Des hommes en cagoule patrouillent dans les villes russophones de l'Est de l'Ukraine Insurgés russophones et forces armées ukrainiennes se livraient hier un bras de fer tendu dans l'Est, à la veille de pourparlers où Moscou veut exiger une «fédéralisation» refusée par le gouvernement pro-européen de Kiev. Les services spéciaux ukrainiens ont accusé les groupes russophones d'avoir reçu l'ordre de «tirer pour tuer» faisant encore monter la pression. Et le ministère de la défense a affirmé que deux militaires avaient été «pris en otages» mardi dans la région de Lougansk. Une colonne de six transports de troupes blindés, arborant le drapeau russe, stationnait à Slaviansk, à quelques km au nord, ville emblématique de la dernière série d'insurrections pro-russes, contrôlée depuis dimanche par des insurgés armés. Les blindés étaient arrivés dans la matinée depuis la localité voisine de Kramatorsk, à quelques km plus au sud. Plusieurs dizaines d'hommes vêtus des mêmes uniformes sans insignes, mais avec des rubans de Saint-Georges orange et noir, ordre honorifique des forces armées russes, étaient installés sur les blindés. Ils étaient équipés d'armes de guerre et nombre d'entre eux portaient des cagoules noires. La provenance des blindés n'était pas immédiatement connue, l'agence Interfax-Ukraine affirmait qu'il s'agissait de blindés ukrainiens pris par les russophones à leur entrée dans Kramatorsk, mais ni le ministère ukrainien de l'Intérieur, ni celui de la Défense, n'ont reconnu la perte de tels équipements. Mardi, les troupes ukrainiennes avaient avancé en direction de cette localité depuis le nord et le sud, pour prendre les séparatistes en étau. Les autorités de Kiev et les Occidentaux affirment que les «hommes verts», comme des groupes armés sont surnommés en Ukraine, sont en fait des militaires russes, à l'image de ceux qui étaient intervenus en mars dans la péninsule de Crimée avant son rattachement à la Russie. La Russie dément, accusant au contraire les autorités pro-européennes issues du renversement fin février du régime du président Viktor Ianoukovitch, lors de soulèvements violents à Kiev, d'avoir conduit le pays «au bord de la guerre civile», comme le président Vladimir Poutine l'a encore dit à la chancelière allemande Angela Merkel mardi soir au téléphone. Les autorités de Kiev, que Moscou ne reconnaît pas, avaient lancé dimanche une «opération antiterroriste de grande envergure» dans l'Est russophone du pays pour reprendre la main après la deuxième série de soulèvements pro-russes en une semaine, qui a vu des séparatistes s'emparer de bâtiments publics dans plus d'une demi-douzaine de villes. Hier matin, dans un nouveau défi au pouvoir central, un groupe d'hommes cagoulés et armés a pénétré dans la mairie de Donetsk, grande ville de l'Est de l'Ukraine, où des séparatistes avaient déjà proclamé une «république souveraine». Les inconnus n'empêchaient pas les employés d'entrer et sortir du bâtiment, affirmant avoir pour seule revendication l'organisation d'un référendum sur la «fédéralisation» de l'Ukraine. Les pourparlers Ukraine-Russie-Etats-Unis-Union européenne prévus aujourd'hui à Genève s'annoncent donc extrêmement tendus. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a ainsi pointé du doigt un Etat ukrainien «qui a cessé de fonctionner», estimant que seule la fédéralisation pouvait permettre de sortir de la crise. M. Poutine et Mme Merkel ont de leur côté «exprimé l'espoir que la rencontre de Genève puisse donner un signal clair pour faire revenir la situation dans un cadre pacifique». En cas d'échec de cette réunion, les Etats-Unis ont indiqué être prêts à imposer de nouvelles sanctions contre Moscou. Selon le département d'Etat, cela pourrait vouloir dire cibler davantage d'individus que ceux visés par les sanctions existantes, voire interdire l'accès à certains secteurs économiques clés comme les mines, l'énergie et les services financiers.