Le professeur Kheireddine Merad Boudia, l'un des plus brillants cardiologues qu'ait enfantés l'Algérie, est revenu mercredi dernier lors de la rencontre littéraire hebdomadaire organisée par l'Etablissement Art et Culture qui se tient à la bibliothèque multimédia jeunesse à Alger, sur ses deux ouvrages qui relatent son parcours de jeune étudiant algérien engagé et de celui de cardiologue, son métier durant plus de 50 ans. Au début de son intervention, le Dr Merad s'est remémoré avec beaucoup d'émotion, les larmes aux yeux, son quartier d'à peine 300 habitants à Tlemcen où il né. «À chaque fois que je parle de mon quartier, je suis dans le même état», dira-t-il. «Ecrire est quelque chose de naturel. Si on a quelque chose à dire, on le dit tout simplement. Je ne suis pas un écrivain, ni un historien mais j'ai ressenti ce besoin d'écrire, car il me semble que j'ai un parcours riche, et que je peux transmettre beaucoup de messages. Je suis né avant 1940, donc mon premier roman De Pomaria au Jardins de France concerne une certaine époque, ma naissance, l'environnement dans lequel j'ai grandi, l'éveil nationaliste… En 1962, c'est autre chose. C'est ma mission de citoyen, et là, je le raconte dans A cœur ouvert», dira le Dr Merad Boudia. L'étudiant De Pomaria au Jardin de France, son premier roman, est une autobiographique et une contribution «modeste». Il relate une jeunesse estudiantine algérienne, à l'ombre du colonialisme et aux ferveurs nationalistes. En neuf chapitres, le Professeur Merad Boudia raconte tout son parcours. D'abord, son enfance heureuse à Tlemcen qui fut autrefois appelée Pomari, d'où le titre de l'ouvrage, la filiation de sa famille, l'histoire de Tlemcen, l'école, ses études semées d'embûches et le nationalisme en éveil. La guerre de libération qui éclate : le chaos, les assassinats sommaires, les attentats, la torture, le maquis à 17 ans, des fois le bon hasard qui sauve et la révolution en marche. Dans son ouvrage, il raconte aussi son départ et ses études en France dès 1957. Il raconte aussi qu'il ne regrette en rien le fait de ne pas s'être établi en Europe ou ailleurs : «Si c'était à refaire, je referais les mêmes choses et les mêmes choix». Il dira aussi que le colonialisme n'a révolutionné en rien la médecine en Algérie. «On se bat depuis longtemps pour avoir une médecine honorable en Algérie. Malheureusement, c'est aux "décideurs que cette mission revient aussi», dit-il. Le monde médical Dans le même état d'esprit, A cœur ouvert, paru aux éditions Thala, est un ouvrage qui rapporte le parcours de ce brillant cardiologue. «Durant plus de 50 ans, je n'ai connu qu'un seul univers, le monde médical», dit-il. Une phrase qui résume, à elle seule, son attachement et son amour pour sa profession. Une expérience qu'il n'hésitera pas à mettre au service des jeunes médecins. «Moi et mes semblables, nous nous sommes mis au service de la médecine. A 20 ans, je travaillais des heures et des heures sans savoir combien et si j'allais être rémunéré. La promotion d'une authentique médecine algérienne moderne et performante était et est toujours notre but», fera savoir le Dr Merad. Composé de 36 chapitres, A cœur ouvert aborde différents sujets dont la décennie noire, la société algérienne depuis l'indépendance sur les plans scientifique, sociologique et intellectuel. L'auteur parle aussi de la politique et la légèreté de certains responsables dans la prise de décision, quand il fallait prendre position. Malgré son âge avancé, l'écrivain a, avec la plus grande simplicité, en l'espace d'un après-midi, ravi les présents à cette rencontre avec des anecdotes et des histoires riches en rebondissements, loin de tout discours moralisateur. Kheireddine Merad Boudia est né à Tlemcen. Il est professeur de médecine et lauréat de l'Académie Nationale de Médecine de Paris. Cofondateur de la société de Cardiologie et de l'hypertension artérielle et ancien président de la Société de médecine d'Alger, il a écrit de nombreux ouvrages de médecine dont Cardiologie pratique, Hypertension artérielle et Urgences cardiovasculaires.