L'idéal maghrébin porté par les élites intellectuelles et politiques au début du siècle dernier a focalisé à Oran le débat au colloque international sur les "Générations engagées et les mouvements nationaux". Considérée comme la pionnière du nationalisme maghrébin, cette génération de militants est issue, dans sa majorité, de familles traditionalistes et religieuses à l'instar, notamment, des Algériens Messali Hadj et Abdelhamid Benbadis et le Marocain Allel El Fassi, a rappelé l'historien français Benjamin Stora. Dans un exposé intitulé "les pionniers du nationalisme: Algérie et Maroc dans les années 1930", il a noté que cette même génération, dont les plus illustres représentants étaient nés, pour la plupart, entre la fin du 19 ème siècle et le début du siècle dernier, fut le "vecteur principal" de cet idéal. Le conférencier a observé que ce "rêve" a été poursuivi par la génération de la guerre (d'indépendance), avant qu'il ne soit suppléé par les projets d'édification des Etats-nations. Abordant cet idéal, partagé par les pères fondateurs des nationalismes maghrébins, le socio-historien Hassan Remaoun de l'université d'Oran l'a illustré par l'itinéraire "singulier" d'un militant indépendantiste marocain d'origine algérienne, Nadir Bouzar, qui, en dépit de son double engagement, a-t-il noté, demeure méconnu y compris des professionnels de l'histoire. Ce militant, natif de la région de Khemis Miliana (Aïn Defla), fut un "acteur très important de la structuration du mouvement national marocain et a largement contribué à la Révolution algérienne en prenant une part active dans l'affaire de l'acheminement des armes d'Egypte vers le port marocain de Tanger", a souligné le conférencier. Nadir Bouzar illustre également la désillusion des élites maghrébines vis-à-vis du projet assimilationiste, a expliqué M.Remaoun, en faisant référence, à ce titre, à "l'aveu" consigné dans le livre "J'ai cru en la France" à travers lequel son auteur (Nadir Bouzar) exprimait l'impossible concrétisation d'un tel projet, a-t-il ajouté. Les origines socio-géographiques et la dichotomie villes-campagne dans la formation et la manifestation de l'idéal indépendantiste au Maghreb et plus particulièrement en Algérie ont focalisé les débats.La campagne était le lieu d'expression du langage des armes, tandis que la ville était celui de la politique, a soutenu l'historien Mohamed Harbi. Pour Benjamin Stora, il n'y avait pas d'étanchéité entre les deux entités sociologiques, faisant valoir que le combat (pour l'indépendance) était le même. R.R