L'approche de l'Aïd El Adha a simplement flambé les prix. Une nouvelle fois les bourses sont mises à rude épreuve. L'approche de l'Aïd El Adha a simplement flambé les prix. De la pomme de terre au mouton, tout a subi une augmentation. Ces hausses sont différemment justifiées. Si pour le mouton, les arguments peuvent tenir la route, pour la pomme de terre, c'est simplement une preuve de l'échec de tout un département, celui de Benaïssa. Les promesses d'une baisse du prix avec l'arrivée des récoltes de la saison et celles de l'après-saison, les chiffres énormes d'une production avoisinant les 2 millions de tonnes, les facilités accordées aux producteurs, la gratuité de l'eau, par exemple... n'ont pas affaibli le diktat des spéculateurs qui dictent leur loi au consommateur. Pour revenir à l'évènement du moment, une virée au marché à bestiaux découragera le plus téméraire. Un mouton qui a coûté 25.000 DA, l'année passée est proposé à 45.000 DA cette année. Pourquoi ce bond avons-nous demandé aux vendeurs? les réponses sont comme pour les autres produits non convaincantes. Pour les éleveurs, ces prix sont le fait des revendeurs. «Certes l'aliment a beaucoup manqué, les dépenses et les frais ne sont plus ce qu'ils étaient mais l'arrivée sur le circuit d'intermédiaires demeure la raison principale de cette flambée des prix.» Sur place, au marché à bestiaux de Bouira, ils étaient nombreux à proposer des moutons. Des fonctionnaires de l'administration, des enseignants, des commerçants, jusque-là plongés dans d'autres filières, se sont reconvertis en maquignons. Selon une source, ils s'alimentent auprès de petits éleveurs du Sud de la wilaya, des régions de Sour El Ghozlane et même de Sidi Aïssa. Le fait de proposer 3 à 4 ovins démontre qu'ils ne sont pas des spécialistes mais des intermédiaires circonstanciels. Un éleveur de Ouassara nous confirmera la thèse. «J'ai cédé une dizaine de moutons au prix de gros; mes moutons, je les ai retrouvés mais avec des marges de plus de 10 000 DA, ici à Bouira». L'ouverture de l'autoroute et la réduction sensible dans la liaison entre Bouira et la capitale est un autre élément qui a influé sur les prix. Ils sont nombreux à venir d'Alger, de Boumerdès pour acheter. La grosse demande est une aubaine saisie par les intermédiaires. Hier, au quartier 1100 logements, dans l'espace réalisé pour les enfants, un jeune proposait 10 moutons. Alors que les citoyens marchandaient avec lui, un autre jeune est arrivé pour prendre le tout au prix global de 35 millions de centimes. Dans l'après-midi les mêmes animaux se vendaient à 45, 46 et 47.000 DA. Un autre fait est à signaler. Les vendeurs se sont constitués en un puissant lobby et se consultent entre eux avant d'afficher les prix. Une grande enseigne commerciale, installée à Bouira, propose des bêtes sur pied. Là aussi, ni le produit, ni les prix ne sont satisfaisants, même si l'opération est accompagnée d'un grand tapage publicitaire. La présence des enfants à l'achat n'a pas échappé aux vendeurs qui, d'emblée, tentent d'influencer le môme qui prendra le relais pour convaincre les parents. Qui a dit que les Algériens ne sont pas des génies? en voyant ce qui se passe, les plus anciens regrettent le passé où l'Aïd se voulait d'abord une fête du sacrifice, les retrouvailles, l'entraide, la solidarité. L'Aïd de nos jours, c'est à qui exhibera le plus grand mouton, à celui qui se vantera d'avoir égorgé un deux-cornes sans un regard pour le voisin qui n'a pas pu satisfaire le caprice de ses enfants. En attendant le retour des hadjis, une autre occasion pour dépenser, les Bouiris subiront la loi des intermédiaires, la pression des enfants et les fetwas sur la validité ou non d'une association autour d'un taureau, pour passer une fête qui n'a rien de vrai.