Décès du journaliste Abdelhalim Atik : la Direction générale de la communication à la Présidence de la République présente ses condoléances    "Médias algériens: Réalité et Perspectives", thème d'une Conférence du RND    Batimatec 2024 : inauguration de la 26ème édition avec plus de 900 exposants    Le Premier ministre s'entretient avec le vice-président du Conseil présidentiel libyen    Protection civile : la coopération avec la Tunisie " doit être appliquée davantage sur le terrain "    Oualid présente à Londres les efforts de l'Algérie pour renforcer l'écosystème des start-up et appuyer l'investissement étranger    L'ANR appelle à une forte participation aux présidentielles du 7 septembre prochain    Allocution du président de la République au 15e Sommet de l'OCI    Sommet de l'OCI: le Premier ministre rencontre le président de la Commission de l'UA    Le président de l'Assemblée nationale congolaise en visite officielle en Algérie à partir de dimanche    Le sommet de l'OCI félicite l'Algérie pour l'inauguration de Djamaâ El-Djazaïr    Krikou met en exergue la place importante de la femme au sein du projet institutionnel du Président de la République    La Gendarmerie nationale met en garde contre le phénomène de l'arnaque et de l'escroquerie sur internet    Mois du patrimoine: le 9e Festival national de la création féminine célèbre les costumes et les bijoux algériens authentiques    Natation/Championnats d'Afrique Open: l'Algérie décroche six nouvelles médailles, dont trois en or    Sétif: une pléiade d'artistes et de réalisateurs à l'ouverture des Journées internationales du cinéma    La CPI déclare que ses activités sont «compromises» par les menaces    Abbas a salué la décision de la République Trinité-et-Tobago de reconnaître l'Etat de Palestine    A Monsieur le président de la République    Ooredoo présente ses vœux à la corporation journalistique algérienne    Ça se froisse de partout !    Kheireddine Barbari chef de la délégation sportive algérienne aux JO 2024    Lettre ouverte Excellence, Monsieur le Président de la République    Pénurie et gaspillage de l'eau    A Monsieur le président de la République    Du nouveau pour la protection des travailleurs !    La kachabia à l'épreuve du temps    Lettre ouverte A Monsieur le Président de la République    Le wali honore la presse locale    L'Organisation nationale des journalistes algériens appelle à poursuivre les efforts pour relever les défis    Guterres exprime son indignation face au nombre de journalistes tombés en martyrs    Recueillement à la mémoire des martyrs de l'attentat terroriste de l'OAS du 2 mai 1962    Laâgab préside la cérémonie de célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse    La styliste palestinienne, Sineen Kharoub, invitée d'honneur    Grand prix de cyclisme de la ville d'Oran : Nassim Saïdi remporte la 28e édition    AG Ordinaire du Comité olympique et sportif algérien : adoption des bilans et amendement des statuts    La protesta estudiantine occidentale face aux lobbies sionistes.    Megaprojet de ferme d'Adrar : « elmal ou Etfer3ine »    ALORS, MESSIEURS LES DIRIGEANTS OCCIDENTAUX : NE POUVEZ-VOUS TOUJOURS PAS VOIR LES SIGNES ANNONCIATEURS DUN GENOCIDE A GAZA ?    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Le diktat des autodidactes    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



SA�D SADI AU SOIR D�ALG�RIE :
�Nous sommes dans un vrai moment de rupture�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 10 - 01 - 2009

C�est un Sa�d Sadi tr�s inquiet pour l�avenir imm�diat de l�Alg�rie que nous avons rencontr� au si�ge de son parti. Plus que jamais, il appelle au d�passement du pouvoir pour esp�rer un sursaut salvateur pour le pays. Si ses r�ponses donnent � premi�re vue une impression de d�pit, cela est vite rattrap� par des propositions qui laissent entrevoir une projection sur l�avenir. Dans �ce moment de rupture�, il devient presque ind�cent de parler avec Sa�d Sadi d��lection pr�sidentielle.
Entretien r�alis� par Nacer Belhadjoudja
Le Soir d�Alg�rie : Cela fait longtemps que l�on ne vous a pas entendu dans les m�dias nationaux, pouvez-vous, pour entamer notre entretien, nous livrer d�un mot votre point de vue sur le pays ?
Sa�d Sadi : En 2009, c'est-�-dire 55 ans apr�s l�ind�pendance, des adolescents d�boussol�s descendent le drapeau alg�rien dans un lyc�e et hissent le drapeau fran�ais deux mois apr�s que l�on eut sacralis� les symboles de la nation par une r�vision constitutionnelle des plus discutables.
C�est un peu rude comme entr�e mais puisque vous abordez le sujet, comment analysezvous cet �v�nement ?
Apres la rupture politique qui oppose pouvoir et soci�t�, apr�s la rupture g�n�rationnelle qui voit une g�rontocratie b�illonner la jeunesse, nous rentrons dans les ruptures symboliques o� se dissolvent les valeurs identitaires. La question n�est pas de se d�fausser sur ces jeunes qui sont plus victimes que coupables, mais il faut bien savoir qu�avant d�en arriver l�, ces �l�ves ont discut� entre eux, pr�par� leur coup, choisi le moment du passage � l�acte� Il est important de comprendre ce qui s�est pass� dans la t�te de ces jeunes. La falsification des rep�res et la manipulation de l�histoire de la nation ajout�e au discr�dit puis au rejet que suscitent les auteurs de ces abus ont conduit des enfants alg�riens � braver tous les interdits et � lancer l�ultime d�fi pour manifester leur exasp�ration. Ce signe ne semble pas inqui�ter les dirigeants qui, faute d�avoir un bilan ou des perspectives � offrir, revendiquent, je cite, leur �sale besogne� comme troph�e.
Mais d�un point de vue plus politique, comment d�finiriezvous la situation actuelle ?
Apr�s le reniement de la r�sistance citoyenne qui, de mon point de vue, aura �t� un grand moment dans notre histoire d�apr�s-guerre, le pays s�est trouv� d�savou� dans ce qu�il avait accompli de plus sain et de plus noble depuis l�ind�pendance : refuser un ordre politique qui nie l�alternance et, dans le m�me temps, ne pas se laisser gagn� ni m�me tent� par la vengeance malgr� la cruaut� des �preuves. Peu de peuples ont fait preuve de tant de sagesse face � de tels drames. Priv� de son capital patriotique et interdit de citoyennet�, l�Alg�rien s�est r�sign� et la Nation a commenc� une inexorable d�composition dont la grammaire politique est �crite par le putsch commis le 12 novembre. D�un point de vue formel, le pouvoir passe d�une enveloppe militaire � une apparence polici�re, mais le syst�me politique reste le m�me dans un pays sous haute tension. C�est l�impasse. En quoi, selon vous, la r�vision de la Constitution a-t-elle �t� si d�sastreuse ? Je ne n�insisterai pas sur la forme. N�en d�plaise au pr�sident de l�APN, le Parlement alg�rien a commis une forfaiture. Il n�avait pas � se prononcer sur des amendements qui bouleversaient la nature et l��quilibre des pouvoirs. Seule la voie r�f�rendaire, au regard de la Constitution d�alors, permettait de traiter de tels amendements. Sur le fond, nous sommes dans un cadre constitutionnel unique. Les constitutionnalistes les plus avertis confirment le caract�re ubuesque de la situation alg�rienne qui n�est ni un r�gime pr�sidentiel, ni un r�gime parlementaire. C�est le seul pays o� un homme concentrant tous les pouvoirs ex�cutifs entre ses mains ne conna�t aucun contre pouvoir. Savez-vous que si demain le RCD devenait majoritaire � l�Assembl�e, il serait oblig� d�appliquer le programme d�un chef de l�Etat qu�il combat puisque, depuis le 12 novembre, seul lui a le droit de proposer un programme !! Je ne voudrais pas �tre trop cruel mais il faut rappeler aussi que ce programme, dont toutes les client�les se gargarisent, n�existe m�me pas. La Constitution a �t� viol�e pour imposer un troisi�me mandat. Quel Alg�rien et quel observateur peut croire que ce qui n�a pas �t� fait pendant dix ans avec un baril qui a atteint 150 dollars va devenir possible dans une situation nationale aussi d�l�t�re avec un environnement mondial si perturb� ? Je vous laisse deviner le contre-coup politique, diplomatique et �conomique que subit notre pays apr�s cette op�ration. Autre probl�me r�v�l� par cette d�rive : le silence des intellectuels. En dehors de quelques �mois confidentiels, il n�y a pas eu d�intervention sur un acte qui ne manquera pas d�inspirer ailleurs la recherche universitaire en mati�re d�h�r�sie constitutionnelle. Mais cela est un autre probl�me.
Vous venez d��voquer le RCD, quelques voix s��l�vent � B�ja�a et laissent entendre qu�il y aurait crise.
B�ja�a, je vous rassure, va tr�s bien. Cinq ou six personnes d�couvrent comme par hasard en ce moment et apr�s des ann�es de b�atitude, que le RCD est un enfer. Ce genre d�incidents est r�current � chaque fois que le RCD alerte l�opinion nationale ou internationale sur les abus du r�gime. Dit en un mot, le pouvoir sugg�re � travers ces provocations ceci: nous n�avons rien fait mais nous sommes tous pareils, donc le changement est inutile.
Plus g�n�ralement, comment va le RCD ?
Je ne crois pas qu�il y a un parti alg�rien qui ait autant affront� le pouvoir et qui continue d��tre la source principale de l�animation du d�bat national, avoir une activit� de terrain aussi soutenue, une vie organique r�guli�re et une pr�sence internationale affirm�e et reconnue. Est-ce un hasard si le RCD est le seul parti � disposer d�un site Internet digne de ce nom et qui tient toutes ses r�unions organiques pr�vues par ses statuts. Il reste vrai qu�il y a d�bat dans le parti sur la question de savoir si la m�thode de luttes adopt�e jusquel� est la plus indiqu�e � la conjoncture actuelle o� le pouvoir viole toutes les lois et r�glementations pour �touffer l�opposition. Le scandale qui a vu l�administration d�poser ill�galement un pr�sident d�APC � Berriane au motif qu�il est du RCD alors qu�il revendique un bilan exceptionnel interpelle sur la pertinence d�un combat con�u et men� dans d�autres conditions. A Blida, un secr�taire g�n�ral de l�UGTA, d�mocratiquement �lu, se voit refuser son installation tant qu�il restera fid�le au RCD�
Qu�est-ce que cela appelle en termes de perspectives ?
Cela veut dire que le prochain conseil national qui se tient dans un moment de rupture politique sera, je crois, l�un des plus importants dans la vie du parti.
Ce conseil national se prononcera- t-il sur la pr�sidentielle ?
Oui.
Peut-on en savoir plus en ce qui vous concerne ?
Vous comprendrez bien que non.
Le pouvoir a pourtant acc�d� � l�une de vos revendications essentielles puisqu�il accepte la pr�sence d�observateurs internationaux. Sur la question des observateurs comme sur d�autres, le pouvoir ruse. Comme toujours, � chaque fois que le RCD anime un d�bat, innove sur un dossier ou qu�il forge un concept, le r�gime s�en saisit, le clone et le pollue.
Le pouvoir nous propose une pr�sence politique de l�Organisation de la Conf�rence islamique, de l�Union africaine et de la Ligue arabe � instances respectables par ailleurs � sous la coordination symbolique de l�ONU. Les dirigeants alg�riens savent que depuis 2004, et gr�ce ou � cause de leur fraude, il y a une prise en charge professionnalis�e et standardis�e de l�observation des �lections. Les �quipes sont form�es pour pr�venir et d�tecter les failles organisationnelles, elles demandent � �tre sur le terrain de longs mois avant le scrutin pour �nettoyer� les fichiers �lectoraux, surveiller l�usage des m�dias et des finances publiques� Ces organisations sp�cialis�es sont connues et ont d�j� montr� leur savoir-faire sur tous les continents en intervenant en Ukraine, au Pakistan, au Venezuela, et il y a quelques jours, au Ghana o� le candidat de l�opposition a d�ailleurs remport� la pr�sidentielle dans une comp�tition que personne ne conteste. Vous aurez remarqu� qu�aucune de ces organisations ne figure parmi les �invit�s� du pouvoir d�Alger. A la d�charge de ce pouvoir, il n�est pas le seul � refuser une surveillance internationale qui mobiliserait pendant des mois de nombreux observateurs ind�pendants et qualifi�s. Des acteurs politiques et sociaux qui avaient, un instant, voulu se mobiliser contre la candidature de l�actuel chef de l�Etat pour soutenir un autre candidat � ce qui �tait leur droit � ont refus� de s�associer � la demande de cette surveillance. L�arri�re-pens�e �tant que la fraude n�est pas un mal en soi. Elle est m�me implicitement souhait�e quand elle sert son chef de clan. Pour occasionnelle qu�elle soit, cette posture soul�ve, nous le savons tous, un vrai probl�me pour ne pas dire le probl�me politique de l�Alg�rie.
Pouvez-vous �tre plus pr�cis ?
Tant que nous n�aurons pas clarifi� la question du positionnement politique de chacun, la mise en perspective de la nation restera brouill�e. Il y a des acteurs politiques qui estiment qu�il n�y a pas d�alternatives possibles en dehors du syst�me actuel. C�est une option que l�on peut entendre � la condition qu�ils s�assument en tant que client�les inscrivant leur action dans les comp�titions claniques. Naturellement, chaque clan dira que si c�est son chef qui h�rite du pouvoir, les choses iront mieux. Nous sommes un certain nombre � mettre en doute cette vision. La crise alg�rienne ne saurait �tre r�ductible � une question d�homme, m�me si la responsabilit� de certains, dans son aggravation, est �vidente. Tant que ce malentendu originel ne sera pas lev�, la vie publique risque d��tre encore longtemps enferm�e dans des sp�culations sur les affrontements claniques qui finiraient bien, nous dit-on, par produire un jour l�homme providentiel. La solution � la crise alg�rienne n�est pas dans un am�nagement du syst�me mais dans son d�passement. Cela dit, rien n�interdit de d�battre avec un clan ou un autre ; encore faudrait- il que cela se fasse sur des bases de partenariat et non client�listes. Cette ali�nation politique et intellectuelle qui interdit de concevoir une opposition en tant qu�alternative est une forme d�infantilisme et d�opportunisme qui bloque le d�bat politique national. L�opposition n�est pas une annexe o� des client�les d��ues un moment viennent s��pancher ou se d�fouler en attendant d��tre recycl�es. L�opposition n�est pas l� pour �tre interpell�e quand il y a p�ril sur la nation et �tre oubli�e quand vient le moment des choix. L�opposition est, redisons-le, une alternative au pouvoir. Ce minimum qui a pr�sid� � toutes les �mancipations des soci�t�s adultes n�est pas encore int�gr� chez nous.
Selon vous, pourquoi la soci�t� alg�rienne s�enlise-t-elle dans ce que vous semblez pr�senter comme une chim�re, alors qu�ailleurs le jeu politique est plus clair. Il y a en g�n�ral l�opposition et le pouvoir qui s�affrontent sur des programmes politiques. Pourquoi n�arrivons-nous pas � mettre en application cette p�dagogie chez nous ?
Le mouvement national s��tait cristallis� autour de la revendication pour l�ind�pendance. Jusqu�au congr�s de la Soummam en 1956, il n�y avait pas de discussion sur la nature de l�Etat, l�acc�s au pouvoir, son contr�le� Or, en 1957, l�Alg�rie a enregistr� deux drames dont elle ne s�est jamais remise. Les disparitions de Abane et Ben M�hidi la m�me ann�e ont co�t� et co�tent encore tr�s cher � notre pays. Sans tomber dans la �complotite � de l�histoire, on peut quand m�me noter que la tendance despotique du FLN et les forces coloniales ont objectivement converg� dans leur malfaisance puisque Abane a �t� �limin� par ce qui deviendra plus tard la S�curit� militaire et que Ben M�hidi a �t� victime de Massu. Depuis, l�Alg�rie n�en finit pas de r�gresser. Au lieu de poser les cadres qui permettraient de d�battre et d�avancer, le pays s�enferme dans des coteries tribales, des surench�res sur la religion ou le nationalisme � d�gradant d�ailleurs l�une et l�autre � sans jamais aborder ce qui fonde par d�finition le pouvoir politique l�identification des probl�mes, les ressources mobilisables, l��tablissement des priorit�s, le timing de leur r�alisation et les r�gles qui doivent r�gir la conqu�te, l�exercice et le contr�le du pouvoir. R�sultat : nous sommes toujours en 1962. La probl�matique qui avait oppos� le clan d�Oujda, devenu groupe de Tlemcen, au groupe de Tizi-Ouzou est toujours en suspens. D�un c�t� le GPRA, des wilayas de l�int�rieur, la F�d�ration de France du FLN et des personnalit�s comme Boudiaf et A�t Ahmed acquis � l�id�e de l�gitimit� institutionnelle ; de l�autre, l�arm�e des fronti�res et le MALG cautionn�s par Ben Bella, avant d�en �tre victime, qui s�engagera dans la cooptation, l�opacit� et le coup de force, encourag�s sinon l�gitimit�s par le populisme ambiant propre aux ann�es soixante. Selon les p�riodes et les rapports de force, c�est la m�me probl�matique qui ressurgit depuis un demi-si�cle. Faute d�avoir sereinement et loyalement appr�hend� la question du devenir national, l�Alg�rie vit dans un non-d�bat qui voit ses �lites partir, se taire ou, pire, se pervertir.
Le syst�me politique serait-il � ce point puissant pour paralyser toute la soci�t� ?
Il ne faut pas sous-estimer la capacit� du syst�me alg�rien � corrompre mat�riellement, mais aussi moralement. J�ai �t� proprement stup�fait de lire les propos obs�quieux tenus par Yasmina Khadra ces derniers temps � propos du troisi�me mandat et de l�opposition. Il m�a dit exactement l�inverse il y a seulement quelques mois. Cet �crivain n�avait pas besoin de faire all�geance au r�gime. Son succ�s mondial, par ailleurs m�rit�, lui permet de cultiver l�autonomie et l�int�grit� intellectuelles attendues d�une telle personnalit�. Il n�a pas pu r�sister au magn�tisme mal�fique du client�lisme. Son statut d�ancien militaire ne suffit pas � expliquer une telle abdication.
Mais pourquoi la soci�t� alg�rienne ne se lib�re-telle pas de cette soumission ? On voit bien que le citoyen est frondeur, mal � l�aise mais la mayonnaise ne prend pas.
Pour que la mayonnaise prenne, il faut les outils, le bon produit et une temp�rature adapt�e. Or, depuis 1962, tous les param�tres qui participent � la bonne gestion des affaires publiques sont rogn�s au point de dispara�tre de notre quotidien. Ce qui fait que notre organisation sociale reste domin�e par les inf�odations tribales qui asservissent les institutions. Cette forme de r�gression est v�rifiable y compris au sommet de l�Etat. On entend chaque jour des propos plus ou moins d�sabus�s sur la tribalisation du pouvoir. Mais � partir du moment o� vous bloquez les espaces de d�bat o� le citoyen peut se d�terminer et s�engager sur des propositions politiques, il est n�cessairement captif d�autres syst�mes d�expression ou d�autres exp�riences d�o� les �meutes, le r�gionalisme, la corruption, le terrorisme ou l�exil. C�est vieux comme le monde, la libert� f�conde l�intelligence et, � l�inverse, l�arbitraire g�n�re et amplifie les archa�smes. C�est au moment o� l�Am�rique porte un Noir � la Maison Blanche que des observateurs alg�riens, qui revendiquent par ailleurs le statut d�intellectuels d�mocrates, s�ab�ment dans l�anti-kabylisme le plus gr�gaire et que le pays plonge dans la�mugabisation�. Nous sommes dans un vrai moment de rupture dans la mesure o� tous les artifices �r�volutionnaires � par lesquels le r�gime s�est autol�gitim� ont fait faillite. Ce que vous appelez �mugabisation � n�a pas seulement affect� la sph�re politique. Quid de l��conomie, du social, du culturel... ? Tout se tient. Quand l�exercice du pouvoir n�est soumis � aucun contr�le, on arrive � toutes les h�r�sies. C�est quand le chef de l�Etat avoue publiquement avoir �chou� �conomiquement que le ch�ur des favorites se revendique de son programme ! Plus de 200 milliards de dollars ont �t� d�pens�s pour, nous avaiton promis, d�velopper les Hauts- Plateaux. Pour quels r�sultats ? Les m�mes qui nous disaient que le pays �tait � l�abri de la crise mondiale avertissent, trois semaines plus tard, que tous les postes budg�taires �seront soumis � de fortes tensions �. La d�gradation du syst�me �ducatif cr�e un d�ficit qualitatif en ressources humaines qui pi�gera longtemps le pays. Seule la mobilisation de notre diaspora pourrait faire face, dans un premier temps, � cette carence. Et quand on observe le sort r�serv� � notre �migration on a toute latitude de voir que la r�int�gration de la comp�tence et du savoir-faire expatri�s n�est pas le premier souci du pouvoir. Comment et avec quoi construire ? Les donn�es chiffr�es sont inexistantes, inaccessibles ou peu fiables. Qui peut dire aujourd�hui o� nous en sommes par rapport au sida et aux autres grandes �pid�mies ? Quelle �valuation s�rieuse peut-on faire des campagnes de vaccinations si tant est qu�elles sont men�es en temps opportun ? Que peut-on penser de la question identitaire quand on sait que la derni�re r�vision de la Constitution a soigneusement �vacu� le caract�re national de la langue amazigh des articles portant constantes de la nation ? La ruse encore et toujours� Comment voulez- vous qu�un op�rateur �conomique ou un universitaire prenne confiance, s�investisse pleinement dans un projet ou une mission durables dans un tel environnement ? J�ai eu l�occasion de lire la note d�une filiale d�un grand groupe europ�en qui demandait d�appr�cier les possibilit�s d�investissements chez nous. Le texte est �difiant : en dehors des op�rations conjoncturelles, l�investissement est al�atoire. Deux raisons majeures avaient �t� invoqu�es : environnement financier d�l�t�re ; tout projet �conomique est sujet au fait du prince. Quand vous ajoutez la corruption end�mique et la propension pour une ouverture �conomique en faveur d�investisseurs � la r�putation plus ou moins sulfureuse, vous avez fait le tour de la perception du march� alg�rien hors hydrocarbures. Quel pays peut supporter plus longtemps autant de turpitudes ? Le discr�dit politique int�rieur a toujours une implication sur la souverainet� �conomique d�un pays. Ne parlons pas de la cr�dibilit� en mati�re diplomatique.
Si, justement, parlons-en� Comment appr�ciez-vous la position de l�Alg�rie sur la sc�ne internationale ?
Sur le plan s�curitaire, et contrairement � ce que l�on dit ici et l�, de plus en plus de nos partenaires s�inqui�tent de notre instabilit� politique et du divorce qui caract�rise les relations pouvoir-soci�t� car cette d�fiance est g�n�ratrice de d�sordres qui travaillent objectivement � la r�surgence du terrorisme international dont notre pays est l�une des plaques tournantes du fait d�une politique de renoncement et de manipulations criminels. En mati�re �conomique, je l�ai dit, nous sommes toujours un territoire de n�goce et non un pays d�investissement. Sur la sc�ne diplomatique, nous n�offrons aucune lisibilit�. Et quand nous apparaissons, c�est toujours en fonction des turbulences int�rieures. La derni�re victime de cette diplomatie man�uvri�re a �t� l�Autorit� palestinienne. Les massacres de Ghaza exigeaient de notre pays une solidarit� politique sans ambigu�t� aupr�s de l�Autorit� palestinienne et un soutien humanitaire � la mesure des souffrances endur�es. Au lieu de cela, le pouvoir alg�rien, redoutant tout mouvement de rue, a cru bon de faire recevoir au nom du chef de l�Etat un repr�sentant du Hamas et d�ignorer l�ambassadeur palestinien. A notre connaissance, la pr�sidence n�a m�me pas eu l��l�mentaire correction de s�adresser d�abord au pr�sident Mahmoud Abbas qui, jusqu�� preuve du contraire, reste le repr�sentant l�gitime du peuple palestinien. Cet acte d�une extr�me gravit� est dict� par le souci de m�nager des sensibilit�s politiques nationales auxquelles on veut donner des gages sur le dos de l�Autorit� palestinienne. Autre dossier : la position officielle sur l�UPM qui rel�ve du folklore. On entend une chose et son contraire sur des questions d�terminantes pour notre environnement g�ostrat�gique. L�Alg�rie des Francis, Chanderli, Yazid et de tant d�autres pouvait et m�ritait mieux.
Votre constat est amer, n�y aurait-il donc plus de recours possible ?
Cela n�est pas de l�amertume. La lucidit� commande � l�homme politique de regarder la r�alit� en face. Le pays est mal en point. La conscience nationale est dissoute par l�exc�s de populisme, les jeunes g�n�rations sont coup�es de notre propre histoire, la violence s�impose comme m�diation sociale privil�gi�e, notre �cole est sinistr�e, la corruption ravage le pays et les institutions se disloquent chaque jour un peu plus sous l�effet conjugu� du n�potisme et des fraudes �lectorales. Voil� le tableau. Vous pouvez me demander que faut-il faire et que peut-on faire mais je ne peux pas d�crire autre chose aujourd�hui dans mon pays.
Alors, justement, que peut-on faire ? Ou plus exactement que pr�conisez-vous devant une telle situation ?
Le conseil national extraordinaire du RCD est pr�vu � cet effet. Mais je peux vous faire part d�un certain nombre d�id�es et d�observations qui circulent parmi nous : la facture sera lourde ; les m�thodes de lutte doivent �tre red�finies ; seule la jeunesse alg�rienne, malgr� ses tourments, peut sauver le pays.
Vous avez commenc� cet entretien en signalant un acte de d�fi ou de d�tresse de jeunes lyc�ens et vous semblez vouloir conclure en faisant de cette cat�gorie un ressort essentiel sinon exclusif du renouveau national pendant que beaucoup d�observateurs donnent ce segment social comme source de s�ismes � venir. C�est assez singulier.
J�ai toujours suivi les �volutions de la jeunesse alg�rienne. J�y accorde depuis quelques ann�es une attention plus soutenue, notamment apr�s l�apparition du ph�nom�ne des harraga. Il y a une ann�e de cela, je me trouvais � Oran, un jeune avocat m�apprend que la veille il avait assist� � un proc�s de 28 harraga. Vingt-six d�entre eux �taient des universitaires. Quelques semaines plus tard, je recevais une association de familles de disparus de harraga bas�e � Annaba. Elles �taient ballott�es d�un tribunal � l�autre sans avoir pu conna�tre le sort d�finitif de leurs enfants. Un autre jour je rencontre un jeune du centre du pays qui tentait l�aventure � partir de Tigzirt. Ils �taient une douzaine sur une embarcation de 6 ou 7 m�tres et voulaient atteindre les Bal�ares. Je lui faisais remarquer qu�il fallait bien plus que deux bidons d�essence pour une travers�e de 300 km. Au bout d�une heure de discussion, je comprenais que pour ces jeunes, il s�agissait plus de partir que d�arriver. Je me rappelle avoir eu alors un flash et je revoyais ces Am�ricains pi�g�s par les flammes le 11 septembre 2001 dans les Tours jumelles et qui se jetaient du 90e �tage. Ils savaient tr�s bien qu�ils n�avaient aucune chance de survivre mais, jusqu�� l�ultime seconde, ils voulaient avoir une emprise sur leur propre vie. Voyez-vous, des jeunes qui se jettent � l�eau dans de telles conditions pour se forger un destin sont porteurs d�espoir et d��nergie, d�s lors qu�ils refusent de renoncer, quelles que soient les difficult�s et les incertitudes. Il est vital que la nation leur accorde la consid�ration qu�ils m�ritent, qu�elle les aide � s�organiser et les oriente vers des accomplissements plus harmonieux. On pourra m�objecter que nombre de ces jeunes sont devenus terroristes ou d�linquants. Je le sais. Mais nous ne pouvons pas faire l��conomie d�une remise en question avant de condamner. Qu�est-ce qui pousse un jeune � ces extr�mit�s et qu�avons-nous fait pour leur offrir d�autres perspectives ? Nous venons de recevoir un projet de loi � l�Assembl�e sur ce dossier. Savezvous comment le pouvoir entend r�gler le probl�me des harraga ? En aggravant les sanctions p�nales ! Les harraga nous enseignent que d�s qu�un jeune a une possibilit� de se r�aliser, y compris au p�ril de sa vie, il renonce � la violence. La dignit� de la jeunesse est une des conditions de la construction de l�Alg�rie.
Quel est votre agenda pour les prochains mois ?
Pour l�essentiel, il d�pendra des orientations qui seront arr�t�es au Conseil national. Mais je vous l�ai annonc� auparavant, nous sommes dans un moment de rupture. L�heure est � la r�flexion, � la concertation et � la prospective et il faudra que chacun assume ses responsabilit�s.
Un dernier mot ?
J�esp�re que nos enfants seront fiers de ce que nous avons fait pour le pays.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.