Le pouvoir serait-il sur le point de siffler la fin de la partie ? On serait en tout cas tenté de le croire après avoir entendu le ministre de l'Intérieur déclarer que les associations n'ont pas à faire de la politique, ni à tenir de rassemblement par exemple et encore moins à manifester dans la rue. Rassemblements publics et manifestations de rue ne sauraient être considérés comme rien d'autre que des «troubles à l'ordre public». Et par conséquent, toujours dans cette logique ministérielle, sévèrement réprimés. La loi n'est-elle pas faite pour cela ? Cet art consommé de brandir la matraque face au moindre mécontentement et à la tentation de l'exprimer pacifiquement et publiquement pour attirer l'opinion et la prendre «à témoin», et réclamer des droits légitimes, ne sont pas du tout du goût de ce pouvoir autoritaire qui entend tout contrôler, tout «régenter», voire même sévir à l'encontre de la société civile et de l'opposition politique par le biais d'une administration plus puissante que jamais et qui a fait preuve jusque dans l'art de détourner des scrutins pour faire «élire» députés et sénateurs conciliants pas du tout dérangeants, bien au contraire. En dépit des changements qui interviennent quotidiennement sur la scène arabe depuis une année, le pouvoir ne parvient à apporter aux attentes des Algériens d'autres réponses que celles de la force, de l'interdiction et de la répression après avoir excellé dans la manipulation. Car il faut le souligner – et on ne le rappellera pas suffisamment –, c'est d'abord le pouvoir politique qui a fait de la manipulation et de la récupération politique, dans tous les domaines, le moyen le plus sûr pour arriver à ses fins, à savoir se maintenir et «court-circuiter» toute contestation d'où qu'elle vienne. Cela a débuté par les mosquées et l'utilisation de la religion par exemple et la manière avec laquelle l'Etat s'est illustré dans «la normalisation et l'uniformisation» des prêches religieux pour finir avec l'éclosion inconsidérée des comités de soutien au président de la République ou au programme présidentiel et le zèle dont ils font preuve sont frappés de suspicion et prouvent que plus d'une fois qu'ils sont l'émanation d'officines dépendant du pouvoir politique ou qui en sont proches. Combien de fois n'a-t-on vu à l'approche d'une réélection présidentielle jusqu'aux associations sportives, des clubs de football proclamer leur attachement au président de la République et à son programme ou encore à la réconciliation nationale, etc. ? Il ne faut pas être grand clerc pour deviner que de telles initiatives aussi «spontanées» sont d'abord le fait de l'Administration, dont le ministère de l'Intérieur, et suggérées par elle. Aujourd'hui ce qu'elle se permet de faire à dessein, elle entend l'interdire aux autres à l'image de ce proverbe populaire qui dit : «Vous ne tolérez pas la présence de notre coq sur votre terrasse mais nous sommes obligés de supporter votre chameau sur la nôtre.»