Comment vous êtes-vous retrouvée membre de jury à cette 31e édition du Festival de cinéma Vues d'Afrique ? J'ai découvert le festival Vues d'Afrique en 2012 en organisant la Semaine internationale sur l'Algérie et sa culture à Montréal. Pour les besoin de la programmation, je recherchais des films algériens primés, Bousmaha Seddiki commissaire de l'exposition m'a orienté vers Vues d'Afrique et nous avons donc conclu un partenariat, l'événement fut une réussite et cela a marqué le début de belles collaborations. J'ai été membre du comité de visionnement lors des deux dernières éditions du festival, et j'ai eu le plaisir de présenter des films algériens à l'instar de Kedach thabni de la réalisatrice Fatma Zohra Zamoum, sélectionné en 2013. J'ai également participé à la rédaction des « coups de cœur » de la programmation de la 29 e édition. J'aime beaucoup Vues d'Afrique, et je tente chaque année d'encourager la visibilité de l'Algérie en soumettant à la programmation des productions et réalisations algériennes. Lorsqu'on m'a invitée à faire partie du jury de la 31ème édition, j'ai accepté avec plaisir. Le jury ''Afrique Connexion'' dont je fais partie remettra le Prix de l'Organisation Internationale de la francophonie dans trois catégorie Court métrage, Long métrage et Série. Le cinéma me passionne car c'est un médium interculturel unique, et même s'il est perçu par beaucoup de gens comme un simple divertissement, il représente pour moi une des formes d'expression culturelle et identitaire les plus puissantes. De plus, par l'universalité de son langage, il joue un très grand rôle dans le dialogue des cultures et la construction de la mémoire collective. Un film peut changer votre vision du monde ! C'est en évoluant dans le domaine culturel, que j'ai pris conscience du pouvoir et du rôle du cinéma et c'est un ami réalisateur qui m'a initiée au monde de la production. En 2013, j'ai créé SN Production, une compagnie spécialisée dans la production artistique et cinématographique. Nous produisons actuellement notre premier long métrage documentaire. Nous avons également produit un vidéo-clip tourné au cœur du Sahara, dans le cadre d'une exposition sur le désert algérien à Montréal. Notre projet de film documentaire a été sélectionné au Marché international du film documentaire de Sitges en septembre dernier et j'ai également bénéficié d'une formation dans le domaine de la production via le programme Euromed en 2013 grâce à ce projet. Produire est un grand défi et je pense réellement que la passion est le moteur du cinéma indépendant. Quels sont les ingrédients – les nécessaires et les petits plus – qui font que vous penchez pour un film plutôt qu'un autre ? Comme membre du jury, il y'a des recommandations et des consignes auxquelles on doit se soumettre, mais au delà de cela, il y a une grande place à la subjectivité. Je crois qu'il y a un rapport unique entre chaque membre du jury et l'œuvre qu'il visionne. Pour ma part, un bon film doit me faire rêver, il faut qu'il me déconnecte de ma réalité et me connecte avec la sienne, pour que la magie du cinéma opère et pour que je puisse vivre une expérience cinématographique. Je considère que voir un film c'est voyager dans le monde du réalisateur. C'est également se soumettre à une expérience cognitive. Il y a certains films qui vous marquent émotionnellement. Dans le cadre de ce festival, je préconise les œuvres qui ont un impact sur le public et qui remettent en question certains paradigmes socioculturels, car ce sont des œuvres qui poussent à la réflexion et au débat. Est-ce que le public montréalais s'intéresse au cinéma africain ? Vues d'Afrique est un rendez-vous incontournable pour les cinéphiles montréalais, car il représente une vitrine sur le cinéma et la culture africaine, et c'est une occasion unique de découvrir des œuvres cinématographiques qu'on n'a pas l'occasion de voir dans d'autres festivals. Le public montréalais est très curieux et également ouvert sur le monde, la culture a une très grande place à Montréal, pour preuve le nombre de festivals et d'événements culturels qui y prennent place. Si on porte un regard sur le public de Vues d'Afrique, il y a également une grande diversité. Il y'a ceux qui viennent découvrir le continent africain à travers son cinéma. D'autres viennent voir les productions de leur pays d'origine. On peut d'ailleurs percevoir une certaine fierté chez les personnes qui voient leur culture mise à l'honneur. Je ressens personnellement beaucoup d'émotions lorsque des films algériens sont projetés, plus particulièrement lorsque ce sont des jeunes cinéastes qui laissent exprimer leur génie créatif pour porter à l'écran des chefs d'œuvres. Je pense notamment à Karim Moussaoui et Anis Djaad qui ont séduit le public en apportant un regard nouveau sur l'Algérie. Leur film ont d'ailleurs été primés à Vues d'Afrique. Dans le public, on rencontre également des Québécois qui ont eu l'occasion de se rendre en Afrique; et ce festival est une sorte de pèlerinage pour eux. Ce qui attire également le public, c'est les débats et les tables rondes organisés en marge des projections, car cela laisse la place à des rencontres et des échanges inédits. En somme, le public est divers et cette diversité est à l'image de l'Afrique, c'est un continent chargé d'histoire, et au niveau de la cinématographie, il y'a un large éventail de choix. J'ai moi même découvert beaucoup de cinéastes africains grâce à ce festival. Des projets en cours pour SN production? SN production compte déjà plus de 10 productions artistiques incluant des expositions, des conférences, des concerts et des tournées artistiques à Montréal mais également dans d'autres villes du Canada. Nous sommes également fiers d'êtres partenaires de plusieurs festivals de musiques, d'arts visuels et de cinéma à l'instar du Festival International Nuits d'Afrique de Montréal, le Festival du Monde Arabe, le Festival Orientalys, le Sunfest en Ontario, et le Festival International de Cinéma et d'Arts visuels Vues d'Afrique. Nous avons également collaboré avec l'agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC). L'équipe s'est agrandie avec Karima Boughrara qui a récemment pris la direction artistique. Elle a fait un travail extraordinaire en Algérie dans le domaine musical et elle a longtemps œuvré pour la reconnaissance des musiques traditionnelles. Cherif Ferah qui est le cofondateur de SN Production en assure aujourd'hui la planification stratégique. De beaux projets sont à venir mais je peux vous annoncer dès aujourd'hui nos deux prochains événements: nous produirons le 15 mai prochain, la Mezzo Soprano Fairouz Oudjida pour un récital exceptionnel. Fairouz a le don d'émouvoir le public par la puissance de sa voix et par la richesse de son répertoire. Le 12 juin, nous recevrons le pianiste de renom Zaki Allal, qui se produire au cœur de la prestigieuse école de musique Schulich de l'université Mcgill. Zaki a une carrière internationale, il s'est notamment produit au Carnegie Hall de New York et il se produira à Paris après Montréal. Nous voulons offrir cette année à notre public un nouveau regard sur la culture algérienne à travers ces artistes de talent qui excellent dans le registre classique. Notre site internet SN-production.com sera prochainement en ligne, il servira également de plate-forme de rayonnement pour nos artistes et notre culture. Pouvez-vous nous dévoiler le film que vous allez primer en tant que membre deu jury de Vues d'Afrique ?! Je ne peux le dire à l'avance ! je n'ai pas encore visionné les films d'ailleurs ! mais j'invite le public à venir voyager, découvrir et échanger lors de cette 31e édition. Je m'attends également à beaucoup d'émotions lors de l'hommage qui sera rendu cette année à Assia Djebar et à René Vautier.