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ET MAINTENANT DEFENDEZ-VOUS !
Abdelmoumène Khalifa a parlé
Publié dans Liberté le 11 - 11 - 2003

1 milliard de dollars ont disparu des caisses depuis l'installation du liquidateur de El-Khalifa Bank. Où est passé cet argent, sachant que la plupart des épargnants n'ont pas été remboursés ?
Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Ouyahia et Abdelatif Benachenhou sont formellement accusés d'avoir taillé en pièces le groupe Khalifa.
La présidence, le Premier ministère et les Finances visés par les attaques de Abdelmoumène Khalifa, affirment “ne pas vouloir répondre aux insultes”.
Rafik Khalifa accuse le président et son entourage
Accusés, défendez-vous !
Mis au défi par le Chef du gouvernement de parler, le milliardaire algérien réfugié à Londres a fini par rompre le silence. Même s'il ne donne pas de détails, il accuse le pouvoir d'avoir commandité la liquidation de son groupe.
D'emblée, il s'attaque au président de la République en l'accusant de “mettre en péril l'avenir de la nation”. “J'estime que la présidence de la République est entre de très mauvaises mains. Cet homme a créé un Etat de non-droit en cinq ans”, dit Khalifa à l'adresse de Abdelaziz Bouteflika, avant d'ajouter plus loin à son sujet : “C'est le plus grand imposteur qu'ait connu l'Algérie.” Pour Abdelmoumène Khalifa, le clan du chef de l'Etat est derrière la liquidation de son entreprise. Quant à la renommée internationale de Bouteflika, l'ex-patron de Khalifa Airways déclare qu'il ne fait que créer l'illusion, parce qu'à titre d'exemple, dit-il, “Bouteflika n'a jamais été reçu officiellement aux Etats-Unis. C'est une duperie”. Dans sa lancée, il ne ménage guère le Chef du gouvernement. Ouyahia est, selon lui, “synonyme de la fin du système parce qu'on ne nomme pas à la tête d'un gouvernement un homme comme Ouyahia qui, il y a quelques années, recevait ses ordres de la chanteuse Fella Ababsa”.
Khalifa estime que le Chef du gouvernement a “de graves problèmes psychologiques”. Il lui reproche de ne pas maîtriser les chiffres relatifs au manque à gagner de l'Etat suite à l'affaire d'El-Khalifa Bank. En témoigne la différence entre ce qu'il avance et ce que déclare son ministre des Finances. Ce dernier est carrément désigné comme “l'homme le plus nul et le plus incompétent” qu'il n'a jamais rencontré. L'argentier du pays est, à en croire Abdelmoumène Khalifa, l'auteur de l'aveu que c'est le président de la République “qui a ordonné le blocage du commerce extérieur et la liquidation d'El Khalifa Bank”. Ainsi, celui que l'on croyait mort et enterré est sorti de son silence, en accablant le clan présidentiel et le pouvoir en général.
Maintenant, c'est aux personnes incriminées de se défendre. Après avoir demandé à Rafik Abdelmoumène Khalifa de parler, c'est à leur tour d'éclairer la lanterne des Algériens sur tout ce qui tient en haleine toute l'Algérie. Qui a tort ? Qui a raison ? Les Algériens sont en droit de savoir qui les a dupés. Khalifa a-t-il réellement blanchi de l'argent et grevé le Trésor public avec la chute fracassante de son empire financier ? Ou a-t-il tout simplement été victime d'une machination à grande échelle parce qu'il a refusé, comme il l'affirme, de soutenir Abdelaziz Bouteflika pour un second mandat à El-Mouradia.
C'est là toute la question ! Le chef de l'Etat, son Chef du gouvernement et le ministre des Finances ont le devoir moral de dire la vérité aux Algériens sur l'affaire Khalifa, qui ne cesse de défrayer la chronique.
K. A.
Présidence, chefferie du gouvernement, ministère des finances
“On ne répond pas aux insultes”
Dans son entretien accordé, hier, au Soir d'Algérie, Abdelmoumène Khalifa n'est pas allé de main morte avec Bouteflika, président de la République, Ahmed Ouyahia, Chef du gouvernement, et Benachenhou, ministre des Finances. Contactée par nos soins pour d'éventuelles réactions, à ce propos, la présidence s'est contentée de dire : “C'est sans commentaire”. La chefferie du gouvernement a adopté la même attitude. Le responsable de la communication auprès du Premier ministère nous a simplement déclaré : “C'est le Chef du gouvernement lui-même qui a défié Abdelmoumène Khalifa de parler, mais il n'a rien dit. Il s'est contenté d'insultes et on ne répond pas aux insultes.” Au département de Benachenhou, on n'a pas failli à ce qui s'apparente à une règle générale à adopter. “Pas de commentaire”, nous dit l'un des conseillers du ministre en ajoutant, toutefois, que, pour ce département, “la banque El Khalifa est liquidée et n'a plus d'existence”. Lors de la conférence de presse donnée récemment, le ministre s'est longuement prononcé sur le cas Khalifa pour dire tous les problèmes que cette banque a causés à l'Algérie. Et d'ajouter : “Cela a permis de découvrir les faiblesses des banques”, avant d'inviter Abdelmoumène Khalifa à “parler aussi s'il a quelque chose à dire”, a-t-il déclaré. “Tout ce qui a été publié n'est que de l'invective et nous n'avons pas à répondre aux insultes”, a-t-il ajouté.
Pour notre interlocuteur, le ministre qui représente une institution de l'état qui mène la politique économique pourrait, à la limite, se réserver le droit de répondre à des gens qui pourraient être en porte-à-faux avec certains choix ou idées économiques mais en aucun cas à des gens qui versent dans l'insulte.
Nabila Saïdoun
Ils ont dit de lui…
Ahmed Ouyahia, Chef du gouvernement : “La faillite d'El Khalifa Banque s'élève à 100 milliards de DA partis en fumée. (…) Lorsqu'il a fallu ponctionner les travailleurs, je l'ai fait. Lorsqu'il a fallu dissoudre des entreprises, je l'ai fait aussi. Ça ne sera jamais Ouyahia qui racontera des histoires ! Ceux qui ont choisi Khalifa l'ont fait en toute liberté. Ce sont les règles du marché.”
(Déclaration faite le 3 juin 2003, à la présentation de son programme, devant l'APN)
Et, dans une conférence de presse qu'il a donnée le 13 octobre 2003 à Djenane El-Mithaq, il a eu ces propos : “L'affaire Khalifa est une catastrophe financière. C'est l'escroquerie du siècle en Algérie ! On dit que j'ai eu 500 millions de centimes de Khalifa. J'attends toujours les documents qui le prouvent. Jusqu'à preuve du contraire, Abdelmoumène Khalifa est en faillite. Il y a un mandat d'arrêt international contre lui et donc il n'a rien à perdre s'il décide de parler. Qu'il le fasse ! Or, il n'a rien dit. En attendant, cette fumisterie se développe. Il est sûr que le plus gros perdant dans cette affaire, c'est l'Etat.”
Abdellatif Benachenhou, ministre des Finances : “L'affaire Khalifa est la meilleure leçon que le gouvernement algérien et la République algérienne aient reçue ! Tout le gouvernement considère de ce point de vue que nous avons reçu une bonne leçon ! (…) Abdelmoumène Khalifa, actuellement libre à Londres, sous la protection de la reine, n'a qu'à prendre le micro et dénoncer. Parce qu'il est le seul à connaître les tenants et les aboutissants. Qu'il parle ! Qu'il donne des noms !” (Conférence de presse du 20 octobre 2003 au siège de son ministère).
Dans un entretien au Soir d'Algérie
L'homme d'affaires clame son innocence
Il accuse les autorités algériennes, le “clan présidentiel” notamment, d'avoir brisé son élan et son empire.
Mais refuse d'évoquer sa situation actuelle vis-à-vis de la loi. Résumé.
Précision d'abord : Abdelmoumène Khalifa a “attendu que des évolutions se produisent pour parler et dire” ce qu'il a “vécu”. “Aujourd'hui, il y a des enjeux qui” lui “paraissent essentiels pour l'avenir du pays…” Evidemment, dans l'entretien accordé au Soir d'Algérie, il est question du passé. Du passé récent du groupe Khalifa. “Nous avons commencé à être mis sous pression à partir de juin 2002”, dit Abdelmoumène. “L'opération de démantèlement” a, selon lui, commencé par “une campagne médiatique en France”, orchestrée “à l'instigation du clan présidentiel”.
De ce cercle, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, est le plus cité. Il est traité de “plus grand imposteur qu'ait connu l'Algérie”. “J'ai été, accuse l'homme d'affaires, victime de la convoitise de ceux qui dirigent le pays”, épinglant le Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia (“qui, il y a quelques années, recevait ses ordres de la chanteuse Fella Ababsa”), et le ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou (“le plus incompétent et le plus nul que j'ai jamais rencontré”).
Après le 27 novembre 2002 (date du blocage, par la Banque d'Algérie, des opérations du commerce extérieur d'El Khalifa Bank, le poumon du groupe), Khalifa perdait “environ 100 millions de dollars par mois”. “On a, accuse Abdelmoumène, également essayé de nous mettre sous le coup d'infraction au contrôle de changes, sous le fallacieux prétexte que l'assurance que nous avions payée pour nos avions à une compagnie d'assurances étrangère aurait dû transiter par une compagnie d'assurances algérienne. À partir de là, les choses ont dégénéré au point qu'une opération visant mon arrestation a été mise en place”. Il précise que cette “tentative” a été filmée par des responsables d'El Khalifa Bank, la “cassette sera rendue publique prochainement”. La décision du 27 novembre 2002 a été prise, rappelle-t-il, “après l'opération d'acquisition (par El Khalifa Bank) des 29% de Société Générale Algérie”. Plus loin, dans l'entretien, et sur un autre registre, il refusera d'évoquer son statut actuel en Angleterre, où il réside désormais : “Permettez-moi de ne pas m'exprimer sur cette question.” La police algérienne a lancé contre lui un mandat d'arrêt international, suite à sa condamnation par la justice pour “infraction à la réglementation des changes”. “Les autorités, charge-t-il, ont tenté de m'attribuer des documents que je n'ai jamais signés pour justifier mon arrestation. À cette époque, je n'étais déjà plus en Algérie, ce qui m'a sauvé d'une détention dont on peut parfaitement mesurer les conséquences…”
Accusé de blanchiment d'argent, Abdelmoumène se défend : “Il est impossible de blanchir de l'argent tout seul. Pour cela, il m'aurait fallu un réseau, une organisation, la complicité d'une multitude de personnes. (…) Lorsqu'ils (les gouvernants, ndlr) se sont rendu compte de leur bévue, ils ont cru bon de rajouter une accusation de fraude.” Selon ses affirmations, l'administrateur de sa filiale bancaire a vidé les comptes.
Ce qui l'a amené à demander un audit international pour surveiller les opérations effectuées par l'administrateur provisoire. Il évalue le montant de l'argent retiré de cette banque à un milliard de dollars.
Le patron d'El Khalifa, qui réfute le sobriquet d'“enfant gâté du système”, évoque avec gloire le fait d'avoir cassé “le mode sélectif de fonctionnement” dans le domaine des banques. “Je ne m'identifie aucunement à ces privés endettés de plusieurs milliards de dinars auprès des banques publiques”, rejette-t-il. De la même manière, il cite le nombre de voyageurs (“trois millions par an”) transportés à bord des appareils de Khalifa Airways et celui (“un 1,5 million”) des clients d'El Khalifa Bank.
Abdelmoumène Khalifa, même s'il ne se fait guère d'illusion, ne veut pas abdiquer. Les avocats du groupe “travaillent très sérieusement à démonter toute la machine judiciaire qui a été mise en branle contre” lui. Aussi, compte-il relancer prochainement la chaîne de télévision K. News, devant émettre à partir de Londres. La licence de dix années qu'il a pu obtenir l'a conduit à “installer une équipe algéro-anglaise à la tête de K. News” pour travailler “avec de véritables journalistes…”
Lyès Bendaoud
Les déposants de la banque déçus par AbdelMoumène Khalifa
“Il nous laisse tomber pour la deuxième fois”
Les propos de Abdelmoumène Khalifa, publiés hier, par le quotidien Le Soir d'Algérie, ont fortement déçu les anciens clients de la banque El-Khalifa.
Tout le monde connaît le drame financier qui a frappé des milliers de clients d'El-Khalifa Bank. Ceux-ci, qui réclament leur argent depuis la nomination d'un administrateur puis d'un liquidateur, en la personne de M. Badsi, il y a près d'un an, n'ont pas récupéré à ce jour leurs avoirs. Ils espéraient des révélations qui pourraient leur donner plus d'atouts pour mieux défendre leurs dossiers, surtout que ces révélations étaient promises par le patron du groupe depuis son exil en Angleterre. “J'ai lu sur un journal que quand Abdelmoumène parlera, l'Algérie tremblera. Il n'a rien apporté de nouveau. Tout ce qu'il a déclaré dans cet entretien a déjà été traité par la presse algérienne”, relève le président du comité des clients de Khalifa en France.
Ce dernier était irrité mais “pas étonné” par cette sortie médiatique qu'il qualifie de ratée : “C'est la montagne qui a accouché d'une souris. Il a changé de langage comme quelqu'un qui a peur. Il a passé l'arme à gauche.” Et d'ajouter : “El-Khalifa Bank n'a jamais déposé de bilan au niveau de la Banque centrale. Ça ne se fait dans aucun pays au monde. On ne l'a pas contrôlé, mais on a fait ce qu'on voulait de sa banque. Il y a complicité, même si ce n'est pas d'une manière directe.”
C'est le même sentiment qui se dégage du côté du comité des déposants à Alger. Tous ses membres étaient, hier, présents au siège de Chéraga et étaient tous munis d'une copie de cette interview. “Abdelmoumène nous a laissé tomber pour la deuxième fois”, déclare un client sur place. Ils attendaient beaucoup de cet entretien, annoncé la veille par Le Soir d'Algérie, mais ils n'ont pas été servis. “Il n'a rien révélé. Ça ne nous intéresse pas de savoir que Ouyahia recevait des ordres de Fella Ababsa. On n'a même pas compris le message qu'il voulait véhiculer par cette interview”, déclare le président du comité d'Alger.
Le président du groupe Khalifa a déclaré dans l'entretien que sa banque disposait de plus de un milliard de dollars à la nomination. Ce qui fait dire aux déposants : “Les déclarations ne sont pas suffisantes. Nous voulons des preuves et des écrits sur lesquels nous pourrons travailler pour récupérer notre argent. Si Abdelmoumène estime que sa banque est riche, qu'il nous dise seulement où sont ses avoirs et nous prendrons le relais pour réclamer et récupérer notre dû.”
Les comités des déposants d'El-Khalifa Bank à Alger et à Paris comptent reprendre prochainement leurs actions de protestation. Il est à rappeler que les clients d'Alger s'étaient mis en grève de la faim, il y a quelques mois, avant de suspendre cette action suite à la promesse faite par le liquidateur de les régulariser. Mais, il semble que M. Badsi se soit rétracté et qu'il ne serait plus disposé à tenir ses promesses.
Mourad Belaïdi
ArrêtéS avec une valise contenant 2 millions d'euros
Un an de prison ferme contre les 3 cadres de Khalifa
Condamnés pour évasion fiscale, ils devraient sortir en mars 2004.
Epilogue pour l'affaire des cadres de Khalifa pris en flagrant délit d'évasion fiscale. Le tribunal d'El-Harrach a prononcé 4 peines d'une année de prison ferme chacune, contre les 3 cadres et le policier appréhendés, le 24 février dernier, à l'aéroport d'Alger alors qu'ils tentaient de monter à bord du jet privé de Khalifa Abdelmoumène avec une valise contenant pas moins de 2 millions d'euros. Ayant déjà purgé 8 mois de prison, les condamnés devraient être libérables en mars 2004. Devant le juge, les inculpés avaient plaidé leur responsabilité “personnelle”, au sujet de l'infraction. Lors d'un précédent procès en première instance, le tribunal correctionnel d'El-Harrach a condamné les 4 prévenus à une peine plus lourde: 3 ans de prison ferme contre chacun des mis en cause. Inculpés, quelques jours après leur arrestation, d'infraction à la législation des changes, ils se sont pourvus en appel dès le premier verdict du tribunal d'El-Harrach. Parmi les inculpés figurent Djamel Guelimi, responsable des télévisions du groupe et Sami Kassa, un très proche collaborateur du milliardaire. Les 4 condamnés devront, en outre, payer une amende équivalente à 4 millions d'euros.
Pour rappel, quelques heures après leur arrestation, un communiqué du groupe déclarait que les 3 cadres ont agi pour leur propre compte et qu'ils devaient assumer, “seuls, leurs responsabilités”. En février dernier, les responsables de Khalifa avaient évoqué “un acte isolé qui n'engage que les personnes mises en cause”, tout en précisant que “ni l'équipage ni le patron du groupe n'ont été informés du contenu des trois valises”.
Les trois responsables, le directeur général du catering Khalifa Airways, le patron de Khalifa News et de Khalifa TV, ainsi que le chef de bureau d'Espagne de la compagnie aérienne, interpellés par les douaniers de l'aéroport d'Alger, s'apprêtaient à quitter le territoire algérien à destination de la capitale française, quelques minutes avant le déclenchement de la grève générale prévue par le personnel d'Air Algérie.
R. B.
Il a symbolisé pendant trois ans le capitalisme triomphant à l'algérienne
Comme un tycoon
Du laboratoire pharmaceutique familial à l'exil doré londonien, l'homme aura fait rêver avant de donner des cauchemars à ses clients et fournisseurs.
L'homme qui décide de briser le mutisme pour laisser fuser un tir nourri sur le président de la République est celui qui était dans ses bonnes grâces, il y a encore un an. Pour l'avoir défié, le Chef du gouvernement aura été bien servi et l'on comprend fort bien l'embuscade qui a été tendue au businessman en vue de le coffrer dans le secret d'une cellule où ses comptes auraient été enterrés. Peut-être définitivement ! Ainsi, le patron de Khalifa aura échappé à une tentative d'arrestation avant de voir Interpol lancée à ses trousses par les autorités algériennes. Inutile de voir dans cette opération une analogie avec les déboires du tsar russe du pétrole. Mikhaïl Khodorkovski avait des ambitions politiques déclarées qui gênaient le maître du Kremlin. Au demeurant, Vladimir Poutine n'est pas mû par les mêmes considérations que le principal locataire d'El-Mouradia. Bouteflika se voit comme le seul phare dans la direction duquel doivent regarder tous les Algériens. Il ne peut pas admettre l'ombre d'une concurrence comme celle imposée par le golden boy qui suscitait admiration, envies et jalousies. Sans compter les questionnements liés à la fulgurante ascension de ce jeune devenu en un rien de temps le symbole du capitalisme algérien mis en place dans un contexte de violence, pourtant jugé rédhibitoire par tous les investisseurs potentiels. Abdelmoumène n'est pas un Bill Gates qui a mis sur le marché mondial une innovation lui ayant valu une fortune. En poche, pas le moindre brevet d'invention. Seulement, un diplôme de pharmacien sans doute obtenu pour prendre la pharmacie héritée du père dont le passé — un des pionniers de la Sécurité militaire — est quand même un atout, lorsqu'on sait le faire jouer. L'a-t-il su justement ? La question reste posée !
La fortune passe par Marseille
Quoi qu'il en soit, Abdelmoumène, à peine âgé de 32 ans, arrive en 1998 à Marseille avec le projet d'y bâtir une unité de fabrication de produits pharmaceutiques.
La progression est ensuite exponentielle. Il réussit à créer le premier réseau de banques privées en Algérie. Un secteur où se sont brisés les reins bien des hommes d'affaires plus rompus aux arcanes de la gestion et de la finance. Ces derniers ne seront d'ailleurs pas très nombreux à se bousculer lorsque le président Liamine Zéroual décide d'ouvrir l'espace national aérien aux compagnies privées. Zeroual voulait à la fois soulager Air Algérie, débordée par le départ des compagnies étrangères, et donner un signal fort aux investisseurs sur les intentions de l'Algérie de tourner la page de l'économie planifiée et d'ouvrir à la concurrence les secteurs les plus stratégiques. Khalifa s'engouffre alors dans un marché où de grandes compagnies étrangères, comme la Sabena belge, ont laissé des plumes. Il commence à faire parler de lui sur la scène internationale. C'est le moment où il passe une commande d'une vingtaine d'appareils auprès du constructeur Boeing. Alors que les autres nouvelles compagnies peinent à voler, Khalifa Airways s'étend. Elle accapare presque le marché domestique, à la grande joie des clients, et ouvre des dessertes que l'on ose à peine imaginer. Comme celle entre Alger et Johannesbourg. Ou encore entre Alger et Dubaï, dont on saura que la famille Bouteflika s'en est copieusement servie. Le groupe évoque un projet d'aéroport privé dans la banlieue-ouest d'Alger et étend ses affaires aux travaux publics avec le rachat d'un groupe allemand, à l'informatique, à la location de voitures, à la distribution avec l'achat avorté des galeries Bon-Marché à Alger. Pour la conduite de ses affaires, le tycoon s'affiche ostensiblement avec les dirigeants politiques.
Signe d'une immunité qui lui fait gagner des clients. Khalifa se fait entourer d'enfants de la nomenklatura, parangons de la jeunesse dorée d'Alger.
Il développe un plan de communication inédit dans le pays. Alléchée par des voyages, tous frais payés, et par de généreuses pages de publicité, la presse est éblouie. Le groupe Khalifa est le seul à faire rêver les jeunes Algériens d'un boulot alors que le marché de l'emploi est en pleine déprime. Il arrose de ses millions tant de malheureux dans des opérations de charité. Il sponsorise tant de clubs de foot abandonnés par leurs parrains étatiques. Son ascension est telle qu'elle suscite l'appétit de l'O. Marseille du sulfureux Bernard Tapie dont il devient le sponsor. Il en fait de même pour le club de rugby de Bègles-Bordeaux sans se soucier des griefs du député Vert, Noël Mammère, qui l'accuse de blanchir l'argent des généraux et demande une commission d'enquête parlementaire finalement non retenue. Il s'achète une villa à Cannes dans le sanctuaire de la jet-set internationale, s'incruste dans la constellation des vedettes comme Catherine Deneuve, Mélanie Griffith, Pamela Anderson, Naomi Campbell, Sting et Gérard Depardieu. Il participe à des exhibitions aériennes avec sa patrouille privée.
Pour faire du lobbying au profit de Bouteflika, il invite à Cannes la nièce du président des Etats-Unis. Et pour ne pas déroger à la conduite des hommes d'affaires les plus modernes, il se lance dans la télévision avec la création d'une chaîne d'informations à Londres et d'une autre généraliste à Paris, KTV. Qu'importe le prix. Il aurait loué à TF1 ses locaux de la plaine Saint-Denis cinq fois leur prix. Il conclut un contrat, qualifié d'exorbitant, de 3,5 millions d'euros avec une boîte chargée de la grille des programmes.
À ceux qui lui demandaient d'en faire un instrument de propagande pour le président de la République, il aurait manifesté une volonté d'indépendance.
C'est la période où sa banque est interdite de financer les opérations d'importation. En France, les médias touillent.
Mais Abdelmoumène aura beau répondre que sa banque appartient à ses clients, il n'aura pas levé le mystère sur l'origine de ses fonds.
N. B.
Un groupe tombé de haut
Chronique d'un crash annoncé
Les déboires de Abdelmoumène Rafik Khalifa avec le clan présidentiel commenceront lorsque, en septembre 2000, à l'inauguration de la Foire de la production nationale, Bouteflika tire à boulets rouges sur le groupe dirigé par le milliardaire algérien, l'accusant de pratiquer du “banditisme” en détournant les pilotes d'Air Algérie au profit de Khalifa Airways à coup de salaires faramineux. Cette sortie plutôt inattendue du chef de l'Etat ne sera pas une saute d'humeur “isolée”. En juin 2001, lors d'une visite à Batna, Bouteflika revient à la charge. Abdelmoumène avoue, lui-même, dans l'interview-fleuve accordée au Soir d'Algérie, que cette sortie du président de la République ne l'a pas laissé indifférent.
27 novembre 2002. La Banque d'Algérie décide de sévir après avoir constaté des irrégularités dans la circulation des fonds d'El-Khalifa Bank de et vers l'étranger. Il convient de noter que la banque Khalifa (agréée le 27 juillet 1998) est l'épine dorsale de ce groupe tentaculaire dont les activités, outre le transport aérien et les produits pharmaceutiques (KRG-Pharma), touchaient tout un éventail de services. Les autorités bancaires ont ainsi relevé un emballement inexpliqué des transferts liés aux opérations de commerce extérieur. Irrégularités passibles de sanctions pénales telles que prévues par l'ordonnance n°96-22 du 9 juillet 1996 relative à la répression de l'infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l'étranger.
2 mars 2003. Un communiqué de la commission bancaire, présidée par Mohamed Terbèche, alors ministre des Finances, annonce la désignation d'un administrateur provisoire à la tête de la banque, en vertu de l'article 155 de la loi sur la monnaie et le crédit.
29 mai 2003. La commission bancaire décide du retrait de l'agrément à El-Khalifa Bank, ce qui signifiait la mise à mort du groupe. Près de 2 milliards de dollars avaient été déposés dans cette banque en l'espace de trois ans. Un record ! Tout cet argent partira en fumée. Abdelmoumène, lui, parle de un milliard de dollars US qui aurait disparu durant la liquidation de la banque.
Nuit du 23 au 24 février 2003. Aéroport Houari-Boumediene. Trois hauts responsables du groupe (dont le secrétaire général du groupe et le directeur de KTV) sont pris dans un guet-apens sur le tarmac de l'aéroport. Dans leurs bagages, une mallette contenant la bagatelle de 2 millions d'euros. Même s'il nie être, de près ou de loin, mêlé à ce trafic, cela tombe dans un très mauvais moment. Abdelmoumène est éclaboussé. Ses trois collaborateurs écoperont, chacun, d'une année de prison ferme.
Autre épisode annonciateur de la chute du groupe : le craquèlement de son dispositif médiatique. En octobre 2002, la chaîne KTV, basée à Paris, cesse d'émettre sur décision du CSA. La chaîne sera autorisée de nouveau à émettre et, le 12 décembre 2002, Khalifa TV diffuse, en grande pompe, à coup de clips très à la mode, alliant un parterre de superstars. Mais pas pour longtemps. KTV et sa jumelle K. News, basée à Londres, ne feront finalement pas long feu. La qualité des programmes est loin d'être à la mesure des ambitions démesurées de Rafik Khalifa.
Scandales et pressions s'accumulent. La presse française accable et tarabuste le golden boy algérien. Successivement, Le Monde et Libération acculent Khalifa. Interrogations lancinantes sur l'origine des fonds du groupe. Même la DST s'en mêle, si bien qu'une note datée du 12 mars 2003 atterrit dans les colonnes des journaux. Une enquête préliminaire sera ainsi ouverte à Paris à la suite de plaintes déposées par les salariés de KTV, des fournisseurs du groupe et plusieurs entreprises françaises. Le député Vert, Noël Mammère, aggrave la situation en demandant la création d'une commission d'enquête parlementaire sur l'origine des fonds de Khalifa et leur utilisation en France.
Logo emblématique du groupe, l'aigle bleu se brûle les ailes. La compagnie Khalifa Airways, forte d'une flotte de plus de 30 appareils, est clouée au sol. Les clients sont stupéfaits de voir les agences rutilantes à l'aigle bleu rue Didouche-Mourad et ailleurs baisser le rideau. La compagnie se voit retirer ses appareils les uns après les autres. Ouyahia déclarera que Khalifa Airways ne possède, en réalité, que 2 ATR et 2 hélicoptères en toute propriété. La faillite de la compagnie mettra des milliers d'employés au chômage. Dernière gifle en date : Rafik Abdelmoumène Khalifa voit sa tête affichée sur le site d'Interpol comme un vulgaire criminel recherché dans le monde entier…
R. N.


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