L'Egypte va officialiser demain la commande pour l'achat auprès de la France de 24 avions de combat Rafale et d'une frégate multi-missions (FREMM), qui suscite des grincements de dents en France, où un débat est engagé sur la vente d'armes à des pays tiers peu respectueux des droits de l'homme. Du jamais vu, le contrat d'un montant de 5,2 milliards d'euros, qui porte sur la vente de 24 avions Rafale à l'Egypte, une frégate FREMM ainsi que des missiles MBDA, a été conclu en moins de trois mois seulement, après que le président égyptien ait fait part de son intention d'acquérir des matériels militaires français. Pour les observateurs, cette diligence de l'Egypte à se doter de moyens à même d'accroître sa sécurité est destinée à faire face à la menace terroriste en provenance de la Libye voisine, du Sinaï, mais aussi de se préparer aux conséquences des prochaines négociations sur le partage des eaux du Nil avec l'Ethiopie surtout. L'Egypte a fait part dans ce sens de sa volonté de se doter de ces matériels, début août, à l'occasion de l'inauguration du canal de Suez élargi. Autant de défis qui laissent présager son futur rôle régional. Au-delà de ce qui est qualifié de "contrat du siècle", cette vente d'armes serait une petite bouffée d'oxygène pour le budget de la défense française. Elle aurait pour conséquences de sauver l'industrie aéronautique à travers la création d'emplois en France, en sus du maintien de la loi sur la programmation militaire. Il est attendu, également, de la vente du Rafale de susciter un effet domino auprès d'autres pays qui ont manifesté leur intérêt pour l'avion de combat du français Dassault Aviation, notamment l'Inde, le Qatar et la Malaisie. Car, depuis son entrée en service en 2004, l'appareil avait jusqu'à présent essuyé six échecs à l'export. Pour l'Egypte, il s'agit, en revanche, de s'affranchir de la tutelle américaine sur son armement, et de là, des restrictions imposées à leur utilisation. Cependant, cette vente est critiquée au vu du bilan en termes de droits de l'homme du régime égyptien. Amnesty International France a appelé Paris à "suspendre tous les transferts d'armes" à l'Egypte en raison de la "répression sans précédent depuis 30 ans dans le pays". Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale du parti écologiste EELV, s'est pour sa part étonnée de la "priorité" accordée par l'Egypte à l'achat de ces avions vu "la difficulté économique et sociale dans laquelle elle est, une Egypte qui, a-t-elle rappelé, il y a une semaine, n'a pas hésité à tirer sur des manifestants". Interrogé sur le sujet, Jean-Yves le Drian a répondu : "À ma connaissance, le président Sissi a été élu par le peuple et, d'ailleurs, il y aura bientôt des élections législatives dans le pays". A.R.