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Entretien avec ahmed youssef à l'origine de la colonisation de l'algérie
L'historien jean lacouture dans un livre
Publié dans Liberté le 02 - 12 - 2009

La relation très étroite qui s'est tissée entre les commerçants marseillais, qui voulaient des comptoirs en Algérie, et les militaires qui se sont aperçus de l'importance de la "proie" constitue l'une des raisons de la longue nuit coloniale du peuple algérien. Jean Lacouture revient sur les raisons de la colonisation. Lecture du chapitre
Algérie, y a-t-il un spectre de Bonaparte ?
Jean Lacouture revisite le Moyen-Orient et le Maghreb. Dans un livre entretien qu'il a accordé à l'écrivain journaliste égyptien Ahmed Youssef, ce spécialiste du monde arabe, qui a été l'attaché de presse du général Leclerc en Indochine, revient dans Nos Orients, le rêve et les conflits, un livre paru aux éditions du Rocher en France, sur l'origine de la colonisation de l'Algérie qu'il considère être une erreur historique de la France de "l'imbécile orgueilleux Charles X".
Pour Jean Lacouture, "l'affaire de l'Algérie en 1830 est une sorte de revanche de la catastrophe impériale de Waterloo. La monarchie de la Restauration se lance dans l'affaire algérienne. La France est animée d'un génie impérial. L'Algérie, ce n'est pas loin. C'est quand même beaucoup moins loin que l'Egypte où s'aventurait Bonaparte. Il fallait un prétexte et on l'a trouvé : à Alger il y a les barbaresques… en France la monarchie avait besoin de redorer son blason. La prise d'Alger fut expéditive, mais la conquête a demandé 18 ans”.
L'Algérie, la proie et la compensation des pertes françaises
En faisant une comparaison avec l'expédition civilisationnelle de Bonaparte en Egypte et la conquête du Maroc ou de la Tunisie plus tard, Jean Lacouture explique pourquoi la colonisation algérienne a été des plus cruelles.
“Une grande partie de l'armée française s'y est impliquée, l'armée conduite par Bugeaud, ancien soldat de l'empire exercé à la guerre coloniale en Espagne… les soldats envoyés en Algérie étaient des paysans français qui formèrent des bases de colonisations dans ce pays.”
Et d'ajouter que “cette origine a donné un caractère plus brutal à cette colonisation : nos droits, nos pères les ont conquis ! d'où l'enracinement de la société française rurale en Algérie. Et l'implication non seulement coloniale mais aussi vitale de la France en Algérie”.
En Egypte, “celle de 1799, il n'y a pas eu vraiment de résistance nationale durable, alors qu'en Algérie, moins riche culturellement, se dresse un héros national, l'émir Abdelkader”.
En Egypte, “la France va se grandir en buvant le lait de la science”, en Algérie, “c'est de la prédation, un vol”. L'histoire ne devait pas être aussi cruelle et l'expédition de Bonaparte devait servir de référence aux hommes qui ont entrepris la conquête de l'Algérie. Oh, que non ! Jean Lacouture soutient que le contexte politique en France favorisait un courant colonialiste.
“Ce qui avait été réussi ou manqué par Napoléon ne devait pas compter pour les souverains bourbons et nous sommes sous Charles X dans l'extrême bourbonnisme si l'on peut dire. Pour Charles X, le second roi de la Restauration, Napoléon était un sinistre accident de l'histoire… ”.
Et de poursuivre : “Quand les ministres de Charles X décident de s'emparer d'Alger en prenant pour prétexte le fameux coup d'éventail donné par le Dey d'Alger au consul de France, on ne se demande pas s'il faudra vaincre une résistance.
Ce qui importe, c'est de hisser le drapeau blanc des Bourbons assez haut pour faire oublier le drapeau tricolore de Napoléon qui est allé jusqu'à Moscou.
Il y a d'autre part les commerçants marseillais qui veut non seulement se débarrasser des pirates de la Méditerranée, mais surtout installer de l'autre côté de la mer des comptoirs bien assurés avec qui ils pourront faire du commerce.
Bône, Alger, Oran, Tunis étaient des lieux où ils rêvaient de s'installer en toute sécurité protégés par des canons. Il y a eu cette cruelle histoire — mélange de gloire des Bourbons et de commerce marseillais”.
Napoléon avait préparé le coup 20 ans plus tôt
“Napoléon empereur a pensé à une expédition en Algérie. Il y avait expédié un officier pour reconnaître le terrain, un port où l'on pourrait débarquer. Cet officier a désigné un lieu idéal pour le débarquement, pas très loin d'Alger, Sidi Ferruch. C'est là 20 ans plus tard, en juillet 1830, qu'a débarqué la flotte des Bourbons. Une flotte de 400 vaisseaux. Le Dey d'Alger capitule en 4 jours de combats.”
Mais à ce moment-là, deux écoles se disputent : conquérir les comptoirs ou aller au-delà ? Après des hésitations de conquérir l'ensemble du territoire algérien que les colons considéraient déjà comme de “bonnes terres à mettre en valeur”, la conquête générale est décidée. “Les deux beys, celui d'Alger et celui d'Oran, ont capitulé tout de suite, mais celui de Constantine a tenu, et à l'Ouest, au bout de quelques mois, l'émir Abdelkader qui appartient à la grande famille des chorfa s'est levée à Mascara”, rappelle l'écrivain en affirmant qu'à cette étape, le débat gagne Paris entre les partisans des comptoirs qui estimaient avoir atteint leurs objectifs et les militaires qui considéraient qu'il fallait aller encore loin. La guerre va durer 18 ans en Kabylie et dans le Constantinois.
À l'Ouest, l'émir Abdelkader fait face durant trois ans à Bugeaud qui, impressionné par une telle résistance, signe avec lui le traité de la Tafna. Mais Paris désavoue Bugeaud jugeant avoir fait trop de cadeaux à l'émir, et la guerre reprend.
Un Etat a existé en Algérie comme en Europe
Ainsi, Jean Lacouture désavoue ceux qui prétendaient qu'il n'existait pas d'Etat en Algérie avant la colonisation française. “L'extraordinaire, c'est que pendant 18 ans, la France qui avait reconstitué son armée, probablement la meilleure d'Europe, n'a pas pu venir à bout de cette Algérie en morceaux. Des années encore après la capture de l'émir Abdelkader, le peuple algérien a tenu jusqu'en 1848”, dit-il avant de s'interroger : “Pourquoi, l'Algérie n'existait pas vraiment, c'était un protectorat turc, il y avait une sorte d'Etat et Abdelkader en avait reconstitué un autre ? Ce sont surtout les musulmans qui ont refusé les chrétiens. Peut-on soutenir, comme l'ont fait la plupart des historiens français, que l'Etat algérien n'existait pas à la différence des Etats marocain et tunisien ? Non. Quels pays étaient vraiment indépendants à cette époque ? Quatre ou cinq en Europe.
L'Italie était pratiquement dominée par l'Autriche. L'Espagne était théoriquement indépendante, mais elle avait une défense très faible. Toute l'Europe centrale était regroupée dans l'empire austro-hongrois. L'Algérie était alors à peu près aussi indépendante que la Hongrie, gouvernée de l'extérieur à partir de Vienne.”
L'Algérie, le royaume arabe et l'émir Abdelkader
Après la domination totale de 1848, Paris, sous l'égide de Louis Napoléon, lance l'idée d'un royaume arabe à Alger, mais rattaché à la France. C'est Ismaïl Urbain qui avait fui le régime turc qui soumet le projet qui reçoit l'aval de Louis Napoléon. L'empereur visite l'Algérie.
Mais les militaires sabotent le projet. “Une grande occasion historique a été gâchée, l'émir Abdelkader avait une stature internationale ; poète, grand intellectuel, homme de religion, il avait tout pour être le souverain d'Algérie, l'émir Abdelkader à la tête d'une Algérie modernisée en liaison avec l'Italie de Risorgimento, l'Egypte du canal ! Tant d'occasions manquées.”
“La cruauté de l'opération dépasse le commentaire. Visitant l'Algérie des écrivains tels que Flaubert ou Maupassant sont épouvantés. L'Algérie s'inscrit dans la conscience des Français et progressivement un lien organique se crée entre le nord et le sud de la Méditerranée que la défaite de 1870 ne fait que conforter : la conquête de l'Algérie sert de compensation à la perte de l'Alsace et de la Lorraine et on envoie des Alsaciens-Lorrains fidèles de la France en Algérie.Ils avaient quitté leur province pour échapper à l'occupation allemande, le pouvoir français leur a offert une terre en Algérie”, poursuit l'historien.
Le système colonial se met en place avec le code de l'indigénat. L'Algérie est considérée comme les départements français, mais les neuf dixièmes des habitants ne sont pas des citoyens et n'ont pas le droit de vote. “Les musulmans algériens sont mobilisables comme ce fut le cas lors de la guerre 1914-1918, mais ne sont pas des électeurs jusqu'en 1947.”
Même si Jean Lacouture considère que le système colonial français n'a rien à avoir avec l'apartheid, il admet qu'il y a eu du racisme.
“Les Algériens sont déclarés mobilisables à partir de 20 ans, mais pas citoyens et n'ont pas droit de vote”, précise Lacouture qui relève cependant un fait paradoxal que pendant les deux guerres mondiales, où la France a été en si grand péril, les Algériens n'ont pas fait de soulèvement. “En 1914-1918 et même en 1940-1945, la métropole étant occupée, l'Algérie se montre fidèle à un Etat vaincu qui la maltraite. C'est bouleversant !” écrit l'historien.
Pire, il y a eu les massacres du 8 mai 1945. “Cette histoire terrible a fait basculer beaucoup de jeunes Algériens dans la lutte armée… le 8 mai 1945, jour de la libération de la France, c'est alors qu'a commencé la guerre d'Algérie” qui mènera à l'indépendance du pays le 5 juillet 1962.
Pas de repentance, mais de l'amitié et de la coopération
Quant à l'écriture de l'histoire, Jean Lacouture affirme ne pas être favorable à la repentance qu'il qualifie de concept religieux. “Avec un demi-siècle de retard, obliger Chirac ou Sarkozy — lequel était un enfant à l'époque — à demander pardon ? Où s'arrêter ? Nous n'avons pas demandé à Adenauer de s'excuser pour Hitler. Les Indiens ne l'ont pas demandé à Churchill pour les massacres perpétrés dans leur pays.
L'Algérie a reçu en visite officielle presque tous les chefs d'Etat français depuis le général De Gaulle. Ils ont été reçus en ami”, avant de conclure : “Nous devons aux Algériens la vérité et la fraternité, la coopération. Et l'amitié. Voilà… ”
Le livre traite également du protectorat français en Tunisie et au Maroc, de l'Orient, de l'Indochine, des pays du Golfe, du brasier libanais et de l'Orient arabe après le 11 Septembre. À lire absolument.


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