Alors que le pays a l'air engoncé dans l'immobilisme, que les changements opérés dans l'opacité au sein de la hiérarchie continuent à alimenter les spéculations sur les enjeux qui les sous-tendent, la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CLTD) a annoncé une série d'actions pour la prochaine rentrée. Il s'agirait probablement, en attendant que l'agenda soit arrêté lors de la prochaine réunion prévue avant la fin du mois en cours, de la relance des conférences thématiques, de la tenue de meetings, de rassemblements et autres rencontres publiques. "Ces actions pacifiques se résument à des sit-in, des manifestations, des rencontres de proximité avec les citoyens, des conférences...", a expliqué le président du MSP, Abderrezak Makri. Il appartient donc à chaque parti composant la CLTD de formuler des propositions lors de la prochaine rencontre. Et au-delà de la nécessité d'investir le terrain, après une trêve de deux mois, la CLTD justifie ce qui s'annonce comme une nouvelle offensive, après la réussite de la réunion de Mazafran, par la crise qui plane désormais sur le pays. "Les signaux sont au rouge", soutient Makri qui prédit une rentrée mouvementée. Mais la question que d'aucuns se posent aujourd'hui est de savoir à quelle parade la CLTD, dont des membres disposent d'un gisement militant non négligeable et un capital expérience dans l'activité politique, devrait recourir pour contourner les interdictions que ne manquera pas, à n'en point douter, de lui opposer l'administration. Jusque-là de nombreuses conférences thématiques envisagées n'ont pas eu lieu faute d'autorisation de l'administration : c'est le cas par exemple de celle relative à la transition en juillet 2014 ou encore de celle récemment sur la corruption. De nombreux responsables la composant ont été aussi malmenés lors d'un rassemblement à Riadh El-Feth. Et on voit mal le pouvoir, réfractaire à toute forme de changement et redoutant un éventuel soulèvement populaire, autoriser la CLTD à organiser des meetings ou des marches populaires. À moins de quelques manœuvres, maintenant que les leviers de clientélisation se réduisent comme peau de chagrin, de sa part, histoire d'absorber la colère, mais aussi de desserrer l'étau d'éventuelles pressions externes, il serait illusoire d'attendre que le pouvoir lâche du lest. C'est pourquoi l'action de la CLTD relève, a priori, de la gageure. Se contentera-t-elle de quelques activités uniquement dans les sièges des partis alors que le défi pour elle est immense : changer les rapports de force au sein de la société à travers l'explication des objectifs de la transition ? Des objectifs qui exigent de la mobilisation, du temps et de l'énergie. À cela, il faut ajouter les risques d'implosion, en raison de la contrainte de l'action, mais aussi des velléités de certains partis, comme le MSP de jouer l'interface avec le pouvoir. S'il faut se garder de conclusions hâtives, la mission de la CLTD s'annonce, en tout cas, à tous points de vue, laborieuse, dans un contexte de fermeture politique et de renoncement général, conséquence d'une grave crise de confiance entre la population et ses élites politiques. Mais, paradoxalement, son projet que le pouvoir s'emploie à combattre apparaît comme celui à même de jeter les bases de la deuxième République et de mettre l'Algérie à l'abri de lendemains incertains.