Ça lui fait une belle jambe au chômeur que les pouvoirs publics lui apprennent que le taux de chômage a diminué. Il ne manquait que cela pour le rendre heureux. Cela fait également une belle jambe aux pauvres que les pouvoirs publics leur apprennent que le nombre de pauvres a diminué. Il ne leur manquait que cela pour être heureux. Cela fait également une belle jambe aux SDF que de leur apprendre que les pouvoirs publics ont réalisé et distribué trois millions de logements. Il ne leur restait que cela pour être heureux. Cela fait également une belle jambe aux familles des éléments des forces de sécurité qui continuent à tomber que de savoir que la paix est revenue. Il y aura le retour de la paix quand il n'y aura plus aucun policier ou militaire qui tombera sous les balles des terroristes. Qu'est-ce qui peut rendre un chômeur extrêmement patient quand il voit que toutes les portes sont fermées devant lui alors qu'on annonce que des millions d'emplois sont créés ? Qu'est-ce qui peut rendre un SDF ou un très mal logé extrêmement patient quand on annonce avoir relogé (d'ailleurs, on reloge, on ne loge pas) des centaines de milliers de familles ? Quant aux pauvres, ils ne le sont pas au regard des critères fixés pour dire qu'un pauvre est un pauvre ou alors il est un riche qui s'ignore. Les besoins ne sont pas de ceux qui peuvent procurer des incitations à la patience. L'absence d'écoute traduit de l'indifférence et celle-ci est fatalement lue comme du mépris. Elle convainc les populations que les pouvoirs publics préfèrent recourir à la répression plutôt qu'à l'instauration du dialogue comme base de l'action quotidienne stratégique. Dans un pays qui a connu bien des déficits sur tous les plans, dépendant exclusivement des cours des hydrocarbures pour assurer sa sécurité alimentaire, sécurité médicale, de financement de son fonctionnement, il ne faudrait pas s'attendre à ce que la paix sociale soit éternelle. Il ne faudrait pas s'attendre également à ce que les frustrations socioéconomiques permanentes ne se transforment pas en revendications politiques. Cela viendra quand les protestataires finiront par se convaincre qu'ils donnent des coups d'épée dans l'eau. Ces temps-ci, on parle beaucoup de la sécurité dans sa dimension «militaire», même s'il est connu que ce n'est pas cette composante qui est totalement déterminante. Pourquoi privilégier uniquement la dimension militaire alors qu'il est connu que la principale dimension de l'insécurité est plutôt celle qui concerne l'économie, le développement ? C'est même plus grave qu'une erreur de croire que des interventions militaires de l'Otan valoriseront la démocratie en tant que facteur déterminant pour instaurer pour toujours une situation de respect des droits de l'homme ou de sauvegarder que le développement et ce qui en découle est aussi important.
