Absent de la scène politique depuis près de quatre mois, le secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, réapparaît mais à travers un message pathétique aux mouhafedhs où il leur exprime ses vœux pour l'Aïd. Le message de Saâdani, contesté de toutes parts, a une seule signification politique au moment où sa disparition de la scène se prolonge. «Je suis toujours là», semble-t-il vouloir dire à ses représentants à travers les différentes wilayas. Mais ce message est loin d'extirper le patron de l'ex-parti unique du bourbier dans lequel il s'est engouffré jusqu'au cou. La contestation prend de l'ampleur et sa tête est de plus en plus demandée. Nombreux sont les cadres du parti, entre députés et membres du Comité central, qui sont convaincus que son règne absolu sur le parti tire à sa fin. «Son départ est imminent. Il reste juste à trouver un mécanisme pour le destituer. La tâche ne sera pas facile car il ne veut pas partir. Il est en train de faire de la résistance», indique une source proche de lui, qualifiant sa longue absence de «fuite en avant». Le processus de destitution semble avoir été enclenché avec la lettre des 14 moudjahidine réclamant le départ immédiat de Saâdani et son équipe de la direction du FLN. L'une des signataires, Zohra Drif Bitat, a affirmé hier dans une déclaration médiatique que la mobilisation pour le départ de Saâdani sera relancée après l'Aïd. Depuis le lancement de l'appel des moudjahidine, fin juillet dernier, plusieurs structures locales ont exigé de mettre fin aux «dérives» de la direction conduite par le secrétaire général. Abderrahmane Belayat, meneur des frondeurs, a assuré que les demandes de départ de Saâdani vont se généraliser pour toucher toutes les wilayas du pays. La réunion annuelle du Comité central, instance souveraine entre deux congrès, prévue le mois d'octobre prochain, sera-t-elle mise à profit pour un retrait de confiance au patron du parti majoritaire ? En tout cas, la contestation grandit et le plan de destitution semble en marche. Ce jeudi, 63 personnes entre parlementaires, anciens membres du comité central et simples militants ont signé un communiqué dans lequel elles s'associent à l'appel des 14 moudjahidine pour «la délivrance du FLN confisqué». Pour eux, la position des 14 moudjahidine «reflète le sentiment des militants de base du FLN à l'échelle nationale vis-à-vis de la situation du parti depuis 2013». «Nous, cadres et militants représentant l'instance dirigeante unie du FLN, nous associons à l'appel des moudjahidine qui revendiquent la libération du parti de l'emprise de la bande des lobbies de l'argent, des opportunistes et des aventuriers qui ont transformé le parti en commerce fructueux», soulignent-ils. Spectacle... Depuis son installation à la tête du parti le 31 août 2013, Saâdani l'a géré d'une main de fer, de manière spectaculaire et unilatérale, le réduisant à ses sorties personnelles destinées souvent à solder des comptes avec ses adversaires politiques de tous bords. «Il a perpétré un rapt contre la direction du parti», soutient Belayat, ajoutant que «Saâdani n'a aucun intérêt à rester». Bien qu'il fasse l'unanimité contre lui, le patron du FLN promet une nouvelle opération d'épuration, une grande purge juste après son retour du hadj. Cette purge, si Saâdani n'est pas délogé entre temps, touchera, selon nos sources, des membres du comité central, des parlementaires et des mouhafedhs qui ont exprimé leur soutien aux moudjahidine ou simplement pour avoir assisté à la fête du mariage du fils de son ennemi juré, Abdelaziz Belkhadem. Bien évidemment, la sanction ne pourra pas être une exclusion pure et simple puisque cette mesure disciplinaire obéit à toute une procédure qui doit respecter les textes du parti. Les concernés seront en effet empêchés d'occuper les têtes de liste du parti au titre des élections législatives du mois de mai prochain, nous apprend une source proche de Saâdani. La guerre des tranchées au FLN a atteint même ses organisations satellitaires, à commencer par celles en lien avec les moudjahidine. L'Organisation nationale des enfants de chouhada (Onec) s'est engluée dans une crise qui a abouti à la destitution de son désormais ex-secrétaire général, Tayeb El-Houari. La Coordination nationale des enfants de chouhada (Cnec) connaît, elle aussi, un début de crise. Le secrétaire général de la section de Bouira vient d'être limogé, accusé d'avoir apporté son soutien à… Amar Saâdani. A la veille des élections législatives, les choses se présentent très délicatement pour le parti majoritaire. Ce qui multiplie les risques de le voir divisé davantage. Le parti majoritaire se donne véritablement en spectacle.