Le 20 mai dernier, au camp des réfugiés d'Aousserd, à 7heures pile. Un jour de fête pour le peuple sahraoui. Il y a 50 ans, plus exactement en 1973, le Polisario, fraîchement créé, entame la lutte armée contre l'occupant espagnol. Une date qui symbolise la résistance de ce peuple vaillant, où la gent féminine résiste depuis des décennies à l'occupant marocain. C'est ce que nous avons constaté, durant notre présence, à l'occasion des festivités dédiées à la célébration d'un demi-siècle de lutte, où les femmes et les jeunes filles sahraouies se sont distinguées par leur rôle pivot et leur présence dans une société très bien organisée, contrairement aux idées reçues et véhiculées par leurs bourreaux, traitant ces hommes et ces femmes de peuple «nomade». «On avait, certes, des tentes, mais nous avions des demeures stables et des troupeaux. On a tout laissé derrière nous», témoigne Mneiha, qui habitait l'oasis d'Oum Dreiga, à l'est de Dakhla, il y a de cela 47 ans. Notre interlocutrice, faisant partie de la population ayant été chassée, en 1976, de ses terres par la force, et qui a rejoint les camps de réfugiés. Après le «cocorico» annonçant le lever du soleil, le tour était venu, pour les brebis et les chèvres, d'accentuer leur cris! «Elles bêlent parce qu'elles ont faim», comme expliqué par Mneiha, la cheffe de la famille sahraouie qui nous a accueillis durant notre séjour. Notre interlocutrice s'est réveillée bien avant, pour traire les brebis et les chèvres et ramasser un tas de branches de la seule espèce d'arbres qui pousse dans cette zone hyper-aride; l'acacia Raddiana. Une tâche qui n'est pas aisée; les branches de cet arbre sont pleines d'épines et ses feuilles sont petites et rares. Malgré les pressions... «Les brebis vont ''arracher'' toutes ces branches, en quelques minutes, comme des piranhas. Heureusement, rien ne sera jeté. Le bois de l'acacia réduit en charbon, est un combustible qui tient longtemps, idéal afin de se chauffer ou pour préparer du thé», nous expliquera-t-elle encore. Mneiha s'occupe de tout. Son mari est absent, il fait partie des vaillants militaires qui combattent le long du mur de la honte dressé par le Makhzen. Presque tous les hommes sont partis à la guerre, depuis la reprise «légitime» de la lutte armée contre l'occupant marocain ayant violé l'accord de cessez-le-feu de 1991 avec le Front Polisario, à la suite de l'agression militaire qu'il a menée, le 13 novembre 2020, contre des manifestants pacifiques, sans armes, à El Guerguerat. Ce jour-là, des Sahraouis civils, hommes et femmes, représentant notamment des associations de la jeunesse, des femmes, des travailleurs, des organisations de défense des droits de l'homme et plusieurs ONG opérant dans le domaine socioculturel, avaient observé des sit-in à différents endroits pour protester contre l'ouverture, illégale, de trois nouvelles brèches dans le mur de sable. Les manifestants réclamaient «pacifiquement» le retrait immédiat des troupes marocaines des territoires sahraouis occupés et de dévoiler le sort des disparus ainsi que la libération de tous les prisonniers sahraouis détenus dans les geôles marocaines. Durant notre séjour, nous avons rencontré l'une des icônes de la résistance sahraouie engagées dans la lutte pour la souveraineté et le pouvoir populaire. Elle s'appelle Sakina Djedou Ahlou. Elle a passé plus de 12 ans dans les cachots marocains. «J'ai été torturée à maintes reprises. On m'a volée plus d'une décennie de ma vie», a-t-elle témoigné. «Le Makhzen continue de commettre des crimes contre les prisonniers et les prisonnières sahraouis. Nombreux sont ceux et celles qui croupissent dans les prisons du sanguinaire Makhzen. Ils sont victimes d'abus et sont détenus dans des conditions d'hygiène déplorables», a-t-elle encore dénoncé. Des dépassements et des violations des droits de l'homme commis par le Maroc au Sahara occidental occupé, ne cessent d'être dénoncés à maintes reprises, au vu et au su de la communauté internationale. Mais personne ne bouge. «Même après avoir retrouvé ma liberté, je continue d'être harcelée de la part des forces de l'occupant marocain. La dernière en date remonte au 13 janvier dernier, où j'ai été harcelée et encerclée par les services secrets marocains dans la ville occupée de Smara», a-t-elle encore témoigné. «Malgré tout cela», a-t-elle poursuivi, «le combat continue». En plus d'être militante, la femme sahraouie est ministre, wali, députée, soldat dans les rangs de l'Armée populaire de libération, médecin, enseignante, représentante diplomatique. «Grâce au quota des genres, la direction actuelle du Front Polisario compte six femmes, dont l'une occupe ce poste pour la première fois. Le gouvernement saharaoui compte trois ministères dirigés par des femmes: l'Intérieur, les Affaires sociales et la Promotion de la femme, et la Coopération. Trois des cinq camps de réfugiés sont commandés par des femmes», souligne l'ambassadeur de la République arabe sahraouie démocratique (Rasd) au Kenya, Limam Mohamed Ali, dans sa contribution au sujet de la représentation politique des femmes sahraouies, parvenue à notre rédaction. Le diplomate tient à préciser, par ailleurs, que «de plus, il va sans dire que grâce au quota des genres, la direction actuelle du Front Polisario compte six femmes, dont l'une occupe ce poste pour la première fois. «Suite à l'amendement de la loi électorale saharaouie, dans le but d'assurer une plus grande autonomie des femmes, les élections du Conseil national saharaoui (CNS), qui est composé de 53 députés, sont obligées d'appliquer le quota des genres. Dans les wilayas (les camps des réfugiés, Ndlr) qui comptent le plus grand nombre de dairas (communes), comme Smara et Dakhla, qui ont chacune sept sièges, l'amendement de la loi électorale exige que quatre des sept sièges soient occupés par des femmes. Une année politiquement féminine Dans les wilayas d'Aousserd, qui compte six sièges, trois des six sièges doivent être occupés par des femmes», a souligné le diplomate, dans sa contribution». «Nous ne nous lasserons jamais de répéter que, sans elles, il nous aurait été impossible d'en arriver là», a conclu l'ambassadeur de la Rasd. Les «Sahraouiyates» ont leur mot à dire dans les rendez-vous électoraux. «La femme sahraouie est une femme instruite et nous veillons à participer massivement aux différents scrutins. Nous avons, aujourd'hui, un nouveau Parlement et cela est un grand pas vers notre indépendance que nous allons arracher par la voie diplomatique», comme souligné par une institutrice rencontrée en marge de la Conférence internationale de solidarité avec le peuple sahraoui, organisée dans l'après-midi. Un front de trois groupes parlementaires d'amitié avec le peuple sahraoui a été mis en place ce jour-là. Les travaux de ce rendez-vous se sont soldés par l'installation de trois groupes parlementaires de solidarité avec le peuple sahraoui: Algérie-Rasd, Venezuela-Rasd et Cuba-Rasd. Prenant la parole à cette occasion, le ministre des Affaires étrangères sahraoui, Mohamed Sidati, a indiqué que «cette démarche intervient dans le cadre du récent renouvellement des structures, opéré par le gouvernement sahraoui, dont notamment l'installation d'un nouveau Parlement». «L'objectif premier de cette démarche est de poursuivre le travail commun entre les Parlements des pays amis et le Sahara occidental, en vue de promouvoir la diplomatie parlementaire et la solidarité entre les peuples», a souligné le chef de la diplomatie sahraouie.