Les défenseurs des Droits de l'Homme en Pologne ont salué le verdict historique de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) condamnant Varsovie pour sa complicité dans le programme de prisons secrètes de la CIA, alors que le gouvernement réfléchit à faire appel. Le verdict de la CEDH est un verdict historique, a déclaré à la presse Draginja Nadazdin, directrice d'Amnesty International Pologne soulignant que la Pologne est devenue ainsi le premier pays de l'UE condamné pour complicité dans cette affaire. Le verdict sans précédent du Tribunal de Strasbourg prouve que la politique du gouvernement polonais destinée à balayer cette affaire sous le tapis s'est avérée être une politique à court terme, a déclaré lors de la même conférence de presse Irmina Pacho de la Fondation d'Helsinki pour les Droits de l'Homme, engagée dans l'enquête sur les prisons secrètes de la CIA en Pologne. Selon les deux ONG, la responsabilité pour cette affaire ne concerne pas uniquement les hommes politiques qui ont autorisé la création d'un tel centre (de la CIA en Pologne) mais également ceux qui plus tard ont entravé l'enquête, a encore souligné Mme Nadazdin. Le ministère polonais des Affaires étrangères a estimé que la décision de la CEDH était prématurée compte tenu notamment du fait que l'enquête du parquet polonais est en cours. La Pologne ne commente pas les verdicts de la Cour, nous respectons sa juridiction. A l'étape actuelle, je ne peux pas dire si nous allons faire appel ou pas. Nous allons prendre la décision après avoir analysé la décision de la Cour, a déclaré à la presse Marcin Wojciechowski, porte-parole du ministère soulignant que la Pologne disposait de trois mois pour faire appel. L'ancien Premier ministre polonais Leszek Miller a de son côté nié une nouvelle fois l'existence des prisons en Pologne. Je maintiens ma position que j'ai toujours exprimée sur cette question dans le passé: il n'y avait pas de prisons de la CIA en Pologne, a déclaré M. Miller, chef du gouvernement polonais de 2001 à 2004, époque à laquelle se réfère le verdict. Ce verdict est injuste et pas éthique. Injuste car il se fonde sur des rumeurs, des spéculations et des imputations. La documentation présentée par la Pologne a été rejetée par le Tribunal. Pas éthique, car le Tribunal place les droits des meurtriers et des terroristes au-dessus des victimes, a-t-il commenté. A quel prix le Tribunal pourrait évaluer les souffrances et la mort de milliers de gens tués à New York, Madrid ou Londres, s'est-il interrogé. La Cour européenne avait été saisie par Abu Zubaydah, un Palestinien de 43 ans, considéré par Washington comme un adjoint du chef d'Al-Qaïda Oussama Ben Laden, et par Abd al-Rahim al-Nashiri, un Saoudien de 49 ans, également considéré comme un des membres principaux d'Al-Qaïda. Varsovie a été condamnée jeudi par la CEDH pour son rôle dans les tortures subies par ces derniers sur son territoire en 2002-2003, avant leur transfèrement à la base américaine de Guantanamo (Cuba), où ils sont toujours détenus. La Pologne a coopéré à la préparation et à la mise en œuvre des opérations de remise, de détention secrète et d'interrogatoire menées par la CIA sur son territoire, ont tranché les juges européens à l'unanimité.