Les attentats, qui ont fait près de 200 morts et des milliers de blessés au cours de cette année en Turquie, ont non seulement fait fuir les touristes, mais aussi affaibli la diplomatie turque, qui a plié devant la Russie et Israël pour sortir de son isolement. Le triple attentat-suicide qui a secoué mardi soir l'aéroport international Mustapha-Kemal-Atatürk d'Istanbul, et dont le mode opératoire rappelle les attentats terroristes ayant ensanglanté Paris en novembre 2015 (130 morts) et Bruxelles (32 morts dans le métro et à l'aéroport) en mars 2016, intervient dans une conjoncture défavorable pour la Turquie. Selon les autorités officielles, des explosions ont d'abord eu lieu à l'entrée du terminal des vols internationaux vers 22H00 (19H00 GMT). Trois assaillants ont mitraillé des passagers ainsi que des policiers en faction, une fusillade a éclaté puis les kamikazes se sont fait sauter. Le bilan de cette boucherie s'est alourdi hier à 41 morts et 239 blessés, selon un communiqué du gouvernorat de la plus grande ville de Turquie. Il y a parmi les victimes treize ressortissants étrangers, dont trois ont la double nationalité, selon la même source, qui a précisé que 130 blessés étaient toujours traités dans des hôpitaux de la ville. Parmi les 13 étrangers tués, figurent 5 Saoudiens, 2 Irakiens, un Tunisien, un Ouzbek, un Chinois, un Iranien, un Ukrainien et un Jordanien, selon un responsable turc. Bien que jusque-là l'acte terroriste n'ait pas été revendiqué, le Premier ministre turc a pointé du doigt le groupe terroriste de l'Etat islamique. C'est un rude coup qui est porté à la Turquie, dont le tourisme, déjà plombé par les attentats à répétition, risque de connaître les pires difficultés sur le plan économique. Considéré comme l'un des grands pourvoyeurs de devises de l'économie turque, avec près de 30 milliards d'euros de revenus par an, le secteur touristique est désormais une industrie sinistrée. Pour le seul mois de mai, le ministère du Tourisme a fait état de la plus forte baisse d'arrivées en 22 ans, avec une chute de près de 35% du nombre de touristes étrangers, à 2,5 millions de visiteurs. De toutes les manières, c'était l'une des motivations clairement affichées par les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), un groupe radical proche des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), dans sa revendication de l'attentat à la voiture piégée qui a fait 11 morts, le 10 juin, dans le quartier historique de Beyazit, une zone touristique d'Istanbul. "Nous tenons à avertir les touristes étrangers en Turquie et ceux qui veulent s'y rendre : les étrangers ne sont pas notre cible mais la Turquie n'est plus un pays sûr pour eux", avait souligné l'organisation. D'ailleurs, les attentats récents ont tous ciblé en priorité des sites touristiques emblématiques. Et cet attentat à l'aéroport intervient alors que s'annonce pour les Turcs le long congé de bayram, occasion de voyages, et que, normalement, la saison estivale doit déjà battre son plein dans ce pays de soleil, de mer turquoise et de monuments. C'est dire que les autorités turques devront mettre les bouchées doubles sur le plan sécuritaire s'ils ne veulent pas que leurs installations touristiques restent désertiques durant la période estivale. Merzak Tigrine