Cxh8 dxc4 10.Cc3 ; 3...Fe7 4.d4 exd4 5.Cxd4 Cf6 6.Cc3 4.c3 Fg4 5.Db3 ? 5.d4 De7 6.Fe3 Cf6 7.Db3 Cd8 8.Cbd2 g6 9.dxe5 5...Dd7 6.Cg5 6.Fxf7+ ? Dxf7 7.Dxb7 Rd7 ! 8.Dxa8 Fxf3 9.gxf3 Dxf3 10.Tg1 Dxe4+ 11.Rd1 Df3+ 12.Re1 (12.Rc2 Cd4++-) 12...e4 ! 13.Ca3 (13.Tg3 Dh1+ 14.Re2 Cf6 ! ... £c1,¤h5(14...Cge7) ) 13...Ce5 !+- 14.Dxa7 Cd3+ 15.Rf1 Dd1+ 16.Rg2 Cf4+ 17.Rg3 (17.Rh1 Df3+) 17...Df3+ 18.Rh4 Fe7+ 19.Tg5 Dh3mat ; 6.Dxb7 Tb8 7.Da6 Tb6 8.Da4 f5‚ 6...Ch6 7.Fxf7+ ? 7.Dxb7 Tb8 8.Da6 Tb6 9.Da4 Fe7ƒ 10.d4 exd4 11.0–0 f6 ?! 12.f3 7...Cxf7 8.Cxf7 Dxf7 9.Dxb7 Rd7 ! 10.Dxa8 Dc4 ! 11.f3 Diagramme n° 1 Prépare le terrain pour le fou noir sur case noire ! 11 ...Fxf3 ! 11...Cd4 ? 12.d3 ! Dxd3 13.cxd4 Fxf3 14.Cc3 ! 12. gxf3 Cd4 ! 13.d3 13.cxd4 Dxc1+ 14.Re2 Dxh1 15.d5 Dxh2+ 16.Rd3 Dg1 ! 17.Dc6+ Rd8 13...Dxd3 ! 14.cxd4 Fe7 ! 15. Dxh8 Fh4mat 0–1 Partie n° 2 Blancs : Alexandre Alekhine Noirs : Von Feldt Tarnopol 1916 Dans la partie à l'aveugle qui suit, il effectue un ballet au centre de l'échiquier qui matera le roi adverse. Jouant contre cinq adversaires à la fois, la combinaison qu'il joue est mondialement célèbre. 1. e4 e6 2. d4 d5 3. Cc3 Cf6 4. exd5 Cxd5 5. Ce4 f5 Les noirs jouent sans considérer les principes élémentaires de la stratégie. Alekhine est dorénavant certain de gagner, mais c'est la façon spectaculaire dont il s'y prend qui rend cette partie unique. 6. Cg5 Fe7 7. C5f3 c6 8. Ce5 0-0 9. Cgf3 b6 10. Fd3 Fb7 11. 0-0 Te8 12. c4 Cf6 13. Ff4 Cbd7 14. De2 c5 Les blancs contrôlent le centre et leurs pièces sont pointées vers le roque adverse. Les noirs ont ouvert leur roque et le pion en e6 est sans protection. Alekhine profite de ces deux facteurs pour mater son adversaire. Diagramme n° 2 15. Cf7 !! Un coup magnifique ! Les noirs doivent prendre le cavalier, car s'ils déplacent la dame, un mat étouffé suivra en commençant par 16. Dxe6. 15. ... Rxf7 16. Dxe6 !! La pointe ! Si les noirs prennent la dame, alors suit 17. Cg5 mat. s'ils jouent 16. ... Rf8, alors 17. Cg5 décide de l'issue de la partie. 16. ... Rg6 Alekhine annonce mat en deux coups. 17. g4 Fe4 18. Ch4 mat Partie n° 3 Blancs : Alekhine Alexander Noirs : Yates Frederick (C01) Hastings 1926 1.e4 e6 2.d4 d5 3.Cc3 Fb4 4.exd5 exd5 5.Fd3 Cf6 6.Fg5 0–0 7.Cge2 Te8 8.0–0 c6 9.Cg3 Cbd7 10.Ch5 Fe7 11.Te1 h6 12.Fh4 Cxh5 13.Fxe7 Txe7 14.Dxh5 Cf6 15.Dh4 Fd7 16.Te5 Txe5 17.dxe5 Ch7 18.Dxd8+ Txd8 19.f4 Te8 20.Rf2 Cf8 21.b4 Ce6 22.g3 Rf8 23.Te1 g6 24.b5 Cc5 25.bxc6 bxc6 26.Tb1 Re7 27.Tb4 h5 ?! Le fou commence à devenir mauvais 27...g5 28.Ce2 Rd8 29.Tb8+ ! Re7 30.Txe8+ Fxe8 31.Re3 La finale est nettement meilleure pour les blancs qui ont un cavalier centralisé et le fou en e8 est assez mauvais. 31...Cxd3 ?! Rentrant dans une finale bon cavalier contre mauvais fou 31...f6 32.cxd3 c5 Diagramme n° 3 33.d4 ! Un coup profond qui force un autre pion à venir sur cases blanches. Beaucoup de joueurs n'auraient pas envisagé de jouer ce coup car il donne un pion passé aux noirs mais ce facteur est moins important que la faiblesse sur cases noires. 33...c4 34.f5 ! Belle démonstration technique 34...g5 34...gxf5 35.Cf4 35.h4 ! Fixant une nouvelle faiblesse 35...f6 36.hxg5 ! La majorité noire à l'aile-roi sera facilement contrôlée par le fou 36...fxg5 37.Cg1 ! Fd7 37...h4 38.f6+ Re8 38...Re6 ? 39.Ch3+- 39.Cf3 ! forçant l'avant-dernier pion à venir sur cases blanches 39...g4 40.Ch4 Fe6 41.Cg6 Ff7 42.Cf4 Rd7 43.Re2 a5 44.Re3 Fg8‡ 45.Cxh5 Ff7 46.Cf4 Fg8 47.Ce2 Fe6 48.Rf4 Re8 49.Rg5 Rf7 50.Cc3 Rf8 51.Rg6 Rg8 52.f7+ Rf8 53.Rf6 Fxf7 54.e6 Fh5 55.Cxd5 Fe8 56.Cc3 1–0
