La lune se vide et avec elle le sablier du temps. Mardi ou mercredi sera sifflée la fin de ce match difficile contre pulsions, désirs et envies naturelles, sous une chaleur qui appellerait plutôt à l'hydratation permanente. Ce Ramadhan aura d'ailleurs faussé les calculs du régime ou de ce qu'il en reste ou de ce qui le représente encore. Misant sur l'essoufflement, il a dû se résigner à voir la mobilisation ne pas cesser, portée par les étudiants dont l'énergie renouvelable repose la question de cette économie basée sur la rente tirée d'un combustible fossile et qui n'a pas fait l'objet de débats malgré l'ambiance générale de changement. Le Ramadhan n'est pourtant pas qu'abnégation, on a tous rêvé Bedoui roulé serré dans un bourek maison, Bensalah cuit à feu vif dans une chorba piquante, Gaïd Salah végétarien ou le procureur général responsable de la mort de Fekhar finir en friture à Ghardaïa, dehors à midi. Les Algérien(ne)s ont tenu surtout, parce que parmi les 5 piliers de l'islam, ils ont délibérément choisi le plus dur. Là où en gros on privilégie la prière en Egypte, la zakat et la bienfaisance aux Emirats ou le hadj en Afrique subsaharienne, ici on vote pour le Ramadhan, le plus difficile, le plus énergivore, le plus éprouvant, car il s'inscrit sur la plus longue durée. Qui d'ailleurs dépasse le strict cadre religieux, il s'agit, même pour ceux qui n'y croient pas, de le faire par «redjla», montrer aux autres et à soi-même qu'on peut tenir sans manger ni boire, prêts pour la guerre avec cet entraînement commando annuel. Les Algérien(ne)s ont donc fait le plus dur, le Ramadhan, et poussé Bouteflika à la démission, ce qui n'était pas du tout évident, quand on voit le nombre de troupes, zélateurs et appareils qui poussaient à la reconduction. Il reste en théorie le plus simple, changer le gouvernement et les walis, mettre en place un mécanisme de représentation juste et d'élections honnêtes. Puis voter. Pour qui ? Ni raqi ni Annunaki ni drabki. On veut du sens, pas du son.