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la jeunesse algérienne n´admettra jamais d´être écrasée indéfiniment.
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 13 - 12 - 2009

Interview du colonel Mohamed Samraoui au Quotidien d'Algérie
13 décembre 2009
Seule une poignée d'officiers a eu le courage de dire non à la politique d'éradication d'une partie de la population. Parmi les officiers en retraite, nous notons le général Benyellès. Parmi ceux d'active et qui ont préféré l'exil, on note quelques uns dont vous qui avez accepté de dénoncer publiquement l'horrible répression. Comment expliquez-vous ce silence de vos collègues devant cette horreur et leur acceptation pour certains de participer à ces crimes contre leur propre peuple ?
Il est très difficile de répondre à une question pareille, car au départ de nombreux officiers, sous officiers ou djounouds ignoraient totalement les desseins des généraux « Dafistes » et qu´en fait il s´agissait d´une politique d´éradication d´une partie de la population. La majorité des militaires croyaient qu´ils faisaient leur devoir en voyant les fondements de la république vaciller et qu´il fallait avant tout mettre un terme à l´anarchie qui allait s´emparer du pays et qui risquait de déstabiliser tout le Maghreb.
Avec l´arrivée de feu Mohamed Boudiaf un espoir est né, dans la mesure où par sa probité, son parcours historique irréprochable, sa non implication dans les magouilles du sérail et son désir de mettre sur rail les institutions du pays qui ont perdu toute crédibilité, il allait imposer une alternative durable.
Avec l´assassinat de Boudiaf, le refus d´envisager une solution politique à la crise et la poursuite de l´option du tout sécuritaire, il était devenu évident que le plan du général Khaled Nezzar consistait surtout au pourrissement de la situation pour que l´Armée soit l´actrice incontournable quant à la solution du drame algérien.
Voici quelques interprétations personnelles pouvant expliquer le silence des officiers face à cette ignoble tragédie.
En dehors du silence complice d´une catégorie d´officiers, qui au nom du principe « terroriste » a préparé des opérations extrêmement juteuses au terme desquelles des fortunes colossales ont été amassées, la plupart des militaires, à des degrés divers n´avaient pas pris conscience à temps des dégâts qui allaient être causés à la société algérienne,soit par endoctrinement, soit par manque de courage, soit par la peur de la perte des privilèges, soit aussi par les risques encourus, car ne l´oublions pas, de nombreux officiers et pas des moindres ont été mystérieusement éliminés, soit liquidés par le GIA, qui ne s´en prend curieusement qu´aux officiers récalcitrants, soit victimes d´accident de la circulation.
En tout cas dans cette tragédie, chacun répondra à sa conscience.
Vous êtes considéré, comme l'un des principaux opposants au régime d'Alger. Mais qu'en est-il de vos activités politiques?
Sans fausse modestie, je pense que les opposants qui se trouvent en Algérie et qui affrontent la dictature au quotidien ont plus de mérite que moi ; je pense particulièrement aux militants des droits de l´homme, aux syndicalistes libres, et ceux qui luttent contre les dérives du pouvoir depuis l´indépendance.
Quant à mes activités politiques, tant au niveau de RACHAD que du MAOL, elles sont malheureusement gelées depuis décembre 2007, suite à mon arrestation en Espagne. Les autorités allemandes m´ont également recommandé de cesser toute activité politique en attendant la régularisation de ma situation administrative. A ce jour je ne dispose ni d´un passeport ni d´aucune pièce d´identité, je suis en quelque sorte un « SDF » politique, mais cela ne m´empêchera pas de poursuivre le combat pour l´instauration d´un état de droit en Algérie.
En attendant, le juge espagnol vient de classer provisoirement le dossier, ce qui me pousse à plus d´optimisme quant à un éventuel règlement définitif de cette affaire qui m´a causé d´énormes préjudices.
Ce n'est un secret pour personne, que durant les années de sang, lorsqu'une violence inouïe provoquait des dizaines de milliers de morts et des bouleversements tragiques au sein des couches sociales les plus défavorisées, les acteurs les plus visibles, qui avaient interrompu le processus électoral, au prétexte de sauver la république, ont mis à profit cette période de troubles pour s'enrichir. De façon criminelle, du moins frauduleuse. Que pourriez-vous nous dire sur cette immense forfaiture ?
L´Algérie est le seul pays au monde où la rapine et les détournements se font en toute transparence !
Partout ailleurs les fortunes sont bâties sur plusieurs générations, alors qu´en Algérie, un simple fonctionnaire ou un simple comptable peut devenir milliardaire en l´espace de quelques mois, s´il a la chance de connaître ou de s´associer à un décideur.
Il suffit de lire la presse et recenser les scandales – qu´il est inutile d´énumérer tant la chose est devenue banale- pour constater l´ampleur des dégâts à tous les niveaux et dans tous les secteurs qui touchent à l´économie et aux finances.
Grave encore, c´est que même l´armée n´est pas épargnée par les scandales, puisque l´affaire BRC (nom de la firme américaine Brown and Root Candor, filiale de Halliburton dont l´ex-vice président US Dick Cheney et l´ancien secrétaire d´état à la défense Ronald Rumsfield sont des actionnaires) impliquait des officiers de l´ANP dans les atteintes à la sécurité de l´état ; l´affaire des MIG russes, une transaction conclue frauduleusement par des officiers véreux sans consultation ni procédure légale, qui se sont avérés inopérants et qu´il a fallu les remplacer par des équipements moins obsolètes.
Enfin, tout dernièrement l´implication d´un officier du DRS, en l´occurrence le colonel Khaled, dans l´affaire de corruption liée au projet de l´autoroute est-ouest, et dont les pots de vin touchés, sont hallucinants.
Il ne s´agit pas de faire un constat, il est hélas très amer, mais il faut absolument mettre un terme à ce nouvel état d´esprit qui se banalise dans la vie sociale algérienne, car à terme c´est la faillite programmée pour le pays. La lutte contre la corruption passe par une prise de conscience collective qui doit moraliser la vie publique et réhabiliter les audits et les inspections. Il faut des hommes intègres et compétents pour s´attaquer à ce fléau et mettre un terme à la course effrénée vers le gain facile, créant ainsi deux Algérie, celle de la caste qui gravite autour du pouvoir et celle des laisser pour compte que l´on assimilera à des terroristes à la moindre revendication.
Pensez-vous que toute la vérité sur les tragiques évènements qui ont précédé et suivi l'interruption du processus électoral, doit être sue et révélée au peuple algérien, ou pensez-vous, comme le souhaitent certains, que le peuple n'a pas besoin de savoir ?
Même si pour certains « toute vérité n´est pas bonne à dire », je suis un fervent partisan de la vérité, non pas pour pendre X ou Y ou pour réclamer vengeance comme quelques uns ont tendance à croire, mais uniquement par devoir pour les victimes, et pour la mémoire collective afin que de tels dérives ne se reproduisent plus jamais. Des erreurs ont été commises, parfois involontairement certes, mais il est impératif de révéler la vérité avant de tourner la page.
A titre d´exemple je citerai le cas de Abane Ramdane qui a été assassiné par ses frères d´armes alors que pendant près d´un demi siècle cette vérité a été cachée aux algériens qui avait toujours cru à la fable du « héros tombé au champ d´honneur ».
Des fautes ont été commises il n´y a aucun doute la dessus, il faut les assumer et demander pardon, c´est à cette seule condition que l´Algérie effacera les stigmates des années de sang.
Que pourriez-vous nous dire sur l'affaire des moines de Tibéhirine ?
Maintenant que certains dossiers touchant à cette affaire ont été déclassifiés en France, j´espère que la raison d´Etat ne sera pas invoquée pour faire obstruction à la volonté du juge dans sa quête vers la vérité.
Avant de répondre je voudrai saluer l´abnégation de Mr Armand Veilleux, dans son combat pour la défense de la mémoire des sept moines trappistes.
Maintenant que dire sur l´affaire elle-même ? L´équation est simple, même si elle présente plusieurs inconnues :
Si l´on tient compte des faits incontestables, les deux points essentiels sont, d´une part les moines ont été kidnappés par le GIA, et d´autre part Djamel Zitouni, l´émir du GIA à l´époque avait dans un communiqué revendiqué l´assassinat des moines.
Or Djamel Zitouni était un agent du DRS que manipulait le capitaine Hafid du CTRI de Blida, qui dépendait du colonel Djebbar, qui lui-même dépendait du général Smaïn Lamari. Faites la déduction et vous tombez sur le ou les commanditaires.
Si l´on ajoute les révélations de l´ex-adjudant Tigha (que je considère comme très crédibles) en tant que témoin oculaire, qui affirme que les moines avaient transité par le CTRI de Blida le soir de leur enlèvement, et que durant la même journée le général Smaïn Lamari avait tenu au niveau de ce centre une réunion avec le bras droit de Zitouni et que des véhicules ont été préparés pour des « opérations » dans la région, cela ne fait que renforcer mon sentiment que le kidnapping des moines était bien l´œuvre du DRS et qu´un événement/incident inattendu a précipité leur mort.
On a enfin les révélations, quoique tardives du général Buchwalter, qui était attaché militaire à l´ambassade de France au moment des faits, par conséquent très bien informé des manœuvres qui s´opéraient autour de l´affaire des moines, et qui méritent d´être examinées par la justice.
Une rumeur persistante, et même des révélations organisées, font état d'une laborieuse préparation de Monsieur Saïd Bouteflika pour succéder à son frère, à la tête de l'Etat algérien. Que pouvez-vous nous dire sur cela ?
Tant que cela reste au stade de rumeurs, il n'y a aucune inquiétude à se faire, mais les citoyens doivent se méfier car les décideurs ont pris la fâcheuse habitude de violer la constitution, comme ce fût le cas en novembre 2008 avec le droit au troisième mandat présidentiel.
Avec une assemblée illégitime, une administration rôdée dans la fraude et une police spécialisée dans la répression, tous les ingrédients sont réunis pour faire avaliser les projets du clan au pouvoir, et ce, au mépris de tout bon sens et au mépris surtout des algériens qui aspirent au changement.
De toute manière, dans les pays arabes la tentation est grande de ne céder le pouvoir qu´à sa progéniture ou à sa fratrie, l´exemple de la Syrie semble faire des émules puisque Saddam Hussein en Irak avant l´invasion US de 2003, préparait ses enfants Ouddei et Koussai, tout comme le « guide » libyen, ou le « rais » égyptien Hosni Moubarek qui veulent en faire autant.
A ce rythme nous aurons bientôt des « monarchies républicaines » dans pratiquement tous les états arabes, accélérant par voie de conséquence le recul en matière de démocratie et de libertés fondamentales.
Mr Saïd Bouteflika, comme tout autre citoyen algérien, est libre de créer son propre parti et d´être élu aux plus hautes fonctions de l´état si les algériens le décident, à condition qu´il soit élu lors d´un scrutin honnête et transparent et qu´il n´utilise ni les deniers ni les moyens de l´Etat.
Malheureusement, connaissant le fonctionnement du système en général et de l´administration en particulier, et connaissant la mentalité des décideurs, permettez moi d´avoir des doutes sur l´honnêteté d´un tel scrutin en Algérie.
Depuis quelque temps, on fait croire à l'opinion publique que l'actuel locataire d'El Mouradia a pris le dessus sur l'oligarchie militaire et sur les chefs des « services » et que ces derniers sont « sous sa botte ». La dernière interview du général Benyellès, semble aller dans le même sens. En tant que connaisseur des rouages du commandement militaire, croyez-vous vraiment à cette hypothèse ? Que l'armée ne détient plus le pouvoir réel ?
Lorsqu´on dispose d´une presse aux ordres, et que l´on a un talent indéniable dans l´art de la manipulation, on peut faire tout croire au peuple.
Bouteflika, quoique habile manœuvrier, ne peut en aucun cas se défaire de l´ascendance des marionnettistes. A-t-il réellement le pouvoir de démettre le général Toufik qui est à la tête du DRS depuis bientôt vingt ans ? Certainement pas !
Peut-il modifier la constitution sans l´aval de l´institution militaire ? Sûrement pas ?
En ce moment nous assistons à une sorte de consensus où chacun trouve son compte tant que le baril de pétrole reste à un niveau relativement élevé. En tout cas une chose est évidente, les anciens du MALG et leur clientèle détiennent les postes clés au niveau des rouages de l´Etat et cette situation risque encore de durer puisque le statu quo arrange tout ceux qui continuent à traire la « vache Algérie ».
Voila pourquoi le changement doit obligatoirement passer par la dissolution du DRS et la refonte des services avec une nouvelle doctrine, de nouvelles missions et attributions et surtout un contrôle de ces institutions.
Notre pays doit évidemment posséder un organe de renseignement, comme tous les autres pays du monde qui se respectent, mais son action doit être exclusivement orientée sur les objectifs vitaux (missions de contre-espionnage, atteintes à l´économie, protection des secrets, etc…) et ne pas s´immiscer dans les affaires de politique intérieure (surveillance des partis par exemple), dans les affaires de gestion courante (notamment dans les gestions des communes, désignation de gestionnaires, attributions de marchés ou de prêts, etc…). La liberté individuelle doit être garantie et aucun citoyen algérien ne doit être enlevé, détenu au secret ou mis sous écoute sans une réquisition de la justice.
C´est cela le changement avec un retour à la souveraineté populaire, où les élus seront choisis librement, et où les différents pouvoirs seront séparés.
Tant que la justice dépend de l´exécutif et que le juge obéit aux directives « venues d´en haut », il est impossible de songer à une amorce de changement ; Il est donc fondamental de procéder à l´émergence d´une véritable démocratie qui soit en parfaite harmonie avec nos valeurs et non continuer dans la démagogie avec une démocratie de façade, des députés imposés, un contrôle totalement absent, une presse et une justice aux ordres, une police apte à réprimer tous azimuts et le comble dans tout cela un état d´urgence en vigueur depuis 1992 sous le prétexte sacro-saint de la lutte contre le terrorisme.
Désolé de ne pas partager la thèse selon laquelle l´armée ne détient plus le pouvoir, et je ne serai convaincu du contraire que lorsque les militaires retourneront à leurs casernes et ne se limitent qu´à leurs obligations constitutionnelles.
Pour l´instant la tâche est encore ardue, car nos décideurs qui ont surfé sur de nombreux courants idéologiques depuis l´indépendance – socialisme, islamisme, libéralisme – sont dépourvus de culture démocratique et ne peuvent concevoir des critiques et encore moins envisager une quelconque remise en cause.
Ne pensiez-vous pas que les « événements » tragiques du 5 octobre 88 auraient pu constituer un tournant décisif, pour faire entrer l'Algérie dans l'ère de la véritable démocratie à l'instar des pays de l'Europe de l'Est, si le régime avait eu le courage de faire son autocritique, pour ne pas dire son mea-culpa, comme l'ont fait d'autres régimes militaires en Amérique latine par exemple (Videla après la débâcle des Malouines ou Pinochet après l'échec de son référendum d'octobre 88) ?
Je dirai plutôt qu´octobre 1988 fut beaucoup plus une péripétie qu´un tournant décisif, car contrairement au printemps berbère par exemple, ces évènements n´ont rien de spontané, il s´agissait d´une manœuvre du pouvoir – après un déséquilibre des forces en présence- visant à se débarrasser de l´héritage du FLN. En se débarrassant de quelques caciques et après une purge en règle au sein de l´ANP entre 1985 et 1987, les « déserteurs de l´armée française » ont saisi l´opportunité avec la fragilisation du président Chadli (déjà très amoindri par son niveau intellectuel, diminué par son niveau politique, et connu pour sa paresse légendaire) pour verrouiller tous les secteurs sensibles et noyauter l´ensemble des institutions, le seul bémol à leur plan est qu´ils avaient sous-estimé l´impact et la capacité du FIS sur la population profondément attachée à ses valeurs, c´est pourquoi ils ont choisi de renouer avec une certaine élite qu´ils combattaient brutalement quelques mois plus tôt, afin de créer un front anti-islamiste incarné en 1992 par le CNSA.
Cependant, il est honnête de souligner que les militants des droits de l´homme, les démocrates et la « gauche » en général, avaient réussi en octobre 1988 à ébranler le pouvoir, incapable de maîtriser un processus qu´il a lui-même initié, et qui a dû dans la précipitation se résoudre à ouvrir le champs politique, alors qu´il n´envisageait au départ que la permission de « sensibilités » au sein du FLN.
Je me permets aussi d´ajouter que la contestation au pouvoir en place n´a jamais cessé depuis 1962, l´histoire de l´Algérie contemporaine est jalonnée de luttes contre le despotisme symbolisé par le parti unique, avec notamment les démissions successives de Ferhat Abbas, Benyoucef Benkhedda, puis la création du FFS en 1963 suivi de nombreux autres partis s´opposant à la dictature qui s´était installée durablement (PRS de Boudiaf, MDRA de Krim Belkacem et Slimane Amirat,…), printemps berbère en Kabylie en 1980, Novembre 1986 émeutes à Constantine et Sétif, Octobre 1988, Ghardaïa 1987, Tizi-Ouzou 2001, ….
Les algériens ont affaire à un régime autiste, basé sur une politique répressive, ne tolérant aucune opposition, et qui fait fi de la volonté d´émancipation de tout un peuple, réduit à la misère, à la marginalisation et à l´asservissement.
Aucune comparaison n´est possible entre les généraux Videla ou Pinochet et nos « ex sous officiers de l´armée française », comme il n´y a aucune comparaison entre les généraux latino-américains qui reconnaissent leurs erreurs et qui s´acquittent à les réparer et nos soudards qui sont insensibles à la souffrance de leurs concitoyens.
Le MAOL montre des signes de regain d'activité, notamment par la réactivation de son espace internet, après quelques années d'hibernation. Que pourriez-vous nous dire sur ce sujet?
J´ai mis un terme à mes activités au sein du MAOL depuis que j´ai opté pour la lutte politique avec le mouvement RACHAD en avril 2007, mais je puis vous dire que les militaires du MAOL sont des enfants dignes de l´Algérie, qui militent avec bravoure et abnégation en vue de consacrer les aspirations légitimes des algériens, à savoir, la justice, la paix, la liberté et le recouvrement de la souveraineté populaire.
Quelle est votre appréciation de l'Appel du 19 mars 2009 ?
Il est évident que j´adhère pleinement à cette initiative louable, qui mérite d´être encouragée et portée à l´attention de tous les citoyens sans aucun préjugé idéologique. L´idée même de rassembler toutes les forces sans exclusive est à mon avis un impératif noble, car le changement tant attendu passe obligatoirement par l´union de tous les algériens autour d´un minimum commun pour chasser les imposteurs et redresser la situation avant qu´elle ne devienne irrémédiable.
Les divisions et les zizanies n´ont que trop duré, et ce, au seul profit d´une caste au pouvoir qui pille nos richesses et qui nous précipite vers la médiocrité.
J´espère sincèrement que cet appel soit entendu et que l´on ne s´arrête pas uniquement aux constats, l´heure est venu de passer à l´action. Comme en médecine, le diagnostic est connu, il suffit maintenant à l´opposition de s´entendre sur le traitement pour éviter que la maladie ne se propage, risquant d´aboutir à une amputation, voire au décès. A nous d´agir avant qu´il ne soit trop tard car il n´y a rien à attendre de ce pouvoir ; Et n´ayons pas peur de prendre nos responsabilités, sinon le changement se fera sans nous avec le risque d´une violence certaine, la jeunesse algérienne n´admettra jamais d´être écrasée indéfiniment.
Etes-vous d'accord sur le rôle de l'institution militaire durant la phase de transition, tel que préconisé par cet Appel ?
L´armée doit en toute circonstance observer une neutralité, ceux qui seraient tentés par la politique – et c´est leur droit le plus absolu- doivent renoncer au port de l´uniforme.
L´armée algérienne, de part son passé et le rôle qu´elle a de tout temps joué, devra se désengager totalement de la sphère politique, une fois la période de transition terminée et les nouvelles institutions – élues démocratiquement- mises en place.
Elle veillera aux dispositions constitutionnelles et n´interviendra qu´en cas de circonstances extrêmes ; si un parti refuse l´alternance ou si un autre parti souhaite la partition de l´Algérie par exemple.
En tout cas je ne vois aucun désaccord fondamental par rapport à ce qui est recommandé dans l´appel du 19 mars.
Pensez-vous qu'il existe une possibilité que de jeunes officiers de l'armée algérienne puissent sortir de la logique despotique de l'oligarchie militaro-financière, et initier avec la classe intellectuelle et politique représentative, une dynamique pour un changement pacifique du système et une véritable démocratisation de la vie politique?
Une telle possibilité n´est pas à écarter, je reste persuadé qu´il y a des officiers qui ont à la fois la conscience et la sagesse nécessaires pour prendre du recul et admettre que la démocratie de façade inaugurée à la suite de l´interruption du processus électoral en janvier 1992, ne peut en aucun cas constituer une alternative viable pour le système, qui doit sa survie grâce aux soutiens des pays occidentaux avec qui il entretient des rapports de vassalité (notamment dans la lutte contre l´immigration clandestine, et la « global war on terrorism ») et au prix élevé du pétrole qui assure une paix sociale précaire et des recettes assez substantielles pour équilibrer les déficits.
Il y a quand même une double interrogation qu´il va falloir élucider ; la première est relative à la médiocrité ambiante, donc il est légitime de se poser la question de savoir si des jeunes officiers universitaires sont capables de se hisser au niveau que leur octroie leur statut et s´ils sont prêts à accepter le challenge.
La seconde question est de savoir si des officiers ayant goûté au pouvoir et aux gains faciles, seraient prêts de renoncer à ces privilèges pour engager une dynamique de changement.
Comme je l´ai dit plus haut, la jeunesse algérienne ne restera pas impassible et finira tôt ou tard par se défaire de ses liens de soumissions.
Les émeutes et les violences quasi quotidiennes sont là pour leur rappeler qu'eux aussi doivent s´impliquer au sauvetage de l´Algérie pour éviter d´être jugés et condamnés par l´histoire.
En théorie, tout le monde parle de la nécessité d'un changement radical et pacifique du système politique. Mais en pratique, les personnalités politiques de ce qui reste de la véritable opposition n'arrivent pas à s'entendre sur le plus petit dénominateur commun. Comment expliquez-vous cela ?
L´explication la plus rationnelle à ce phénomène de discorde entre les différents représentants des courants politiques est dû principalement au travail de sape exercé par le DRS pour émietter la société algérienne en enracinant la haine et la méfiance entre les citoyens. C´était la politique du « diviser pour régner », chère à tous les despotes.
Evidemment lorsque pendant plus de dix ans les représentants de la société civile subissent le matraquage médiatique incessant que les « barbus » veulent les exterminer et qu´inversement les islamistes enduraient une politique ouverte d´éradication, il va de soi que la haine et la méfiance cohabitent et poussent les uns et les autres à rejeter systématiquement tout rapprochement ou toute entente, même si tous s´accordent sur la nécessité de finir avec le pouvoir corrompu.
Face à la menace populaire le système a trouvé une parade qui semble donner ses fruits, puisque l´émiettement de la société favorise les desseins du pouvoir, et ceci a été remarqué en de nombreuses occasions. Dresser les algériens les uns contre les autres est désormais une stratégie très affectionnée par ceux qui continuent à enfoncer les algériens dans le chaos et le malheur, puisque cette « arme » de la division, utilisée dans les années 1970 pour opposer arabisants et francisants, a été reproduite dans les années 1980 pour confronter les islamistes aux démocrates et aujourd´hui pour exacerber les tensions ethniques ou tribales (chaambas contre mozabites, kabyles contre arabes, …).
Il s´agit de ne plus tomber dans ce piège, car l´Algérie appartient à tous les algériens et il leur appartient de revaloriser la notion de respect. On peut ne pas être d´accord sur un programme ou sur un choix sans pour autant être des ennemis, ou vouloir à tout prix réduire au silence celui ou celle avec qui on n´est pas d´accord. C´est justement ce devoir que doivent s´imposer les dirigeants de l´appel du 19 mars pour rassembler le maximum d´algériens autour de cette initiative, les aider à surmonter leurs différends et les sensibiliser sur l´adhésion à ce « dénominateur commun ».
Etes-vous prêt, en tant que figure de l'opposition réelle à ce régime illégitime, à rejoindre à l'avenir un éventuel front national du changement, sur la base d'un compromis politique clair entre toutes les forces politiques représentatives en vue de l'instauration d'un véritable Etat de Droit ?
Après avoir tout sacrifié pour que les algériens se débarrassent des parasites qui les gouvernent, retrouvent leur dignité perdue et que s´édifie un état de droit basé sur nos valeurs telles que prônées par la déclaration du 1er Novembre 1954, je n´ai pas à rejoindre un éventuel front national puisque je m´y trouve déjà.
L´objectif pour lequel je me bats, est et a été toujours le changement radical par les voies pacifiques jusqu´au recouvrement de notre liberté, de notre dignité et de notre souveraineté usurpée.
Comment envisagez-vous l'avenir pour notre pays ?
Seul Dieu peut répondre à cette question. Le professeur Addi El Houari y voit les germes d´une « Somalisation », et il n´a pas tout à fait tort, car une chute des prix du pétrole précipiterait l´économie du pays vers la faillite et aggraverait les tensions sociales qui pourraient mener le pays vers une catastrophe.
Je ne souhaite pas ce scénario aux algériens, mais l´incapacité manifeste des pouvoirs publics à résoudre certains problèmes du quotidien (chômage, emploi, précarité sanitaire, niveau éducatif, lutte contre la corruption,…) alors que les caisses de l´état sont pleines, me laisse un peu dubitatif.
Un dernier mot ?
Merci de m´avoir permis de m´exprimer et je souhaite aux dirigeants de l´appel du 19 mars, ainsi qu´à tous ceux qui luttent pour l´instauration d´une deuxième république, de poursuivre dans la voie que nos glorieux martyrs nous ont tracé. Grâce à l´effort de tous, le train sera remis sur les rails et que l´année 2010 soit une année de paix, de bonheur et de joie pour les algériens, qui doivent s´inspirer de nos vaillants footballeurs – que je félicite au passage pour leur esprit combatif et une qualification hautement méritée- pour s´unir, se mobiliser et exiger le départ des imposteurs.


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