L'aspect poétique dans les œuvres du grand homme de lettres algérien, Mohamed Dib, qui appartient à la génération fondatrice de la littérature algérienne d'expression française, était au cœur de la cinquième rencontre sur Mohamed Dib, consacrée, samedi passé à Tlemcen, au thème «Lieux d'écriture». Lors de cette rencontre, le professeur Benmansour El Hadi de l'université de la Sorbonne, et président de la fondation internationale Les amis de Mohamed Dib, s'est appuyé sur des documents et des témoignages de l'épouse de l'écrivain, Colette Dib, pour étayer le penchant pour la poésie et la prose chez Mohamed Dib rapporte l'APS. La fille du romancier, Assia Dib, a récité, lors de cette rencontre organisée par l'association La grande maison, de Tlemcen, en collaboration avec la direction de la culture de la wilaya, des strophes de poèmes de son père, tout en apportant ses remarques et ses impressions. Des intervenants et conférenciers, dont des universitaires et hommes de culture d'Algérie, de France et du Maroc, se sont accordés pour souligner que Mohamed Dib est un symbole de la littérature algérienne de langue française dont les écrits et les pensées ont une connotation culturelle imprégnée de la civilisation et la société algérienne profonde. A ce sujet, certains ont cité, comme arguments, des termes en dialecte utilisés volontairement dans les œuvres de Mohamed Dib, dénotant de la personnalité algérienne authentique. Pour rappel, c'est en 1946 que Mohamed Dib publie son premier poème dans la revue Les Lettres, publiée à Genève sous le nom de Diabi. Parmi les nombreuses distinctions qu'il a obtenues tout au long de son parcours d'homme de lettres aux multiples facettes, citons le Prix Mallarmé, obtenu en 1998 pour son recueil de poèmes L'enfant-jazz. Sur un site consacré aux écrivains algériens, sur la page dédiée à l'auteur de La grande maison, on peut lire un texte inédit non daté, reproduit avec l'aimable autorisation de Mme Dib et où Mohammed Dib écrit à propos de sa conception de la poésie : «Le poème, paroles à dire à l'origine, a dû s'adjoindre le chant pour répondre à telle ou telle fin propitiatoire, thérapeutique, laudatrice, exorcisante ou simplement amoureuse, et y trouver sa fin, sa consumation par consommation. Puis sans doute a-t-il pris conscience de soi - en tant que poème- et lui est-il venu le désir de durer [...]. Pourtant... Pourtant comme un réveil s'annonce, un frémissement de vie parcourt le poème-totem depuis quelque temps. Repris par la nostalgie de l'éphémère, de l'air (à chanter), il dépose son habit de bronze, ou tente de le déposer. Il se veut de nouveau périssable et tente de quitter la page imprimée pour réintégrer la voix. J'ambitionne de participer à cette libération par des poèmes qui se veulent lisibles juste le temps de retrouver le chemin de la voix pour ensuite se dissiper au vent de cette voix et tomber dans l'oubli sitôt dits.» Sur le même site on peut également lire que Mohamed Dib lègue à l'Algérie, à la littérature et à la langue française, une œuvre intellectuelle considérable qu'il clôture avec Laëzza, recueil de quatre textes, qu'il a terminé deux jours avant sa mort (2 mai 2003 ndlr). Un recueil publié en 2006 aux éditions Albin Michel dont voici un extrait : «La vérité en soi n'existe pas, qui se présenterait sous forme d'entité platonicienne. Etres humains autant qu'inhumains, il nous faut hélas créer nos vérités puis espérer que quelques-unes parmi elles deviennent celles d'un assez grand nombre de gens et que, en tant que telles, elles restent et servent de repères, de points d'appui sur quoi fonder en confiance notre marche vers une plus grande compréhension de notre monde.» S. B./APS