A chaque insulte et invective �gyptiennes, plus grossi�res les unes que les autres, on essaie de se d�fendre en Alg�rie en mettant en avant l�arabit� et l�islamit� des Alg�riens ou en pratiquant la politique de l�autruche. Comme si les Alg�riens avaient besoin de se justifier en permanence devant un pays qui souffre de maux sociaux et politiques au moins aussi terribles que ceux dont souffre le n�tre. En t�moigne le r�cent rapport r�dig� par l�Institut du Caire pour l��tude des droits de l�homme, qui situe l�Egypte �en t�te de la liste des pays (arabes) o� la torture est pratiqu�e de mani�re syst�matique et routini�re�. Autrement dit, l�image positive de l�Egypte que les tenants alg�riens de l�araboconservatisme donnent en exemple est radicalement diff�rente de la r�alit� d�voil�e par l�Institut du Caire. Et se justifier par rapport � quoi quand on sait que l�histoire de l�Alg�rie est aussi riche que l�est celle de l�Egypte ? Mais encore faudrait-il l�enseigner � nos enfants qui ignorent par exemple que leur pays a enfant� Saint Augustin. En effet, alors que le peuple �gyptien est fier de son pass� pharaonique, en Alg�rie, tout est fait pour minimiser le pass� berb�re, punique, romain, comme si celui-ci ne faisait pas partie de notre identit� et appartenait � un autre pays. Ainsi nos enfants savent-ils qui sont les Circoncelions, ces damn�s de la terre avant l�heure, qui terrorisaient les riches fermiers romains dans l�Alg�rie antique ? Et que connaissent-ils de Massinissa � part des bribes, enseign�es � la va-vite, histoire de satisfaire quelques berb�ristes grincheux. De fa�on g�n�rale, le pass� antique (et m�me islamique) de l�Alg�rie n�est ni entretenu ni valoris�. Il suffit de voir l��tat d�abandon dans lequel se trouvent de nombreux vestiges antiques et partant l��tat de la recherche arch�ologique alg�rienne. Voulant �tre plus Arabes que les Arabes, souffrant d�un complexe nourri par une id�ologie islamo-conservatrice import�e � oui import�e car �trang�re � nos valeurs et � notre pass� �, la plupart des gouvernements qui se sont succ�d� depuis 1979 ont tout fait pour tirer l�Alg�rie vers le bas afin qu�elle soit � l�image de ces pays arabes, inf�od�s � l�Occident capitaliste. De ce fait, ceux qui appellent � tourner la page � alors que l�Egypte officielle exige des excuses pour je ne sais quel crime de l�se-majest� � craignent sans doute de voir s�effondrer leur r�ve d�une Alg�rie assujettie politiquement et id�ologiquement � l�islamoconservatisme. Ces gens se sont disqualifi�s par leur absence de r�action quand l�embl�me national a �t� br�l� par des avocats �gyptiens et non par des �moins que rien�, quand les m�dias, des pseudo-intellectuels, des journalistes, des artistes �gyptiens ainsi que des pr�dicateurs connus d�El-Azhar insultaient sur les cha�nes �gyptiennes le pass� et les symboles de l�Alg�rie. Reste, qu�aussi puissant qu�ils soient au pays de Moubarak, ces faiseurs d�opinion �gyptiens qui font montre de x�nophobie � l��gard de l�Alg�rie ne doivent pas nous entra�ner dans un anti-�gyptianisme � rebours et contre-productif. L�Egypte � laquelle je pense ne se r�duit ni � ces gens, ni aux Moubarak p�re et fils et leur r�gime, ni aux s�ries � l�eau de rose �gyptiennes, ni aux thurif�raires d�Oum Dounia, et encore moins aux Fr�res musulmans et aux pr�dicateurs d�El-Azhar qui soutenaient et justifiaient par leurs pr�ches et leurs fatwas le terrorisme de l�AIS et du GIA. L�Egypte � laquelle je pense est celle port�e par les po�mes et le combat de Ahmed Fouad Negm, de Cheikh Imam, par les id�es de l��conomiste engag� Samir Amin, par cette soci�t� civile qui se bat pour la d�mocratie et le pluralisme au pays de Cl�op�tre. Pour r�sumer, ce match de football entre l�Alg�rie et l�Egypte aura tout de m�me eu le m�rite de d�chirer le voile d�hypocrisie entourant les rapports alg�ro-�gyptiens tels qu��tablis depuis des d�cennies. Il va peut-�tre permettre aux Alg�riens d��tre eux-m�mes, de se regarder en face, d��tre fiers de ce qu�ils sont, de cette alg�rianit� pour laquelle Mustapha Lacheraf a tant lutt� et, partant, de nouer des rapports avec l�Egypte des droits de l�Homme, de la d�mocratie et du progr�s social.