En visite en France le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi voudrait conforter de nouveau le rôle régional de son pays sérieusement brouillé par la parenthèse du «printemps arabe». Cette visite, la première en Europe depuis sa prise de pouvoir en juillet 2013 puis son élection en mai, est dominée par les questions sécuritaires dont l'épineux dossier libyen. Les questions qui fâchent ne seront évidemment pas abordées. Malgré la répression qui a fait plus de 1 400 morts et 15 000 personnes emprisonnées le nouveau pouvoir égyptien incarné par le président Sissi, voudrait reconquérir une légitimité internationale. Aidé il est vrai par des capitales occidentales intéressées. Le raïs reste «un partenaire stratégique» incontournable, selon Rome, et l'Egypte «un grand pays et grand partenaire de la France», selon Paris. Cependant la politique intérieure de l'Egypte, marquée par l'éradication du mouvement des Frères musulmans classés «organisation terroriste», ne constituera évidemment pas le cœur des discussions, dominées plutôt par la sécurité régionale et les questions économiques. La poudrière libyenne et les menaces qu'elle fait peser sur toute la région figure en tête des préoccupations entre le Caire et Paris. L'Egypte, déjà en butte à ses propres groupes djihadistes dans le nord du Sinaï, partage plus de 1 000 km de frontière avec la Libye, et est directement confronté par le désordre dans lequel se trouve ce pays depuis l'intervention de l'Otan et la chute de Kadhafi. Des rumeurs sur une intervention directe de l'Egypte sur le terrain des opérations libyen sont distillées ça et là depuis des semaines. L'Egypte a même été accusée, notamment par les Etats-Unis, d'avoir lancé en août des raids aériens dans le secteur de l'aéroport de Tripoli, avec les Emirats arabes unis. Ce que le Caire a formellement démenti. Les sujets économiques seront incontestablement de la partie. Le Caire voudrait organiser au premier trimestre 2015 une conférence économique internationale pour relancer son économie exsangue. Le constructeur naval français Dcns a signé au début de l'été un contrat estimé à un milliard d'euros pour fournir quatre corvettes Gowind à la Marine égyptienne. Des discussions sont par ailleurs en cours sur le renouvellement de la flotte égyptienne d'avions de combat Mirage 2000. Toujours est-il que le voyage de Al-Sissi en France s'inscrit dans une volonté de remettre le pays dans son rôle véritable en rapport avec son poids dans le monde arabe et africain. La crise politique égyptienne avec ses conséquences aura éloigné ce grand pays de la centralité que le nouveau pouvoir au Caire voudrait récupérer. M. B./Agences
