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Démarche intelligente ou acrobatie sans filet?
L'ADHESION DE L'ALGERIE DANS L'OMC
Publié dans L'Expression le 27 - 06 - 2004

Beaucoup d'intellectuels des pays développés s'accordent à dire que l'ambition discrète de la mondialisation, c'est la destruction du collectif et l'appropriation par le marché et le privé des sphères publique et sociale dans le but de construire une société où l'individu sera enfin privatisé et où s'épanouira la matière sur l'esprit.
«Je définirais la mondialisation comme la liberté pour mon groupe d'investir où il veut, le temps qu'il veut, pour produire ce qu'il veut, en s'approvisionnant et en vendant où il veut, et en ayant à supporter le moins de contraintes possibles en matières de droit du travail et de conventions sociales.»
Percy Barnevik, ancien président de ABB
Une grande privatisation de tout ce qui touche à la vie et à la nature se prépare, favorisant l'apparition d'un pouvoir probablement plus absolu que tout ce qu'on a pu connaître dans l'histoire, tandis que de nouveaux et séduisants «opiums des masses» proposent une sorte de «meilleur des mondes» et distraient les citoyens. C'est le cas à titre d'exemple de l'Internet. C'est le cas aussi de la nouvelle culture ; une «macdonalisation» forcément planétaire et volatile. Ce qui est en fait demandé aux PVD, c'est d'ouvrir leur marché, c'est de laminer leur production nationale et la donner en pâture aux multinationales qui sont de loin plus performantes. Est-ce cela la mondialisation du bonheur des chantres du libéralisme à outrance à l'instar de Alain Minc? (1).
La profession de foi de Percy Barnevik est sans appel. Elle situe véritablement les enjeux. Les multinationales sont tellement puissantes (comme les multinationales du pétrole), qu'elles combattent des Etats, font et défont des gouvernements, se déclarent une guerre permanente et s'entendent par-dessus tout pour éliminer les plus faibles, notamment les sociétés des pays en développement qui déclarent faillite car leur gouvernement ne peut pas faire autrement que d'ouvrir le pays aux capitaux et aux nouveaux pouvoirs. Ce vingt et unième siècle est, assurément, le début d'une nouvelle colonisation : c'est le colonisable qui appelle le colonisateur potentiel à son secours pour venir l'exploiter à distance et à demeure. (2)
Pour les firmes multinationales, le message fondamental du libéralisme est qu'il faut toute la liberté pour les firmes, et toutes les charges pour les Etats à qui elles font la bonté de leur permettre de les accueillir, mais en exigeant de limiter au maximum les taxes et réglementations, car sinon elles partent ailleurs. Nike est une firme transnationale qui sous-traite toutes ses opérations de production. Ce qui explique la faible part de la main-d'oeuvre dans les coûts de fabrication (moins de 1 % du prix de vente d'une chaussure en 1998) et, en même temps, la situation des ouvriers indonésiens ou chinois qui les fabriquent : pas un salaire ne dépasse les 50 euros par mois, pour 12 heures de travail par jour. (3)
La mondialisation est en fait un processus qui met en jeu à la fois l'économie, les finances, la science et la technologie, la communication, l'éducation, la culture et la politique.
De plus, la diffusion d'une «culture mondiale» représentée par des concepts, des valeurs et des modes de comportement occidentaux véhiculés par les différents moyens de divertissement et supports culturels tels la musique, les films, les livres, les magazines, les dessins animés. Ainsi, leur influence se perçoit à travers les nouvelles habitudes de consommation en matière de nourriture, d'habillement, de musique et de sport. (4)
Qu'est-ce que l'OMC?
L'Organisation mondiale du Commerce a pris la suite du Gatt. Elle se propose de mettre en place un marché planétaire où en théorie, le commerce serait vertueux. Dans la réalité il n'en est rien. C'est une véritable loi de la jungle où les plus forts font la loi. «Cet unique super-pouvoir, écrit Pierre Bourdieu, cette Mecque symbolique de la Terre, est caractérisé par le démantèlement délibéré de l'Etat social et l'hypercroissance corrélative de l'Etat pénal, l'écrasement du mouvement syndical et la dictature de la conception de l'entreprise fondée sur la seule «valeur-actionnaire», et leurs conséquences sociologiques, la généralisation du salariat précaire et de l'insécurité sociale, constituée en moteur privilégié de l'activité économique».(5)
En fait, l'objectif inavoué des Européens est surtout de protéger leur agriculture par des subventions. Une part croissante des conflits commerciaux entre l'UE et les Etats-Unis se termine devant l'OMC. (6)
Pour répondre aux restrictions de l'UE à l'importation de certains produits américains, comme la viande de boeuf élevé aux hormones, Washington a érigé un système de sanctions surnommé «Carrousel». L'organe suprême de l'OMC est la conférence ministérielle, composée des représentants de tous les Etats membres et qui se réunit au moins une fois tous les deux ans. L'ouverture concertée des marchés et la négociation de règles ne suffisent pas à garantir le bon fonctionnement des échanges multilatéraux. En réaction à ces lacunes, l'OMC, s'est dotée d'un mécanisme l'Organe de règlement des différends (ORD). Il est qualifié «d'essentiel pour assurer la sécurité et la prévisibilité du système commercial multilatéral». En premier lieu, l'OMC entend libéraliser encore davantage les échanges agricoles, ce qui, dans beaucoup de pays, aura pour effet de mettre en péril le monde rural et, pour les plus pauvres d'entre eux, de leur faire perdre toute maîtrise sur leur sécurité alimentaire. Le renforcement de l'accord sur la propriété intellectuelle, connu sous le sigle de Trips (Trade-related aspects of intellectual property rights), dont le brevetage du vivant est l'un des fleurons, figure également au programme. D'autre part, l'Accord Général sur le commerce des Services, dit Gats (General agreement on trade in services est chargé de réguler le secteur des services. Ces services englobent quasiment toutes les activités humaines, notamment la recherche-développement les services de communication, l'audiovisuel, les technologies de l'information ; les services récréatifs, culturels et sportifs, dont les spectacles, les bibliothèques, les archives et les musées ; l'édition, les transports par toutes les voies. Sans oublier l'éducation, le supérieur et la santé animale et humaine - soit plus de 160 sous-secteurs et activités !! L'enjeu est conséquent. Tous les secteurs sont menacés. Un marché plus juteux à terme, que les marchandises. Plus de 2000 milliards de dollars pour la santé, 1000 milliards pour l'éducation.
Enfin, sous le terme de «propriété intellectuelle» se cachait toute la question des brevets, notamment sur des organismes vivants génétiquement modifiés. Les négociations sur les Trips (de l'anglais Trade-related intellectual property rights, Adpic en français) ont été l'occasion pour les pays industrialisés d'établir de nouvelles règles internationales visant à protéger les revenus rentiers monopolistiques des sociétés transnationales, tout en empêchant l'accès des pays du tiers-monde au savoir et à l'innovation technologique. Les brevets ont également servi au pillage des ressources des pays du Sud où plus de 80% de ceux-ci sont détenus par des étrangers, principalement par des transnationales américaine, anglaise, allemande, française et suisse.
Des Etats plus égaux que d'autres
La grande diversité biologique du Sud, découverte, modifiée ou adaptée, est donc en train de devenir, à grands pas et grâce à l'aide de l'OMC, la «propriété intellectuelle» d'intérêts privés. Enfin, les brevets sur les semences sont une institutionnalisation de la domination perverse des transnationales de l'agroalimentaire sur les paysans.
En imposant au reste du monde des catégories de perception homologues de ses structures sociales, les Etats-Unis refaçonnent le monde à leur image : la colonisation mentale qui s'opère à travers la diffusion de ces vrais-faux concepts ne peut conduire, selon Bourdieu, qu'à une sorte de «Washington consensus» généralisé comme on peut l'observer aujourd'hui en matière d'économie.
L'instance suprême de l'OMC est la Conférence ministérielle, qui se réunit en général tous les deux ans. Dans l'intervalle et un échelon plus bas dans la hiérarchie, le pouvoir de décision appartient au Conseil général. Au sein de ces instances, les décisions se prennent officiellement à la majorité simple des pays représentés, les décisions se prennent par consensus. Tout se passe en coulisses. Un très grand nombre de pays en développement sont tenus à l'écart de ce processus de consultations qui représente une négociation à part entière. C'est ainsi que même si chaque Etat membre dispose d'une voix à l'OMC et du même pouvoir de décision que celui des grands, les pays en développement sont laissés à l'écart des véritables négociations. Le rapport de forces est donc très défavorable aux pays en développement, non seulement en termes de puissance économique et politique mais aussi, très ironiquement, pour ce qui est du nombre de ceux qui sont admis à participer.(7) Si chacun de ses 134 Etats membres participe aux négociations de l'OMC, les «équipes» sont dotées de talents, de forces et d'expériences différentes. Face à l'Europe, qui représente à elle seule 20,4% du commerce mondial (hors échanges internes à la communauté), certaines équipes constituent aussi de véritable «poids lourds» capables d'influencer d'autant plus fortement le sens des négociations qu'elles savent constituer des alliances ou des groupes d'influence au service de leurs objectifs. Comme l'Europe, les Etats-Unis occupent une place à part sur la scène commerciale internationale. Fort de leur rang de première puissance économique mondiale, les Etats-Unis disposent d'une administration commerciale importante en nombre et en qualité (United States Trade Representative : Departement du Commerce).
Parmi les groupes influents, La Quadrilatérale ou Quad est une structure de concertation informelle réunissant régulièrement les quatre plus grands acteurs du commerce international : la Communauté européenne (représentée par la Commission), les Etats-Unis, le Canada et le Japon.
Il faut ajouter le groupe de Cairns qui a été mis en place à la veille du lancement des négociations du cycle d'Uruguay. Il réunit une quinzaine de pays issus de quatre continents et partageant des objectifs offensifs pour la libéralisation des échanges agricoles. Principale force de coordination des pays en développement, le Groupe des 77 (G77) a été créé en 1964 au terme de la première conférence des Nations unies (Cnuced). Vis-à-vis de l'OMC, le G77 contribue à l'élaboration d'une position unifiée visant à promouvoir les intérêts du monde en développement dans les négociations. La principale faiblesse du G77 résulte aujourd'hui de l'hétérogénéité d'un groupe réunissant des pays aux situations objectivement aussi différentes que celles de Singapour et du Bangladesh. Il faut citer aussi les autres acteurs constitués par les organisations économiques régionales Constituée en 1989 à l'initiative des Etats-Unis et de l'Australie, l'Apec est une organisation intergouvernementale (Asia pacific économic cooperation) rassemblant 18 pays de la région Asie-Pacifique. Parmi les autres organisations régionales Les pays du Mercosur (Marché commun sud-américain), de l'Ansea (Association des nations du sud-est asiatique).
On voie qu'en face de ces organisations compétentes structurées et puissantes que peut faire un pays comme l'Algérie dont 98 % des recettes sont constitués par les hydrocarbures que l'on veut pas prendre en charge dans les négociations comme c'est le cas de l'accord avec l'Union européenne.
La mondialisation et les PVD
L'un des grands paradoxes des relations économiques internationales est le «poids réel des PVD». Les pays en développement, qui sont quatre fois plus nombreux que les pays développés au sein de l'OMC, ne sont pas en mesure de peser sur les décisions et se voient confrontés, quasiment en permanence à des situations qui leur sont défavorables.
Les gouvernants du Sud se trouvent à l'origine de la plupart des idéologies qui insufflent aux masses une patience relative au besoin en développant des alliances avec des composantes rétrogrades. On l'aura compris, comme conséquence, d'importantes masses d'individus au chômage vivotent grâce à l'économie informelle, (comme le trabendo en Algérie). Ils sont prisonniers des firmes «protégées par leurs Etats respectifs» et demandent aux citoyens la patience, ils promettent des réformes. «Les choses iront sûrement mieux, sinon dans l'immédiat, du moins pour nos enfants et nos petits-enfants».
Par ailleurs, les Etats sans ou en perte de légitimité ne peuvent plus dompter les classes dangereuses. Un peu partout, ceux qui voyaient autrefois en l'Etat une puissance transformatrice, manifestent maintenant un profond scepticisme quant à sa capacité à promouvoir le changement, voire à assurer l'ordre social. (8)
Cette analyse décapante de la situation des PVD trouve une application magistrale en Algérie. Ainsi, à tous les problèmes ainsi énumérés, s'ajoute en Algérie, un autre problème de fond, celui de l'errance identitaire et religieuse qu'aucun gouvernement depuis l'indépendance, n'a voulu ou pu prendre en charge. Les événements actuels çà et là ont lieu du fait que ces ingrédients de mal vie, de chômage, de népotisme de hogra , ont été amalgamés à cette quête légitime de l'identité de tous les Algériens.
Il est bien connu que la formation des hommes a toujours été le critère le plus important du développement des nations. En ce début du vingt et unième siècle, tous les pays du Nord ou du Sud, riches ou pauvres, connaissent à des degrés divers de profondes mutations sociales économiques et même existentielles...Le mot-clé de ces mutations et l'adaptation à un monde en perpétuel devenir, un monde d'où sont exclus les faibles et les pauvres.
L'éducation tend à devenir un service marchand à part entière. «Les menaces qui pèsent sur l'enseignement public sont donc bien réelles. Comme le craint l'Internationale de l'éducation» C'est l'assujettissement plus poussé des systèmes d'éducation aux impératifs de l'entreprise privée. De plus, «l'idée de placer les systèmes nationaux d'éducation en situation de concurrence n'équivaut-elle pas à livrer, pieds et poings liés, ceux des pays les plus faibles à quelques grandes entreprises transnationales?».(9)
En 1998, le volume du commerce international de l'enseignement supérieur était estimé à 47 milliards de dollars. Par ailleurs, les données de l'Unesco révèlent que les Etats-Unis occupaient le premier rang parmi les pays exportateurs de services d'éducation, suivis de loin par la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni. L'exportation de services d'éducation - 7 milliards de dollars aux Etats-Unis en 1996. La convergence entre la science , la technologie et la consommation a contribué à la spirale de croissance économique. Elle a du même coup entraîné dans son sillage, la diffusion planétaire de la production du savoir. La notion de l'Etat au sens classique du terme, à savoir l'Etat providence, qui devient dans certains cas un Etat rentier, disparaîtra. Le processus de mondialisation risque si de plus, il était appliqué à l'éducation, de conduire à la mise en place d'un modèle mondial d'enseignement supérieur standardisé, dans lequel l'Etat s'effacerait. Le marché aura alors le privilège de modeler les cursus et les carrières.
Comme l'écrit Jacques Attali : «Même s'il est illusoire de prétendre pouvoir donner une liste de tous les savoirs qui seront nécessaires après demain, la plupart des métiers exigeront une pratique très aisée de l'informatique et de toutes les technologies de l'Internet au virtuel - la maîtrise écrite et symbolique de trois langues dont la langue maternelle et une bonne connaissance de l'environnement international.» (10)
Dans une Algérie en pleine mutation économique et même sociale, l'université est totalement absente du débat et n'a pas été consultée. Aucun choix économique, aucun remède dicté par les meilleurs stratèges étrangers ne peut être efficace si on ne prend pas en compte la dimension éducative et culturelle du pays. L'université devra non seulement prendre en charge les préoccupations de tout type de la société mais aussi faire preuve d'imaginaire pour prévoir bien à l'avance les mutations de demain et former l'homme qu'il faut pour les prendre en charge.
Conclusion
Sans doute la question la plus importante qui doit nous occuper est quelle civilisation voulons-nous bâtir au XXIe siècle? De quelles solidarités aurons-nous besoin dans un monde désormais intimement interdépendant? Quelle sera la place de la personne humaine dans un monde de plus en plus dominé par les machines et les logiques abstraites? Il est bien exact que la globalisation a permis d'accroître le produit intérieur brut, mais, le «Bonheur Intérieur Brut» n'en profite pas. Le fait est que l'on est de plus en plus impuissant à redistribuer la richesse L'entrée de l'OMC est incontournable, mais il faut se défendre pied à pied ; s'il le faut produit par produit, ce n'est cependant qu'un sursis. A terme, la déréglementation est là, les droits de douane seront abolis. Que deviendra notre tissu industriel s'il ne s'adapte pas? Cependant s'il est évident que L'Etat ne peut utiliser indéfiniment l'argent du contribuable pour perfuser des entreprises bancales, il est évident que la cinétique de mise à niveau est spécifique de chaque activité. Il faut par exemple faire très attention de s'entourer de toutes les garanties visant à ne pas brader certains secteurs de souveraineté. L'énergie en fait partie, l'Ecole en fait partie, la culture en fait partie.
Que savons- nous de notre entrée dans cet enfer de l'OMC, quand on sait que la culture est devenue un produit marchand. Il n'est pas impossible de voir débarquer une multinationale nous imposer sa langue après son coca et son Macdo.
Il est clair que l'ouverture du marché algérien aux produits agricoles venus d'Europe perturbera l'agriculture locale, qui n'arrive pas à répondre à une demande croissante. Il faut donner «le temps et l'argent» à l'agriculture pour qu'elle devienne compétitive face aux produits européens.
L'adhésion à l'OMC fera que l'Algérie bénéficiera, nous dit-on, des facilités accordées aux économies en développement. Avec cette adhésion, les productions locales se trouveront menacées. Avec cette adhésion, l'Algérie se trouvera confrontée à une perte financière suite à la diminution des impôts et taxes douanières, ce qui aura forcément une répercussion sur le Trésor public, cette perte ne pourra être compensée que par la croissance des échanges internationaux, ce qui est très aléatoire. On sait ce qu'on va perdre en droits de douane, mais nous n'avons aucune idée de ces échanges internationaux.
En Algérie l'absence de syndicats autonomes et au fait des arcanes des défis de la mondialisation a laissé libre cours aux gouvernants pour faire passer en force des textes, traités et autres accords tel celui annoncé de l'adhésion à l'OMC sans qu'un débat réel ait été engagé et que la société ait été consultée A bien des égards, nous donnons l'impression de rentrer dans le futur à reculons. Avec nos interrogations identitaires et qui n'ont pas lieu d'être, nous donnons l'impression de nous noyer dans un verre d'eau alors que le raz de marée de la mondialisation est derrière nous.
Que restera-t-il de nos «chers thaoubets» qui ne sont pas des produits marchands? Nos intellectuels doivent réfléchir rapidement à des stratégies pour limiter la casse. Il faut pour cela que les princes qui nous gouvernent se légitimisent par la transparence de la gestion, le respect de la démocratie et la contribution à l'émergence de la méritocratie par une implication sans arrière-pensée de l'université dans les grands dossiers qui structurent l'avenir du pays. Le salut est à ce prix. Il s'avère indiqué alors de mettre sous haute surveillance les effets et méfaits d'une mondialisation qui ne fait pas de place aux damnés de la terre. La mise en place d'un observatoire de la mondialisation est plus qu'une nécessité, c'est un gage de survie, tant il est vrai, qu'il peut à l'avance simuler les mutations rapides qui se passent dans le monde, bien avant que les conséquences soient subies par les peuples fragiles et en quête de bien-être.
Enfin, le monde a changé, nos certitudes d'avant sont de plus en plus fluctuantes. Du point de vue stratégie, il paraît urgent de mettre en chantier les chantiers du futur dans tous les domaines. Rien ne doit plus être tabou, ni les langues ni les liens traditionnels aussi bien à l'Est comme au nord de la Méditerranée. Tout devrait être limpide. Churchill disait : «L'Angleterre n'a pas d'amis ou d'ennemis, elle n'a que des intérêts permanents».
Le moment est venu de développer une stratégie de vainqueur en tournant le dos à une mentalité de colonisé nostalgique qui ne nous a apporté que des avanies. Un partenariat global (culturel, économique scientifique, sécuritaire), autrement plus important que les tentatives désespérées de mégoter avec l'Union européenne, avec la puissance dominante, pourrait nous permettre de rattraper le train du progrès. Il s'avère de la plus haute importance de remettre à plat l'accord avec l'Union européenne que nous avions signé - du fait de notre situation sécuritaire délicate- en y introduisant de nouveaux concepts tels que celui de la formation supérieure, de la recherche du placement de notre diaspora de l'intelligence et qui n'a rien coûté paradoxalement au pays d'accueil... Les négociations actuelles portent sur des problèmes de forme et non sur le fond. A nous d'être convaincants.
Cependant encore une fois, rien ne peut se faire sans une société apaisée, qui s'accepte dans sa diversité, qui tourne le dos au jacobinisme outrancier en contribuant à l'épanouissant des régions comme c'est le cas des landers en Allemagne ou des Etats aux Etats-Unis.
Un Etat centralisateur est condamné à la fois de l'intérieur et de l'extérieur par cette mondialisation qui veut plus avoir à faire aux individus qu'aux Etats. Des choix douloureux bien expliqués pourraient emporter l'adhésion des Algériens et de ce fait, il est possible de les mobiliser en vue d'un effort collectif sous-tendu par une transparence et une justice sociale.
L'Algérie, pays en voie de développement confronté à de multiples défis et non des moindres, saura-t-elle s'inspirer de cette conception de la créativité et de l'originalité qui la sous-tend pour consolider une culture originale et originelle capable de revivifier la conception de la Nation, définie comme ce «désir d'être ensemble», selon le bon mot de Renan.
1 Alain Minc : La mondialisation heureuse. Editions La Découverte. Paris, 1992.
2 Chems Eddine Chitour: La mondialisation : Espérance ou chaos? Editions Anep, Alger, 2002.
3 Attac, Enquête en cours sur les multinationales . Editions Mille et Une Nuits N° 31.
4.Mekki El Mrouni : L'enseignement supérieur dans la perspective du 21e
siècle : Exigences et tendances de développement. Conférence Unesco. Paris 5-9 octobre 1998.
5.Pierre Bourdieu : La nouvelle vulgate planétaire : Le Monde Diplomatique. Aôut 2000.
6. Bernard Cassen: L'OMC, l'attentat contre la démocratie. Le Monde Diplomatique. 8 octobre 1999.
7. Bhagirath Lal Das Directeur des programmes CNUCED : «Le renforcement des pays en développement à l'OMC» Les acteurs . /La Lettre N°28 - 25/ novembre 1999.
8. X.Y.C'était quoi le Tiers-monde? Le Monde diplomatique Août 2000.
9. Nino Hirtt : «Appel pour une Ecole démocratique», L'OMC et le cycle du millénaire : Les enjeux pour l'éducation publique - Question en débat n°2, mai 1999.
10. J. Attali. Pour un modèle européen d'enseignement supérieur. Le Monde de l'Education.p.22 . 11 janvier 1999.


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