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Ichemoul ou la première étincelle
Mustapha Ben Boulaïd y avait réuni son état-major la veille
Publié dans Liberté le 01 - 11 - 2008

En cette dernière semaine du mois d'octobre 2008, comme ce fut il y a 54 ans, le ciel des Aurès est enveloppé d'une brume dense. Depuis deux jours, des averses successives rendent à la limite du praticable les sinueuses routes qui mènent vers l'ex-commune mixte d'Ichemoul, située entre Batna et Biskra. Il est 9 heures du matin quand nous arrivons, depuis Batna, via Arris, au village de Hadjaj, l'une des trois dechras formant l'historique localité d'Ichemoul.
Dès qu'on quitte Arris, on commence à entretenir une nouvelle relation avec l'espace temps. Une étrange sensation s'installe : celle d'être à la fois un homme libre dans ces espaces qui s'étirent à l'infini et de n'être qu'un sujet faible remettant son destin aux majestueux monts d'Ichemoul et du Chelia. Malgré leur austérité, ces montagnes dégagent une certaine chaleur qui pousse à tomber amoureux de ce paysage.
À la vue de notre guide qui s'approchait du véhicule, nous éteignons la radio au moment où la voix de la jeune présentatrice rappelait que depuis le mois de Ramadhan dernier (septembre), la route a tué plus que tous les crimes, y compris ceux perpétrés par les terroristes. En plus du guide, fils de chahid, cette information s'avéra être une autre passerelle pour s'engouffrer dans la conjoncture d'il y a 54 ans. Il y a près d'un demi-siècle, en cette dernière semaine du mois d'octobre, la France, dont dépendaient ces territoires, était une nation en paix.
Fini la guerre d'Indochine ! Finie, aussi, la tension qui régnait en Afrique du Nord, comme l'annonçait en juillet Pierre Mendès France depuis Carthage, du moment que “la voie menant vers l'autonomie du Maroc et de la Tunisie est toute tracée”. C'est pourquoi, pour la presse française de l'époque, seuls les accidents de la route, avec 34 morts durant le dernier week-end d'octobre 1954, tourmentaient les politiques de l'Hexagone.
L'OS et les caches d'armes
Il y a 61 ans, le 15 février 1947, l'OS est créée. À Batna, ils étaient 21 militants affiliés à cette organisation paramilitaire. À partir du 1er novembre, 13 d'entre eux tomberont au champ d'honneur. Répartis en cinq cellules, ils s'attelleront avec leur chef Mustapha Ben Boulaïd, dès 1948, à réunir les conditions logistiques du passage à l'action armée.
Cette dernière ne pouvait se faire sans des armes à se procurer et à mettre à l'abri jusqu'au jour “J”. Justement, c'est ici à Hadjaj, sur la route de Tkout, que Mustapha Ben Boulaïd et ses hommes de l'OS préparèrent une cache d'armes dans la maison des Baâzi, dans celle des Azoui et, enfin, celle des Bechah. Selon notre guide Saïd Benaâkcha, la deuxième cache, une petite, a été aménagée à Arris au niveau de la mosquée d'Iverkeb. Enfin, la troisième, probablement la plus importante, a été aménagée à Ouled Moussa. Après 7 kilomètres de route, nous atteignons la dechra en question. L'entrée du vieux village, une sorte de grand portail en pierre, se trouve à notre gauche. La cache en question, elle, se trouve à notre droite, en contrebas de la route, au milieu des champs de l'autre côté de la rive de l'oued Labiod. Il s'agit d'une demeure d'un seul niveau, isolée du reste des habitations. C'est une autre propriété de la famille des Baâzi. Les armes provenaient, surtout, des lots laissés par les belligérants, à l'issue de la Seconde Guerre mondiale, dans le désert libyen. On y trouve le Stati italien, le Rafale anglais et le Moser allemand. Ce dernier appelé “khemassi”, par référence à ses 5 coups, était le préféré des moudjahidine. Ainsi, en cette dernière semaine du mois d'octobre 1954, les caches d'armes d'Ichemoul contenaient 950 pièces stockées sur 3 périodes. Une première livraison de 320 pièces a eu lieu durant l'hiver de 1948. Une seconde de 280 pièces et une troisième de 350 pièces ont eu lieu durant le printemps de la même année. L'acheminement des armes à partir de cette date est devenu parcimonieux, notamment après le démantèlement de l'OS en 1950. Même les tentatives d'alimenter ces caches depuis le stock des militants de l'OS de l'ex-Philippeville (Skikda) seront avortées avec le démantèlement du groupe de Saïd Khene. Ce dernier, avec Mohamed Kezzar, Mohamed Benarfi, Mohamed Bouassla, Mustapha Harket et d'autres militants, seront arrêtés avec un chargement au col des Oliviers, entre Skikda et Constantine. Ainsi, les monts d'Ichemoul et du Chélia seront les témoins silencieux d'un long processus de préparation de la révolte qui va venir. Un travail qui durera de l'hiver 1948 à l'été 1954 soit… 7 ans et demi. Autant d'années que nécessitera la guerre de Libération.
Le compte à rebours commence
En cette fin d'octobre 1954, Mustapha Ben BoulaId, membre des 6 chefs de l'intérieur de la Révolution, est rentré d'Alger avec dans ses bagages l'ordre de déclencher la révolution le 1er novembre à zéro heure dans la région des Aurès, celle-là mieux préparée et mieux dotée en hommes et en armes pour des raisons historiques et géographiques. Une fois dans sa région, il réunira son état-major pour le mettre au courant de la décision historique.
La rencontre a eu lieu dans la vieille Medina, une autre dechra d'Ichemoul, au bout d'une dizaine de kilomètres depuis dechra Ouled Moussa où se trouve la maison qui a abrité ce conclave. La demeure de Ali Berghou est toujours dans le même état qu'il y a 54 ans. Pis, elle menace ruine. C'est ici que, pour la première fois, Adjel Ladjoul, Chihani Bachir, Mostefa Boucetta, Meddour Azoui et Abbès Laghrour seront mis au parfum de l'historique décision prise par les 22 à Alger. C'est ici qu'il sera décidé de regrouper les moudjahidine quelques jours après, soit le 29 octobre. C'est ici que Ben Boulaïd et ses 5 lieutenants arrêteront les lieux de regroupement. Ils choisiront deux sites pour l'engagement de leurs propriétaires, leur aménagement adéquat et leur implantation stratégique.
Le premier est la maison de Boulekouas située à Tibakaouine. A partir du 29 octobre, elle accueillera 80 moudjahid dirigés par Tahar Nouichi. Plus proche à vol d'oiseau de Batna, elle sera le lieu de départ de plusieurs sections vers cette ville et vers Oum Tboul, à bord du camion de Boukhlouf pour mener les actions de la nuit du 31 au 1er novembre. La seconde maison, plus importante, est celle de la famille des Benchaïba, située plus au sud, soit à mi-chemin entre la Medina et Arris, au cœur de la dechra de Ouled Moussa. Retour dans la dechra avec notre guide. Sur le site, une stèle commémorative est érigée et un musée, bien entretenu, est ouvert. La vaste propriété des Benchaïba est devenue une annexe du musée. C'est ici que quatre jours avant le jour “J,” 350 moudjahidine ont été regroupés. Avec son approche pédagogique, Saïd nous explique que, pour des raisons de sécurité, chaque groupe affilié à une dechra était pris en charge dans une pièce de la demeure. Une organisation pyramidale ne permettant aucun contact entre les membres des groupes dont Adjal Laâdjoul assurait le commandement. Mustapha Ben Boulaïd, lui, a installé ses quartiers dans un pavillon de la grande demeure, situé du côté nord. Depuis une fenêtre, il avait une vue sur Arris et depuis une autre, il contrôlait les accès depuis le mont d'Ichemoul. Parmi les personnes réunies, donc enrôlées, et qu'encadraient des anciens du PPA et de l'OS, figuraient des bandits d'honneur qui étaient retranchés dans les Aurès depuis des années. On évoque Belkacem Grine, Aïssa El-Mekki, Ben Salem, Messaoud Zelmati et leur chef Hocine Berhayel. Si au départ, ces derniers cherchaient à en découdre avec les ex-éléments de l'OS pour plusieurs raisons, ils finiront, sous l'effet du charismatique Ben Boulaïd par rallier la cause nationale.
Tighanime entre dans l'histoire
La nuit du 1er novembre, dans la pénombre de la nuit hivernale d'un Aurès froid, des hommes vêtus de leur kachabia et armés de leur amour pour une Algérie mèneront pour la première fois des actions armées. Entre minuit et 3 heures du matin, plusieurs attaques ont été menées par les sections du groupe de Tibakaouine. À Batna, en plus des actions de sabotage, la caserne est attaquée. Deux sentinelles sont tuées, alors que le colonel Blanche échappa à une autre attaque ayant ciblé sa voiture. À Arris, des sections du groupe de Ouled Moussa encercleront jusqu'à une heure tardive de la journée la ville ; même chose à Tkout. À Ichemoul, des ponts et la mine sont dynamités. Mais l'événement qui fut, plus tard, le plus médiatisé pour une raison ou une autre est l'attaque de Tighaninime. Après Arris, il faut faire près de 20 km pour atteindre Tifelfel, le chef-lieu de la localité de Gharissa, le site choisi par le commando de Chihani pour mener sa mission du jour. La cible était un bus de voyageurs venant de Tkout via Tifelfel pour atteindre Arris.
À la sortie d'un tunnel, un emplacement idéal pour des actions de guérilla, s'annonce un tronçon de près de 100 mètres avec deux grands virages en amont et en aval, rendant la visibilité nulle pour d'éventuels secours. Une stèle est là pour commémorer l'événement auquel on assimile le déclenchement de la guerre de Libération. Ce matin du 1er novembre 1954, à 9 heures, le bus en question arriva sur les lieux quand il est arrêté par les moudjahidine embusqués depuis la veille. Des hommes montent dans le bus où, en plus des Arabes, des civils français avaient pris place dans le but d'expliquer la déclaration du 1er Novembre.
Ce jour- là, le caïd de M'chounèche, un village situé entre les balcons du Roufi et Biskra, Hadj Saddek était du voyage. Aux explications des moudjahidine, il répondit par l'arrogance d'un pro-Français qui ne pouvait imaginer son avenir que lié à la présence coloniale. Quand il porta sa main au niveau de sa ceinture pour utiliser son revolver, une rafale retentit. Les balles touchèrent un instituteur, Guy Monnerot et sa compagne qui prenaient place à côté du caïd. Si cette dernière sera blessée, son époux décédera sur le coup. L'affaire des deux victimes civiles européennes, que sont le couple d'instituteurs, a bouleversé Mustapha Ben Boulaïd, selon ses compagnons de l'époque. Il exprima son mécontentement aux membres du commando et mena son enquête. Seules les conclusions de cette dernière accréditant la thèse de l'incident involontaire épargna aux membres de la section les mesures disciplinaires de rigueur. Selon les mêmes témoins, si l'élimination du caïd était considérée par Ben Boulaïd comme un acte de guerre évident, celle de l'instituteur était une fâcheuse bavure…
M. K.


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