Le système tient encore la barre avec l'ex-parti unique qui reste le premier parti d'Algérie et conforte même son avancée. Les islamistes n'ont plus le vent en poupe, ils sont réduits à leur simple expression. Tout le tintamarre du 10 mai n'aura été qu'un vaste écran de fumée. Le système a encore gagné : il prend les mêmes et recommence. La nouvelle Assemblée n'est pas très différente de la précédente. Le FLN en tête et, mieux, a conforté son avance avec 220 des 462 sièges. L'autre parti de la majorité présidentielle, le RND, reste second loin derrière sa matrice originelle. Le président Bouteflika, qui n'a jamais eu d'atomes crochus avec le patron du RND, doit boire du petit-lait. Le voilà, enfin, débarrassé de celui qui se présentait en coulisse comme le dauphin. L'Alliance verte, coalition de partis proches du mouvement des Frères musulmans, emmenée par le Mouvement de la société pour la paix, a fait flop. Dans ses rêves fous, sa locomotive a oublié que les Algériens ne sont plus naïfs pour s'ébahir devant des promesses paradisiaques. Le leurre du laser d'Abassi Madani et Ali Belhadj est consommé depuis longtemps. Depuis que les ex-“émirs” roulent carrosses. La grande leçon de ces législatives est certainement ce recul de l'islamisme politique. Le taux d'abstention est criant, les électeurs n'ont pas trouvé chaussure à leur pied même si l'offre a été quantitative. Tous les politologues ont convergé pour dire qu'en fait de multitude, il y a eu une déclinaison, un copier-coller du programme présidentiel. Belkhadem, le controversé SG du FLN, mais néanmoins gagnant, avait, lui aussi, relevé la vaste opération de copiage. Les électeurs auraient alors préféré l'original aux copies. Mais si le système s'en est bien sorti, c'est, prédisent les observateurs, pour un laps de temps. Encore une fois, les législatives n'ont été qu'un scrutin en trompe-l'œil. Un, il reste tout de même difficile de croire au taux de participation annoncé quand on sait l'ampleur du désamour des populations avec le pouvoir et les partis politiques, fussent-ils de l'opposition ! Dans les villes, on vote de moins en moins, seuls se pressent devant les urnes les adhérents des partis et les clients du pouvoir, ceux qui ont un intérêt à y être bien vus par lui. Dans les zones rurales, les électeurs craignent l'administration mais ce ne sont plus d'importants gisements électoraux. L'exode rural a inversé la pyramide, voilà plus d'une décennie. L'Algérie, c'est celle des villes et des jeunes qui ont divorcé avec la politique. Ces derniers ont eu leur trop-plein au moment du FIS, qu'ils ont, par ailleurs, totalement délaissé, même pour charrier les femmes ou les forces de l'ordre. Le résultat étant là, avec le savant dosage entre les différents courants cooptés pour participer au jeu politique, que va-t-il se passer ? D'aucuns attendent un nouveau gouvernement et la nouvelle alliance présidentielle qui le composera. La coalition Algérie verte fera-t-elle partie du binôme FLN-RND ? Abderrazak Mokri, l'un des dirigeants de cette coalition islamiste, qui se considérait comme la personnalité montante de la nouvelle scène politique, devra ravaler ses prétentions. Ses accusations sur “le laboratoire” qui a travaillé pour offrir le nouveau patchwork ne convainc personne, il finira par s'asseoir autour de la pâtée, comme le faisait le MSP. Les islamistes aujourd'hui plus qu'hier, qu'hors du système, point d'avenir pour eux. L'élection présidentielle de 2014 sera, en tout cas, la prochaine échéance politique importante. Abdelaziz Bouteflika a annoncé ne pas être partie prenante à travers cet aveu à plusieurs lectures : la génération de novembre est finie. Les armes s'affûtent, d'ores et déjà, pour ce rendez-vous effectivement capital. D. B