Il est vrai que le hirak a énormément éveillé les consciences et réveillé ce besoin d'aller vers l'autre et de débattre de la situation que traverse le pays et des aspirations de tout un peuple. Et si d'autres villes du pays ont dépassé le stade des marches hebdomadaires en occupant l'espace public par l'improvisation ou la programmation de débats périodiques, à Skikda, et depuis le 22 février, les initiatives de ce genre restaient timides, pour ne pas dire inexistantes. Seuls les réseaux sociaux foisonnaient d'initiatives limitées et souvent restrictives, restées toutes au stade du balbutiement. C'est dans ce no man's land de la communication, qu'une cinquantaine de jeunes universitaires ont lancé le concept Dialogue citoyen. «Nous avons décidé d'organiser un dialogue ouvert à toutes les tranches du peuple, qui sera une plateforme dédiée à la discussion à propos de la situation actuelle et de la citoyenneté active. Car ce qui nous semble comme un regain d'espoir chez tout le peuple, doit croître pour donner une énergie positive qui va nous permettre à tous d'aller de l'analyse de la situation actuelle vers la résolution de cette crise de la meilleure des manières», estiment-ils. Leur action n'a pas tardé à connaître un vif succès auprès des étudiants, puisqu'à ce jour, quatre sessions à thématiques diverses ont déjà été organisées. «Nous n'avons pas la prétention de représenter les citoyens ni d'imposer nos points de vue», tiennent-ils à préciser lors d'une rencontre avec les cinq jeunes initiateurs du Dialogue citoyen. Rafik Bella, Abdelbasset Saoula, Adel Meraka, Seddik Daïboune-Sahel et Waïl Souames, puisque c'est d'eux qu'il s'agit, semblent assez rompus aux ficelles de la communication. Normal, ils ont tous déjà acquis une certaine expérience au sein de l'association locale Sustainable Youth Development (SYD), dont ils sont membres dirigeants. «Nous sommes conscients que le changement politique ne suffira pas à lui seul à apporter ce plus au pays, s'il n'est pas accompagné par un changement culturel», estime le jeune Abdelbasset. «C'est de cette conviction qu'est née notre volonté à nous réunir avec des dizaines de jeunes en vue de les impliquer dans la chose politique. Chaque semaine, nous optons pour un thème et, pour encourager le dialogue, nous préparons généralement quelques questions relatives à la thématique du jour pour enclencher le débat, souvent contradictoire. A la fin de chaque session, nous rendons public un compte-rendu comprenant le résumé des interventions des uns et des autres et les idées fortes du jour», explique Adel. Depuis sa mise en pratique, l'initiative a déjà rassemblé plusieurs dizaines de jeunes qui ont eu à se rencontrer et à débattre de divers thèmes. «Le premier thème a concerné la situation actuelle du pays, puis on a tenu à nous inscrire dans l'atmosphère du mouvement populaire que nous vivons en proposant de débattre des solutions pouvant résoudre la crise actuelle. On a aussi soulevé la problématique du développement ainsi que les scénarii possibles pour 2020», ajoute Rafik. «Nous œuvrons à faire de ce ”dialogue citoyen” une plateforme dédiée à la discussion à propos de la situation actuelle et de la citoyenneté active», concluent les jeunes initiateurs. Ces derniers ont d'ores et déjà gagné la bataille de l'initiative dans leur ville et le simple fait d'avoir rassemblé des dizaines de jeunes et d'enclencher le processus social de l'écoute et du partage est déjà une belle victoire contre l'inertie cérébrale et créative qui mine la ville. Bravo à vous… et surtout continuez à nous étonner.