Mohamed Saïd Beghoul est expert en énergie. Il est critique sur la politique énergétique. Dans une déclaration qu'il nous a faite, il explique que l'évolution du secteur énergétique doit consister en le développement d'un "mix énergétique" où différentes sources d'énergie contribuent et non en la création d'entités telles le CDER, la Creg, Alnaft, ARH, et le changement incessant des discours et des hommes à la tête du secteur de l'énergie, etc. L'évolution ne consiste pas en une simple vue de l'esprit. En Algérie, dit-il, le secteur de l'énergie n'a jamais eu une feuille de route qui soit visionnaire. Depuis l'indépendance, rappelle-t-il, le pays ne dispose que d'une seule source d'énergie, celle des hydrocarbures et donc on ne peut parler d'évolution dans ce secteur en termes de transition énergétique. Mohamed Saïd Beghoul évoque ce qui se fait dans certains pays en matière d'énergie, citant en exemple la France, où le mix énergétique est composé de 40% de nucléaire, 30% de pétrole, 15% de gaz, 10% d'énergies renouvelables et 5% de charbon. Notre "mix énergétique", souligne-t-il, reste encore contrôlé à 100% par le pétrole et le gaz. Et d'ajouter qu'en Algérie, l'évolution n'existe que sur les lèvres et le papier, comme c'est le cas du fameux Desertec qui était d'actualité en 2011. Desertec fait partie en fait des projets chimériques. Le pays a cru à un moment donné que cela pouvait aider au développement du renouvelable. Le projet n'a pas produit l'effet attendu, au grand regret de ses promoteurs. En réalité, Desertec n'a pas été inscrit dans une vision sous-tendant le mix énergétique. Du point de vue de M. Beghoul, durant la décennie écoulée, et avec l'embellie pétrolière, la notion de "mix énergétique" ne faisait d'ailleurs pas partie de notre vocabulaire. Une situation inéluctable ? La dégringolade des cours du pétrole semble avoir éveillé un certain intérêt pour le renouvelable et bousculé l'ordre établi. L'expert note en effet que depuis juin 2014, avec la déprime du marché pétrolier, les Algériens ont commencé à parler de la nécessité d'un "bouquet énergétique" qui ne pouvait être, en fait, qu'un "mix électrique" pour un pays comme l'Algérie. On dit que le passé est la clé de l'avenir. Pour lui, la meilleure façon de voir l'avenir du secteur est de jeter un petit coup d'œil dans le rétroviseur et voir si les discours et les prévisions du passé ont bien été traduits sur le terrain aujourd'hui. "En 2011, on prévoyait 540 MW d'énergie renouvelable pour les années 2014-2015 et 1950 MW pour 2016-2020. En mars 2016, on vient d'envisager de clôturer l'année avec seulement 380 MW, encore faut-il les atteindre. Que de beaux chiffres, que de belles paroles, mais la réalité a toujours été tout autre." Y. S.