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Bouteflika-DRS : La part du bruit, la part de la fureur
Publié dans El Watan le 21 - 02 - 2014

«Regardez toutes ces cités sorties de terre en si peu de temps, tous les appartements appartiennent à des officiers et à des sous-officiers du DRS.» Ce haut fonctionnaire de la présidence de la République ouvre grands ses bras malgré le costard cintré qui emmaillote sa grande taille. Le ton est colérique, avec une moue de dégoût déformant sa bouche. Nous sommes quelque part aux abords de Saïd Hamdine, sur les hauteurs d'Alger, pas loin de certaines casernes de l'ex-Sécurité militaire, vouée publiquement aux gémonies par le clan présidentiel. «Des années et des années à piller, à se mettre du fric dans les poches, à faire les cow-boys sans qu'aucune autorité ne les arrête, poursuit-il. Il faut en finir avec eux.» «Nous les avons trop subis, l'impunité a trop duré», renchérit l'homme, fidèle au clan présidentiel, sherpa du cercle restreint d'El Mouradia, dans différentes missions discrètes de lobbying, notamment au sein du parti FLN.
«Ils se sentent tout-puissants ces moustachus du DRS. Ils se barricadent derrière leur patron, ce Toufik, complètement parano, enfermé dans son bureau-bunker, qui passe ses journées – ce grand malade – à fomenter des complots, à tirer les ficelles de la politique, de la société, de l'économie, de la diplomatie et de la presse – oui, oui, vous êtes tous complices – pour échafauder ses plans démoniaques…», s'emporte le haut fonctionnaire de la Présidence, avant de se calmer : «Vous devriez être de notre côté si on veut se débarrasser de la toute puissance du DRS et de son patron.» Du côté de qui exactement ? «On sait qu'une partie de la presse privée ne nous aime pas, parle de Saïd Bouteflika à tort et à travers, mais il n'a aucun lien avec les affaires d'argent sale, se défend notre haut fonctionnaire. Le fait est que des gens malhonnêtes règlent leurs affaires de business, ici en Algérie ou à l'étranger, en se faisant passer pour des proches du frère, alors ne soyez pas si dogmatiques et aveugles !»
Haine
«Je suis passé pas loin, j'aurais pu l'écraser avec ma BMW, mais il a reculé au bon moment, m'a reconnu et a passé son chemin.» Le gaillard est robuste, muscles nerveux saillants sous la veste en jeans, le 9 mm écrasant ses côtes dans son holster en cuir ramené des USA. Youcef débite sa haine sans ménagement, cette jeune recrue du Scorat n'a pas froid aux yeux, ce n'est pas dans les habitudes de la maison d'ailleurs. «On nous fixe un objectif, et on y va, on ne discute pas, on fonce, pour la patrie, on a été formés et, plus que ça, éduqués ainsi.» «C'était Saïd, le frère de Bouteflika, à Hydra, je voulais juste lui faire peur, après tout ce qu'on sait sur lui, ce qu'il a fait aux gradés à la Présidence, les humiliations, les cris, les gifles… On n'est pas du bétail.» Youcef, pourtant très mesuré dans ses propos, économe dans ses gestes (tout une ergonomie imposée par sa filiation au Scorat, ou Service de coordination opérationnel et de renseignement antiterroriste tenu par le général Hassan, ou Abdelkader Aït Ouarabi, un concentré d'éléments fantômes et efficaces), se lâche : «Nous obéissons à nos chefs, au Président, au général Toufik, mais pas à des voyous comme Saïd qui salissent l'honneur et le sang de ceux qui crèvent, alors que lui bâtit des villas à Poirson.»
Le «Barbu»
Calmez-vous sergent, il ne s'agirait que de rumeurs, des accusations infondées, du fantasme. «Que lui importe à lui ou d'autres si nombreux, enragés contre les humiliations que font subir le clan des Bouteflika aux combattants du terrorisme ?!», nuance, ombrageux, un ex-membre des commandos du soudain disparu et sulfureux Smaïl Lamari, reconverti dans l'industrie sécuritaire. «Ces mecs-là ont comme idole Othmane Saadi (colonel du Scorat, dit Boulahya (le Barbu), génie de l'infiltration et de la destruction des groupes islamistes, tué dans un attentat début 2010 à Akbou), pas les dandy de Sidi Yahia si fiers d'avoir dîné avec Saïd Bouteflika», poursuit notre ex-opérationnel.
Deux mondes s'opposent, s'affrontent donc. Les uns défendent les combats qu'ils ont menés au sein du DRS et de l'Armée nationale populaire contre le terrorisme, fermant les yeux sur les dérives des siens ; les autres, du clan présidentiel, regardent ces derniers comme les fondés d'un pouvoir qu'ils ne veulent partager. «Durant tout son règne, le Président a mené une longue guerre pernicieuse contre l'armée sans jamais la faire éclater au grand jour afin d'asseoir l'autorité qui lui manquait», témoigne un ancien ministre de Bouteflika. «Bouteflika a déjà menacé, il y a quelques années, les chefs de la lutte antiterroriste de leur coller la mort accidentelle de Saïdi Fodhil, l'excellent général pressenti pour remplacer Mediène, il les a menacés de lancer les ONG internationales sur la piste des véritables commanditaires du meurtre de Boudiaf ou de Kasdi Merbah, rappelle un haut cadre de l'Etat.
Il vilipendait le club des “15 puissants“ en parlant du cabinet noir des généraux janviéristes et à Jijel, il a même cité le “fumeur de cigare“ pour parler de Mediène, mais c'était du beaucoup plus théâtre.» Du théâtre ? Pas tellement. «Bouteflika et son frère cadet, Saïd, n'oublieront jamais que c'est l'armée et Kasdi Merbah, patron des services à l'époque, qui l'ont évincé de la Présidence en 1979 après le décès de Boumediène», note un ancien haut officier. «C'est un revanchard», poursuit-il.
«Des singes !»
«Bouteflika a refusé le poste de Président en 1994 parce qu'il ne voulait pas avoir Khaled Nezzar, le parrain de l'armée à l'époque, comme cofondé de pouvoir», rappelle-t-on. «Ou parce que la situation était trop explosive à l'époque, avec un Khaled Nezzar et un Larbi Belkhir qui faisait le ménage dans l'armée pour s'imposer, Mediène et Smaïl Lamari en embuscade», rappelle encore un ex-général témoin des tensions de 1993-1994. Pour Bouteflika, ce sont des «requins qui règlent les affaires entre eux», des «gros bras qu'il faut mater du premier coup», raconte un proche du Président. Et il leur a montré de quel bois il se chauffe en 1999, lors de sa première réunion avec l'état-major : «Ce sont quelques petits singes de montagne qui vous ont donné le tournis depuis toutes ces années», lança-t-il aux généraux qui s'étranglaient de rage alors qu'ils lui présentaient la situation sécuritaire et les plans de l'antiterrorisme. «Un officier s'est levé et a lancé : “Je ne vous permets pas d'insulter les sacrifices de nos hommes.“ Bouteflika l'a regardé sans rien dire et l'a ignoré», confie un témoin de la scène, il y a quelques années.
Mépris ?
N'y a-t-il que du mépris dans l'attitude de Bouteflika (ou des Bouteflika) vis-à-vis de l'armée ? «Non, il y a pire», rappelle un ancien ministre de Bouteflika : «Très clairement, le Président et ses proches ont bien précisé à tout le monde dans le sérail que ce qui s'est passé avant 1999, ce n'étaient pas ses affaires.» «La décennie noire, les dérives sécuritaires, les massacres, Tibhirine, les disparitions forcées, le Colas, les Ninjas, les rafles, les camps du Sud, Boumaârafi… tout ça c'est vos m… C'est le message de Bouteflika», ajoute l'ancien ministre qui poursuit : «Mais en agissant de la sorte, le Président ignore un principe capital de la gouvernance : la continuité de l'Etat, car le Président restera comptable de tout ce que l'Etat algérien a fait, c'est un principe inaliénable et auquel les Occidentaux tiennent beaucoup.» Que veut l'armée donc ?
«Laissez-nous travailler»
«Qu'on nous laisse bosser tranquilles.» Imad, la quarantaine, est commandant dans une direction technique de l'état-major aux Tagarins (Alger). Etudes à l'étranger grâce à des bourses pour son excellence, famille modeste, Kabyle et mélomane, génie de l'informatique. «Nos chefs, civils et militaires, sont vieux et se font la guerre sale, ils ne nous laissent jamais travailler, avancer dans la modernisation de l'armée, car ça leur fait peur», confie Imad. Avec ses jeunes camarades, ils s'évadent en pêchant au large d'Alger-Ouest en embarquant leurs guitares et en rêvant de faire leur boulot au mieux, loin des paranos du DRS ou des grabataires de l'état-major ou de la Présidence.
Au large, dans leur petite barque, les jeunes officiers, bien formés, trilingues et pointilleux dans leur travail ingrat, toisent de loin les côtes ouest qui abritent les résidences du Club des Pins et de Moretti où se trament les complots, le Centre de repos familial de Sidi Fredj où logent quelques gros bonnets de l'armée et du DRS, et à côté, pas loin, la résidence médicalisée du chef de l'Etat. Panoramique des intrigues et du sommet en panne d'avenir. «Je ne suis pas spécialement pratiquant, dit Imad, mais j'aime bien cette prière : “Dieu, fais que les oppresseurs se battent entre eux et sors nous sains et saufs d'entre eux.“» 


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