Des journalistes ont organisé, hier matin, un rassemblement à l'intérieur la cour de la maison de la presse Tahar-Djaout, à Alger, en solidarité avec Sofiane Merakchi, journaliste free-lance en détention préventive depuis bientôt quatre mois. D'emblée, Mohamed Sidmou, du quotidien El-Khabar, a replacé l'action dans sa dimension réelle. "Nous ne disons pas que nos confrères sont innocents, mais ils ont le droit à un procès équitable." Khaled Drareni, porte-parole du Collectif des journalistes algériens unis (CJAU), a précisé que Belkacem Djir est effectivement poursuivi pour un délit de droit commun, mais "Sofiane Merakchi a été incarcéré parce qu'il est journaliste". Correspondant de la chaîne El-Mayadine qui transmettait régulièrement les actes du mouvement citoyen, notamment les marches des mardis et vendredis, Sofiane Merakchi serait accusé "de diffusion en direct, avec des chaînes étrangères, sans licence et incitation au rassemblement". D'autres sources donnent des chefs d'inculpation différents, soit introduction d'équipements sans licence et évasion douanière. "Nous ne sommes pas des magistrats pour condamner nos confrères ou les blanchir. Mais je suis convaincu que derrière ces emprisonnements, il y a une volonté de faire plier la profession. Le journalisme n'est pas un crime", a relevé Redouane Boussag, ancien présentateur de la chaîne El-Bilad, qui a démissionné de son poste pour ne pas cautionner l'omerta imposée sur le hirak. "Actuellement, le journaliste est pris en étau entre les manifestants qui lui reprochent de ne pas répercuter la réalité du terrain, son employeur qui exerce sur lui un harcèlement moral et les pressions de la police et de l'appareil judiciaire", a-t-il poursuivi. Il est corroboré par Djaafar Kheloufi qui a rappelé le caractère exceptionnel, en principe, de la détention préventive. Hakim Addad, membre fondateur du RAJ, était voisin de cellule des deux journalistes à la prison d'El-Harrach pendant trois mois. "Belkacem Djir est fortement atteint au plan psychologique. N'était le soutien moral de Merakchi, il aurait sombré depuis longtemps. Les deux hommes sont affligés d'être des oubliés de la corporation", a-t-il témoigné. Vendredi, quelques dizaines de professionnels de la presse ont formé, devant la mosquée Errahma, un carré pour protester contre le maintien de Belkacem Merakchi en prison sans procès. Ils ont brandi son portrait en scandant : "Sahafa hourra démocratiya" (Presse libre et démocratique). C'était au point et à l'heure du démarrage de la manifestation hebdomadaire, à savoir la rue Didouche-Mourad. La corporation est interpellée sur le cas des deux confrères, et tout particulièrement depuis qu'ils sont entrés en grève de la faim, la semaine dernière.